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[Élections européennes] Fabricio Costa : «La transition écologique sera sociale ou ne sera pas»


«Il faut une Europe plus démocratique qui prenne la protection du climat et l’aspect social au sérieux», estime Fabricio Costa, cotête de liste des verts.

Protection du climat, lutte contre les inégalités et la pauvreté… Pour déi gréng, un Green Deal n’est pas suffisant. Ils militent plutôt pour un Social Green Deal.

Déi Gréng ont connu des revers de taille aux élections communales et législatives en 2023. Leur unique siège occupé au Parlement européen par Tilly Metz est-il menacé lors du scrutin du 9 juin ou au contraire peuvent-ils espérer en obtenir d’autres ?

Le point avec la cotête de liste, Fabricio Costa, 29 ans, européen et écologiste convaincu. Coporte-parole des déi jonk gréng, puis candidat aux communales et législatives, il est aussi attaché parlementaire à la Chambre.

Des échelons gravis rapidement pour ce jeune homme, marié et père d’un nourrisson.

Comment vous êtes-vous retrouvé cotête de liste avec Tilly Metz ?

Fabricio Costa : Je me suis toujours intéressé à la politique européenne. J’ai même fait des études de politique et gouvernance européennes. J’ai l’impression d’avoir eu beaucoup de possibilités dans ma vie grâce à l’UE.

D’ailleurs sans elle, je n’existerais peut-être pas, puisque c’est lors d’un cours de langue au Portugal que ma mère a connu mon père, qui l’a ensuite rejointe au Luxembourg. Comme l’UE m’a beaucoup donné, je m’engage en retour.

Et je pense que le parti voulait avoir un jeune aux côtés de Tilly Metz – qui a fait un excellent travail ces dernières années au Parlement européen – pour montrer qu’on est tournés vers l’avenir, pas seulement dans nos propos, mais aussi dans notre équipe.

Déi Gréng ont mis au cœur de leur campagne les thèmes de la solidarité, du progrès durable mais aussi celui de l’amour. N’avez-vous pas peur de l’image un peu peace and love que ce dernier mot renvoie ?

L’idée, c’est en fait de dire : plus d’amour, moins de haine. Parce qu’on voit une haine de plus en plus prononcée dans la société, sur les réseaux sociaux mais aussi dans le monde politique.

Des partis d’extrême droite sèment un ressentiment dans la population en cherchant des coupables là où il n’y en a pas. Et on le voit même chez certains partis traditionnels au Luxembourg. Tout cela contribue à une polarisation et à un climat négatif. Nous voulons contrer cela.

Donc voter pour déi gréng, c’est « voter contre » ?

(Il sourit) C’est un des arguments, mais ce n’est pas le seul. Dans un tel contexte, c’est important de se démarquer et de pointer du doigt les partis qui essayent de diviser et qui répètent qu’ils travaillent pour le peuple, alors qu’en fait, ils œuvrent contre lui.

Nous devons nous attaquer aux inégalités, terreau du populisme. Certes, l’UE n’a pas toujours pris les bonnes décisions, trop souvent basées seulement sur les questions économiques.

Mais la solution, ce n’est pas de revenir en arrière vers un État national. Il faut une Europe plus démocratique qui prenne au sérieux la protection du climat et l’aspect social.

Dans leur programme, déi gréng disent vouloir passer d’un Pacte vert européen pour préserver les ressources environnementales à un Pacte vert social européen. En quoi est-ce différent ?

En fait, cela ne suffit pas d’avoir un Green Deal, il faut un Social Green Deal. Et ce n’est pas qu’une belle formulation en anglais (il sourit). La transition écologique sera sociale ou ne sera pas.

Il y a une transformation colossale à faire : on a une crise climatique et si on veut rester une économie compétitive, arriver à produire les technologies du futur, une industrie zéro carbone et que les investissements se fassent aussi en Europe… on a besoin du Green Deal.

Mais il fonctionnera à condition que tout le monde en profite. Cette transformation doit tenir compte des plus démunis. Il va donc falloir mobiliser des fonds massifs pour combattre en même temps les inégalités, la pauvreté en Europe et faire en sorte que tout le monde puisse profiter de ces transitions. C’est ça l’idée du Social Green Deal.

Le Green Deal n’a-t-il pas pris du plomb dans l’aile, en avril, après le recul sur certains points, notamment à la suite des revendications des agriculteurs ?

Ce qu’on a vu avec les manifestations des agriculteurs, c’était le produit d’une mauvaise politique faite pendant des dizaines d’années. Mais comment leur expliquer qu’il faut changer, alors qu’ils ont été poussés vers une dépendance et une agriculture intensive ?

