À travers ses créations, Romy Weydert met en avant les oiseaux de notre région. Cette année, elle a choisi de représenter la panure à moustaches sous forme de Péckvillchen.
Romy Weydert s’est prise de passion tardivement pour les oiseaux, mais ils ne la quittent plus depuis 1996. Petits et grands prospèrent à l’abri dans son atelier-boutique de la route de Thionville à Hesperange où elle leur donne vie chaque printemps. Potière et céramiste, elle crée chaque année un nouveau modèle de Péckvillchen destiné à être vendu à l’Emaischen à Luxembourg le lundi de Pâques. Les Péckvillercher sont des petits sifflets en terre cuite faits à la main prenant traditionnellement la forme d’oiseaux. Le plus ancien spécimen retrouvé daterait du XIVe siècle.
La créatrice s’inspire des oiseaux présents au Grand-Duché. Cette année, elle a choisi de représenter la panure à moustaches, petit passereau à la tête bleutée. Le mâle et la femelle. «Les oiseaux mâles sont plus beaux et plus colorés que les femelles. Jusqu’en 2012, je n’ai fait que des mâles. C’est l’oiseau que le public identifie le mieux. Et puis, je me suis dit que faire les femelles me permettrait de vendre quelques oiseaux supplémentaires», explique Romy Weydert, «Les collectionneurs achètent les couples.» Lundi, ils seront à vendre en couple ou à l’unité. Également en vente sur le stand, les couples de traquets motteux et de gorges-bleues à miroir créés pour les deux précédentes éditions de l’Emaischen qui n’ont pas eu lieu en raison de la pandémie de covid, ainsi que 300 Peckvillercher bleu et jaune vendus au profit de l’Ukraine.
Dans l’atelier, une amie de la créatrice est à pied d’œuvre pour peindre les derniers exemplaires. «Il faut appliquer trois couches de chaque couleur avant de pouvoir les cuire, précise-t-elle. Pour un modèle comme celui dédié à l’Ukraine, ce sont 12 différentes couches.» Cela se complique quand les modèles sont plus compliqués, comportent plus de détails et de couleurs. Le passage au four révélera les couleurs et leur brillance.
«Je les choisis pour leurs couleurs»
«Je voulais proposer une collection qu’aucun céramiste ne proposait à l’époque sous forme de Péckvillchen et qui pourrait durer dans le temps», se souvient Romy Weydert. «À côté, je fais des modèles plus simples pour les enfants.» Elle reconnaît avoir toujours aimé les oiseaux, «comme tout le monde», sans s’y être véritablement intéressée jusqu’au lancement de sa collection. La conception de chaque modèle s’étale sur toute une année. Les panures à moustaches sont prêtes depuis le 1er janvier. «Cela devient une routine à force», note la céramiste, qui dit s’inspirer de photographies. «Je n’ai jamais vu en vrai la plupart des espèces que j’ai conçues pour l’Emaischen, regrette-t-elle. Le choix devient de plus en plus restreint. Je les choisis pour leurs couleurs. Au début, j’ai fait les oiseaux les plus connus du public.»
Dans sa vitrine, on trouve également des oiseaux plus exotiques comme un toucan, un perroquet ou un calao. «Il y a trois ans, je suis partie en vacances en Malaisie, où j’ai pu observer un calao. Du coup, en revenant, j’ai décidé d’en réaliser un, et puis je lui ai fait des copains l’année dernière et cette année», sourit l’artiste. «J’ai aussi créé une série sur la basse-cour.» Des canards, des coqs, des poules et des poussins qui ont tous été adoptés. «Il me reste encore certains exemplaires de séries précédentes. Les collectionneurs peuvent les trouver ici à l’atelier», précise-t-elle.
Mésange bleue, bouvreuil pivoine, chardonneret, rossignols ou encore martins-pêcheurs : tous ne sortent pas du même moule. Pour chaque modèle, la céramiste dessine un nouveau prototype, teste les couleurs jusqu’à trouver la bonne. Le prochain modèle, le Péckvillchen 2023, est déjà en projet.
«Je crée la forme du Péckvillchen qui me sert à faire un moule. Le moule est rempli de terre cuite. C’est un travail à la chaîne. La dernière manipulation est le perçage du sifflet», montre la céramiste, photographies à l’appui. Romy Weydert, qui est diplômé des Beaux-Arts, a appris seule à concevoir ces oiseaux siffleurs. «Le son produit dépend du volume : les plus fins ont des tonalités plus aiguës, les plus épatés ont des tons plus graves. Je ne construis pas de vrais instruments de musique. Le Péckvillchen classique ne produit que deux tons.»
Lundi, la vieille ville de Luxembourg va vibrer des trilles de charmants petits oiseaux tous différents. Ceux de Romy participeront au concert.
L’Emaischen, la fête des potiers
Si, étymologiquement, le terme Emaischen rappelle la marche de deux disciples de Jésus-Christ vers Emmaüs, un bourg de Palestine près de Jérusalem, au cours de laquelle le Christ leur apparut le jour de sa résurrection, ce marché des potiers correspond à la célébration de la fête de la guilde des potiers le lundi de Pâques.
Son origine remonte au moins au XIXe siècle. La première trace écrite de l’Emaischen date du 3 avril 1827, date à laquelle il fut décidé de déplacer la foire de l’église Saint-Michel vers la place du Marché-aux-poissons. Cette vieille tradition est interrompue lors de la Première Guerre mondiale, mais le comité Alstad l’a fait renaître en 1938. Depuis 1957, la fête est également célébrée à Nospelt.