Carla aurait eu trop peur pour résister à son ex-compagnon et subissait les viols et les violences dont elle l’accuse. Dorivaldo nie. Son avocat évoque un stratagème de sa part.
Carla se sent libre et ne vit plus dans la peur depuis que le père de ses deux enfants est en détention préventive. Pourtant, recroiser son regard sur le banc des prévenus, hier après-midi, intimide toujours la jeune Cap-Verdienne. Malgré leur séparation, Dorivaldo continuait de la terroriser. «C’était un bon père, mais il devenait quelqu’un d’autre quand il avait bu ou consommé de la drogue», a témoigné la jeune femme de 37 ans à la barre de la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. «Ce qu’il lui faisait vivre était devenu presque normal», selon une experte judiciaire qui estime la jeune femme crédible.
Elle accuse le prévenu de 37 ans de l’avoir pénétrée sexuellement contre son gré en usant de menaces et de coups dans la nuit du 21 au 22 mars 2023 ainsi que dans celle du 19 au 20 mai 2023. Il l’aurait également menacée de mort si elle prévenait la police et lui aurait volé 190 euros en utilisant sa carte de crédit. En 2021, le prévenu l’aurait déjà menacée à l’aide d’un couteau. Dorivaldo nie les accusations. Il admet uniquement avoir défoncé la porte de leur chambre à coucher.
Il ressort des différents témoignages que le prévenu n’acceptait pas la séparation et continuait de se comporter comme s’il était encore en couple avec Carla, utilisant ses trois enfants pour avoir accès au domicile de son ancienne compagne. C’était le cas en mai 2023. La police, prévenue par une amie sur demande de la jeune femme, a interrompu l’acte sexuel. Carla a ouvert la porte aux agents, ce qui permet à l’avocat du prévenu, Me Knaff, de mettre en doute le viol. La défense a émis la possibilité d’un stratagème pour obliger Dorivaldo à suivre une cure de désintoxication.
Une chose semble certaine : cette nuit-là, Dorivaldo était hors de lui, selon sa tante et le mari d’une amie de Carla qui avaient passé la nuit au domicile de la victime présumée après y avoir fait la fête la veille. Tous deux évoquent une dispute lors de laquelle le prévenu a défoncé la porte de la chambre à coucher dans laquelle Carla s’était enfermée pour lui échapper. Une fois la tension retombée, «Carla et Dorivaldo ont disparu et comme ils ne faisaient pas de bruit, je ne me suis pas inquiété», explique le témoin qui a reçu des menaces de mort de la part du prévenu quand il a été embarqué par la police.
Le témoin est resté dans l’appartement pour s’occuper des enfants du couple. «Dorivaldo est revenu après son interrogatoire. Il a donné des coups dans la porte et a proféré des menaces de mort à mon encontre», poursuit le témoin, qui a appelé la police à l’aide.
«Suis-je obligéede le dire?»
Carla et Dorivaldo se sont rencontrés en 2012 et ont été un couple jusqu’en «2018-2019», avant que la jeune femme ne le mette à la porte de son domicile et lui retire les clés. «Parfois, il rentrait à 3 ou 4 h du matin. Parfois, il disparaissait pendant plusieurs jours d’affilée. Je ne savais jamais où j’en étais», ajoute-t-elle.«Il prétendait être toujours en couple avec elle et dormir dans le même lit», précise l’enquêtrice. «Je lui demandais de partir, mais il ne partait jamais», ajoute Carla qui semble avoir baissé les bras face à son ancien compagnon, au point de parfois consentir à ses avances.
La jeune femme effacée a évoqué les faits du 20 mai 2023 au matin. «J’ai vu que son visage avait changé. J’ai pris peur, je me suis enfermée dans la chambre», explique-t-elle. «Quand il avait bu ou pris des drogues, il devenait violent. Je me taisais. Il a déjà pris un couteau pour me menacer.» Le tribunal essaie de comprendre d’où vient sa peur du prévenu. «Suis-je obligée de le dire?», demande Carla en essuyant une larme.
À de nombreuses reprises, la police a expulsé Dorivaldo de son domicile, mais à chaque fois, Carla le laissait revenir à nouveau. «J’ai toujours essayé de l’aider. Je sais que j’ai ma part de culpabilité», reconnaît-elle avant d’évoquer les seconds faits. «Il m’a prise par la main après la dispute et m’a entraînée dans une chambre. Je n’ai pas consenti à la relation sexuelle, mais je me suis tue. Je craignais sa réaction et je me suis tue.»
Il ne s’agissait absolument pas de faire la paix sur l’oreiller, selon la jeune femme pleine de pudeur. Les mots ont du mal à sortir de sa bouche. Évoquer les détails des relations non consenties est difficile. Le prévenu aurait ignoré les signes du désaccord de son ancienne compagne.
Le procès se poursuivra le 30 mai prochain avec le témoignage du prévenu, le réquisitoire du parquet et la plaidoirie de la défense.