Tous les partis conservateurs ou libéraux disent « on va réduire toutes ces réglementations environnementales, parce que c’est la seule façon de faire », mais à moyen et à long terme, c’est fatal. Il faut que les agriculteurs puissent vivre de leur travail à l’avenir.

Je suis assez confiant sur le fait qu’on réussira à la prochaine révision de la PAC à prendre les bonnes idées qui figuraient dans la dernière et à mettre en œuvre un vrai changement de cap.

Selon les sondages, au Luxembourg, les résidents interrogés sur leurs préoccupations évoquent le climat, juste derrière leur pouvoir d’achat. Est-ce un atout pour votre parti ?

Si on n’est pas représentés, le climat et l’environnement risquent d’être écartés

C’est bien de voir qu’effectivement pour la majorité de la population, la résolution de la crise climatique doit être une priorité, d’autant plus que c’est moins médiatisé actuellement.

On a eu ces inondations dernièrement et je pense qu’on devrait parler beaucoup plus du fait que si on ne contre pas la crise climatique, elle peut devenir la norme et provoquer des situations extrêmes. Et on ne veut pas des extrêmes, ni en politique, ni en termes de climat.

Vous parlez aussi dans votre programme de sécurité, mais pas au sens traditionnel.
Normalement, quand on parle de sécurité, on parle de la police, de criminalité. C’est très important, la police doit bien fonctionner, on est d’accord, on avait d’ailleurs recruté des centaines de policiers quand on était au pouvoir.

Après, on parle aussi de la sécurité sociale, c’est bien. Mais la sécurité, c’est aussi être protégé contre les extrêmes au niveau du climat. Et donc, il faut en tenir compte quand on fait de la politique et s’attaquer à la crise climatique, réduire nos émissions, réindustrialiser l’Europe, mais avec justement des technologies neutres pour le climat. Et d’un autre côté, il faut aussi avoir des mesures d’adaptation.

Comment faire ?
Si on parle des inondations, l’UE peut par exemple mettre en place des fonds à l’intention des pays les moins fortunés pour qu’ils investissent dans la prévention de crues, la renaturation des fleuves… Car même si demain on fait la meilleure politique climatique du monde, on sera quand même impacté, on le sait, parce que c’est décalé.

Il y a eu pendant cette mandature, la création d’un Social Climate Fund, une structure pour justement financer des projets, mais il faut mettre encore plus d’argent là-dedans, parce que ce n’est pas du tout suffisant.

Pourquoi déi gréng ont-ils voté contre le « pacte migratoire » ?

Parce qu’à notre avis, ce pacte ne crée pas plus de solidarité entre les États membres, bien au contraire. Ce n’est pas une avancée, il y aura des procédures accélérées aux frontières pour examiner les dossiers des migrants et la création de camps, le temps de cet examen, avec le risque que les droits humains ne soient pas respectés. Et on ne parle pas seulement d’hommes adultes, mais de femmes et d’enfants, il faut se mettre ça dans la tête.

Emmanuel Macron a déclaré que lors de ces élections européennes se jouait l’avenir de l’UE. Vous le pensez aussi ?

À chaque élection, on dit que ce sont les plus importantes. Pourtant, c’est vrai que cette fois, je pense que c’est vraiment important pour des raisons différentes.

D’abord parce qu’on est dans une situation géopolitique difficile avec la guerre en Ukraine et puis économiquement par rapport à la Chine et aux États-Unis.

On a obtenu beaucoup d’avancées au cours des dernières cinq années, l’UE est un acquis qu’il faut défendre chaque jour à nouveau, surtout par rapport aux nationalistes.

Parmi les candidats sur votre liste, François Bausch est très populaire. Bien que Tilly Metz et vous soyez têtes de liste, ira-t-il siéger s’il remporte le plus de voix ?

C’est l’électeur ou l’électrice qui décident. Celui qui arrivera en premier aura la responsabilité d’accepter le mandat. Si je suis élu, je le ferai avec beaucoup de plaisir, mais si ce n’est pas le cas, tant pis.

Le plus important, à mon avis, c’est qu’il continue d’y avoir vraiment une force verte forte au niveau européen. Et qu’au Luxembourg, on garde au moins un siège au Parlement, parce qu’on voit bien que si on n’est pas représentés, le climat et l’environnement risquent d’être écartés rapidement.

Un commentaire

  1. Il vaut mieux dire: la tansition écologique ne sera pas.
    C’est la plus grande arnaque de tous les temps.