Trois éducatrices sont poursuivies pour avoir ligoté des enfants avec du ruban adhésif dans le foyer scolaire Gellé à Bonnevoie entre 2007 et 2009.
Dix audiences auront finalement été nécessaires pour boucler les débats dans ce procès où comparaissaient trois éducatrices, âgées aujourd’hui de 33 à 35 ans, pour avoir attaché plusieurs enfants prétendument trop agités avec du ruban adhésif à une chaise. Alors que les prévenues affirment chacune avoir recouru une seule fois à cette méthode, le parquet ne croit pas en cette version.
À la différence des avocats de la défense, le parquet qualifie les déclarations des différents enfants de crédibles. Avec beaucoup de précisions, certains enfants auraient décrit les scènes de ligotage aux enquêteurs. L’un avait ainsi expliqué avoir dû mettre les mains dans le dos. Et qu’il aurait été attaché tellement fort qu’il ne pouvait plus bouger. Un autre affirmait qu’on lui avait également scotché la bouche. Au moment de retirer le ruban adhésif, cela lui aurait fait vraiment mal. D’autres enfants avaient apporté des vrais détails sur le ruban adhésif : « C’est un scotch marron qui ressemble à du plastique. »
Le parquet reproche à la prévenue Aline L. d’avoir ligoté au total quatre enfants de son groupe. « Selon les enfants, le mode opératoire est toujours le même. Pour se libérer, il faut prendre les ciseaux. » En outre, la prévenue Claire W. est poursuivie pour plus d’un fait. À la prévenue Michèle P., le paquet reproche un seul fait. « Dès le début de l’instruction, elle est en aveu et reconnaît que ce n’est pas correct. »
«Une vraie régularité s’est installée»
Pour le parquet, il y a donc bien eu un délit de commis : « Les enfants sont ligotés avec du ruban adhésif à la chaise afin de les discipliner et de les calmer. Les faits reprochés sont une voie de fait. » Même si les actes n’ont pas laissé de traces de blessures, il y aurait eu atteinte à l’intégrité des enfants. La représentante du parquet soulève la circonstance aggravante qu’au moment des faits les éducatrices avaient l’autorité sur les enfants alors âgés de 4 à 7 ans. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois qu’une affaire d’enfant scotché à la chaise passe au tribunal, poursuit-elle en faisant référence à un jugement du 28 mai 2015.
Mardi, au cours de leurs plaidoiries, les avocats à la défense avaient évoqué l’état de nécessité. Or pour le parquet, il n’est pas possible de le retenir d’un point de vue juridique. « Que ce n’était pas facile, je veux bien », considère le premier substitut, mais les éducatrices travaillant à l’époque au foyer scolaire Gellé à Bonnevoie auraient eu d’autres possibilités que de recourir à du ruban adhésif pour protéger les enfants de la marmite d’eau bouillante au moment de la distribution des repas.
Le parquet requiert une amende à l’encontre de chacune des trois prévenues et demande de ventiler la peine par rapport aux faits reprochés. « Il y a une différence entre un fait unique et si on y recourt régulièrement. Pour Aline L. c’est une véritable régularité qui s’est installée» , estime Anouk Bauer. « J’espère que le message est passé qu’on ne peut pas attacher un enfant à une chaise », conclut-elle.
Le 2 mars, la 18e chambre correctionnelle rendra son jugement.
Fabienne Armborst