Au Findel, l’École de Police forme chaque année près de 200 stagiaires grâce à une pédagogie mêlant théorie, pratique et immersion progressive sur le terrain.
«Nous voulons éviter que les élèves soient assis en cours de 8 h à 17 h sans action», indique Mikaël Ferreira Fernandes, directeur adjoint de l’Ecole. Pourtant, au cœur d’un bâtiment moderne de 3 500 m² situé au Findel, l’étude théorique se fait au sein de salles spacieuses et lumineuses, dans lesquelles le calme règne.
En parallèle, les élèves effectuent de nombreuses mises en pratique, qu’il s’agisse d’entraînements sportifs dans un hall omnisports de plus de 4 500 m² ou d’exercices tactiques au sein d’un village dédié, ce qui permet d’ancrer les apprentissages dans des situations concrètes.
L’entrée est marquée par les drapeaux luxembourgeois et européen flottant au vent qui rappellent la vocation citoyenne du lieu. C’est dans cet environnement structuré mais également humain que s’organise chaque jour la formation des fonctionnaires-stagiaires.
À la tête de cette institution unique au Grand-Duché, une équipe dirigeante composée de Fabio Santomauro et Mikaël Ferreira Fernandes veillent à la qualité de l’enseignement oscillant entre théorie et pratique. Ce dernier est entré dans la police en 2021, après deux années de formation à Saint-Cyr-au-Mont-d’Or avant d’intégrer la Direction régionale « Capitale ».
Après une année d’expérience sur le terrain, il a choisi de rejoindre l’École, notamment grâce à sa relation de confiance avec le directeur Santomauro en poste depuis 2024.

Mikael Ferreira Fernandes explique vouloir « une approche holistique » en intégrant la théorie dans la pratique.
Une année à l’École, l’autre sur le terrain
La mission première de l’École est «de donner une formation de base aux fonctionnaires-stagiaires», précise le directeur adjoint. Chaque année, «environ 200 stagiaires y sont formés».
Avant d’intégrer cette structure, les candidats doivent réussir une série d’épreuves exigeantes : tests écrits, épreuve sportive, examen psychologique, évaluation en langues et questions de culture générale. Un entretien final établit un classement déterminant l’admission.
Une fois sélectionnés, les élèves entament une première année mêlant cours théoriques et immersion sur le terrain progressive. «La pratique est essentielle, mais elle doit s’appuyer sur des bases théoriques solides», souligne Mikaël Ferreira Fernandes.
Les élèves sont évalués tout au long de l’année et rencontrent la direction lors d’un entretien de synthèse. Ils sont actuellement 182 nouveaux stagiaires (43 femmes et 149 hommes) à avoir débuté leur formation le 2 mai 2025.
La seconde année, appelée Phase d’Initiation Pratique (PIP), plonge les stagiaires presque entièrement dans la réalité du terrain. Ils passent par deux commissariats de roulement, un service de police judiciaire, et participent à des séminaires spécialisés. Au terme de cette année, s’ils réussissent l’ensemble des épreuves, ils prêtent serment et rejoignent leur futur service selon leur classement.
Cette PIP concerne actuellement 188 fonctionnaires-stagiaires entrés en 2024. Le rôle de l’École dépasse aussi ce cadre de base en proposant également des formations continues des policiers assermentés ou des spécialisations.
Dix minutes de terrain, une heure de rédaction
Parmi la douzaine d’enseignements, les C1 première année pourront retrouver les modules de correspondance de service ou de criminalistique, dispensés par Loïk Rehlinger, un des 85 formateurs à l’École.
Concernant la correspondance de service, il insiste sur un aspect souvent ignoré par le grand public : «Le travail rédactionnel n’est pas spectaculaire, mais il est fondamental. Pour dix minutes sur le terrain, il y a parfois une heure de rédaction derrière.»
Son objectif est de transmettre aux stagiaires les bases du travail écrit : quand rédiger, à qui s’adresser, comment formuler une note, et dans quelles limites légales. «Les stagiaires découvrent les documents qu’ils devront produire tout au long de leur carrière. Un écrit engage l’institution. On ne peut pas se permettre d’imprécision ou de formulation ambiguë.»
Le module de criminalistique place, lui, l’accent sur l’importance du premier intervenant. «Les futurs policiers sont souvent les premiers à arriver sur une scène. Ils doivent comprendre que leur comportement peut influencer toute l’enquête», explique Rehlinger.
Il rappelle que le rôle de l’agent ne se résume pas à sécuriser un lieu mais aussi à ne pas faire «une mauvaise manipulation ou un mauvais angle d’observation», qui pourraient «détruire une piste».
Il cite par exemple le cas du GHB : «Je leur enseigne qu’ils n’ont pas besoin de connaître les détails de l’analyse en laboratoire, mais ils doivent savoir que cette substance disparaît du sang après environ six heures. Ils comprennent alors qu’une action rapide peut rendre l’analyse possible.» Pour lui, l’objectif est clair : former des policiers capables d’identifier rapidement ce qui est faisable et dans quel délai.
Une vraie complémentarité
Ces cours, bien qu’ancrés dans la théorie, s’articulent avec des ateliers, des mises en situation et des jeux de rôle qui préparent les stagiaires à la pression du terrain. «On alterne toujours entre théorie et pratique», ajoute Rehlinger.
«Chaque leçon doit déboucher sur une application concrète.» Cette philosophie est pleinement assumée par la direction : «Nous voulons une approche holistique, c’est-à-dire intégrer la théorie dans la pratique.»
Le directeur adjoint résume que «c’est dans cet esprit que nous avons créé ici le Centre de Formation d’Intervention Policière, qui regroupe le Centre national de tir, le Centre national de maîtrise de la violence et le Centre national des tactiques policières».
Cette complémentarité se retrouve aussi dans les infrastructures sportives de l’École, qui dispose d’un hall omnisports de plus de 4 500 m² incluant un dojo, une salle de fitness mais aussi «un petit bijou» selon Mikaël, une grande salle de sport de plus de 1250 m² servant aussi pour les grandes cérémonies.
«On ne fait jamais la même chose»
Pour comprendre pleinement ce que représente la vie à l’École, il faut entendre ceux qui en sont les premiers concernés. Noam Pinheiro Gonçalves, élève de première année, incarne cette nouvelle génération motivée et lucide sur les exigences du métier. À 22 ans, il raconte avoir «toujours voulu travailler dans un métier où l’on aide les gens.
Je pensais devenir enseignant, comme mes parents, mais j’avais envie d’un impact plus direct.» Sa passion pour la moto a également joué un rôle décisif : «L’idée de pouvoir un jour faire de la moto dans le cadre de mon métier m’a motivé. Mon objectif serait d’intégrer l’unité moto.»
Noam avait un temps envisagé l’université, mais l’expérience ne correspondait pas à ses attentes. «On m’a vite expliqué que ce serait beaucoup de travail de bureau, beaucoup d’enquêtes, et moi je voulais être davantage sur le terrain.»
Ce choix, il ne le regrette pas car selon lui, «il n’y a pas de journée type. On commence à 8 heures et on finit à 17 heures, mais on ne fait jamais la même chose. On peut avoir un module quatre fois dans la semaine et d’autres seulement une fois. Les semaines ne se ressemblent jamais. C’est quelque chose que j’apprécie beaucoup.»
Sur le plan pédagogique, Noam reconnaît que la première année est «très théorique». La véritable confrontation au terrain viendra l’année suivante. «Pour l’instant, on apprend surtout à intérioriser la matière. On découvre les procédures, on va au centre de tir, on fait quelques exercices, mais le vrai test sera dehors.»
Parmi ses matières préférées, il cite le sport, très apprécié dans sa classe, mais aussi pour lui le code de la route en lien avec son objectif professionnel, et la procédure pénale : «C’est le mode d’emploi du métier. Sans ça, on ne sait rien faire», plaisante-t-il. «Avec, on comprend ce qu’on peut faire dans une situation donnée et ce qu’on doit éviter. Pour moi, c’est la matière la plus importante.»

