Une belle brune, en fuite, aurait volé de l’argent au nez et à la barbe des membres de la Chambre de commerce américaine au Luxembourg, dont la réputation a souffert de cette affaire.
L’affaire avait fait grand bruit dans la presse : Paul Schonenberg, le président de l’American Chamber of Commerce in Luxembourg (AmCham), était accusé d’escroquerie. Avant d’être finalement blanchi par un non-lieu. L’attention des enquêteurs s’est alors portée sur Malek. Elle aurait, entre autres, utilisé une des cartes bancaires de l’AmCham pour ses besoins personnels, détournant près de 92 000 euros sans que personne ne s’aperçoive de rien entre mai 2016 et décembre 2018. Aujourd’hui, la jeune femme a disparu dans la nature après avoir rompu les conditions de son contrôle judiciaire.
Engagée en octobre 2013, Malek devait assister l’office manager avant de reprendre le poste qu’elle occupera jusqu’en décembre 2018. «Elle était consciencieuse et très appréciée», se souvient Paul Schonenberg. «Tout le monde lui faisait confiance.» En apparence, tout allait bien. «En 2016 ou 2017, les auditeurs ont remarqué une perte de liquidité d’une cinquantaine de milliers d’euros», poursuit le président de l’AmCham, qui aurait immédiatement cherché à comprendre où l’argent était passé. «Malek a proposé de mettre en place un système de rapports mensuels. Quand je lui ai demandé des résultats, elle m’a dit qu’elle avait beaucoup de travail, mais qu’elle allait le faire.»
L’année suivante, une cinquantaine de milliers d’euros supplémentaires manquaient à nouveau. Paul Schonenberg décide d’engager une personne extérieure pour mener l’enquête et finalement découvrir que Malek avait pris l’argent. Gentleman, le directeur général propose de passer l’éponge contre des excuses et le remboursement des sommes volées. Malek a préféré porter plainte contre lui pour harcèlement. «Nous avons été bêtes. Elle a reconnu les faits. Nous aurions dû lui faire signer ces aveux», précise le témoin. À l’époque, il ne savait pas encore qu’une partie de l’argent servirait à rembourser des parties civiles après une première condamnation judiciaire remontant à 2010.
Quelques semaines plus tard, Paul Schonenberg est accusé par voie de presse d’avoir détourné les fonds. L’AmCham perd des membres. «Je lui ai donné 25 ans de ma vie. Je ne voulais pas quitter l’AmCham sur une mauvaise note avec ce nuage sombre au-dessus de ma tête. J’ai tout fait pour redorer son nom», explique-t-il à la barre de la 7e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. «Votre seule faute a été d’avoir engagé Malek, mais peut-être avait-elle aussi trafiqué son casier judiciaire», lance le président de la chambre correctionnelle.
Aux policiers, Malek a indiqué avoir été autorisée à utiliser la carte bancaire de l’AmCham ou qu’elle se serait trompée de carte bancaire. «Elle utilisait un duplicata de ma carte bancaire professionnelle pour l’utiliser sous le nom de Malek Schoenberg et se faisait livrer ses achats à l’AmCham, où elle était la seule autorisée à ouvrir le courrier», explique le témoin, qui s’est porté partie civile.
Financer son train de vie
Depuis, l’AmCham «est sortie de l’âge de l’innocence» et a revu sa façon de gérer les comptes pour qu’un tel fait ne se reproduise plus, selon James O’Neil, secrétaire et ancien trésorier. «J’avais l’impression qu’elle était une mère de deux enfants totalement innocente», indique-t-il. Pourtant, lui aussi a été floué par la belle brune. «C’est une sociopathe criminelle professionnelle comme on en voit dans les films. Le renard gardait le poulailler.»
«Elle a tenté de nous détruire avant que nous puissions l’atteindre. Son objectif était de sauver sa peau au mépris de l’AmCham», souligne James O’Neil. Se sentant menacée, Malek aurait notamment tenté de discréditer la personne chargée de retrouver l’argent disparu. Ainsi que Me Penning, avocat de l’AmCham.
L’avocat constate «une énergie criminelle hors pair derrière un visage d’ange». Lui-même en a fait les frais. Malek aurait intercepté les lettres de l’avocat adressées à l’AmCham concernant une saisie sur son salaire pour une partie civile après une première condamnation en justice qui, selon lui, présente des similitudes avec celle-ci. Elle aurait déguisé une certaine somme d’argent sur une fausse facture adressée au compte tiers de Philippe Penning avant de porter plainte contre lui auprès du bâtonnier. «Sa défense est l’attaque» et le mensonge teinté de mauvaise foi.
Le procureur a rappelé que Malek n’avait pas le droit de se servir de la carte bancaire. Il a retenu le vol domestique contre elle, ainsi que le vol qualifié, l’escroquerie et le faux et usage de faux. Il a cependant demandé son acquittement pour l’abus de confiance et le vol à l’aide de fausses clés avant de requérir une peine de 48 mois de prison et une amende ainsi que la confiscation de la part indivisible de Malek dans l’appartement de Steinsel acheté avec son ancien époux. Pour le magistrat, elle a agi «dans le but unique de financer son train de vie».
Le prononcé est fixé au 29 juin.