Pour Noam Pinheiro Gonçalves, le cours de procédure pénale «est la matière la plus importante.»
La fatigue, parfois, peut rendre certaines matières moins digestes. «Après une matinée de sport intense, se concentrer sur un cours théorique est compliqué. Parfois on enchaîne tellement d’informations que le cerveau sature. Mais ce n’est pas la matière en elle-même qui pose problème, c’est le rythme.»
Malgré cet aspect, retrouvable dans un environnement scolaire classique, il souligne la cohérence globale de la formation : «Au début, on ne voit pas forcément le lien entre deux matières. Mais après quelques mois, tout s’emboîte. Ce sont les rouages d’une machine.»
L’ambiance de classe, selon lui, est saine et solidaire. «Dans la mienne, ça se passe bien. Il y a des affinités, comme partout, mais pas de clans.» Il dit d’ailleurs avec humour ne pas tenir rigueur des pompes infligées à tout un groupe lorsqu’un élève est en retard.
In fine, pour lui, un bon policier doit faire preuve de disponibilité, de discipline et de respect. «L’uniforme, ce n’est pas juste un vêtement. Il représente quelque chose», conclut-il.

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Comme le rappelle Mikaël Ferreira Fernandes, la Police grand-ducale recherche avant tout des personnes motivées, prêtes à s’engager pour la société et «à travailler au plus près du citoyen».
Il insiste sur le caractère humain de la profession, mais aussi sur la richesse de ses perspectives : une administration aux multiples spécialités, où la mobilité interne permet «de ne pas stagner» et «de découvrir encore et toujours de nouveaux domaines».
C’est cette diversité qui rend le métier si stimulant pour «ceux qui souhaitent s’y investir pleinement», explique-t-il.
Pour celles et ceux qui souhaitent rejoindre cette voie de futurs fonctionnaires-stagiaires dits de niveau C1, la campagne d’inscription prend fin le 7 décembre, depuis la plateforme officielle de recrutement.
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