Yuriko Backes veut donner un coup d’accélérateur à l’égalité entre femmes et hommes en s’appuyant sur la collecte et l’exploitation de données inédites au Luxembourg.
Trois grandes priorités, six objectifs et 55 mesures incluant 17 ministères : la nouvelle mouture du Plan d’action national pour une égalité entre les femmes et les hommes – adoptée début mars par le conseil de gouvernement – a été présentée hier par la ministre Yuriko Backes, qui arborait fièrement un T-shirt à l’effigie de Rosie la riveteuse pour l’occasion.
En tant que principe fondamental inscrit dans la Constitution, l’égalité des genres devrait être l’affaire de tous. Or, il suffisait de jeter un œil autour de la table ce lundi pour constater que tous les journalistes envoyés pour couvrir l’événement étaient des femmes.
Preuve que le sujet continue d’être perçu comme exclusivement féminin, alors que c’est l’ensemble de la société qui doit être mobilisée : «L’égalité des genres doit être vécue partout, par chacun et chacune, chaque jour», a d’emblée rappelé la ministre.
Une priorité transversale
À commencer par les pouvoirs publics. Yuriko Backes a donc associé ses collègues du gouvernement à ce plan égalité révisé, chacun d’entre-eux étant chargé d’implémenter des mesures concrètes dans son propre champ de compétences.
Près de la moitié des 109 actions répertoriées au plan incomberont ainsi à d’autres portefeuilles. Et ça n’est pas qu’une image, puisque c’est sur leurs propres deniers qu’elles seront financées.
De quoi réduire la charge supportée par le MEGA, lui qui affiche le budget le plus rikiki du gouvernement : seulement 31,6 millions d’euros pour 2025 – soit 0,1% du budget total de l’État – dont plus de 25 millions destinés aux organismes conventionnés.
On peut aussi y voir un pas vers plus de transversalité, même si on est loin d’avoir un budget de l’État sensible au genre, comme c’est le cas au Canada, en Autriche, en Espagne, en Islande ou en Suède.

Les données tiendront compte d’une approche intersectionnelle afin de rendre visibles les personnes ciblées par plusieurs formes de discriminations. (Photo : Fabrizio Pizzolante)
Une revendication des féministes
Pour agir efficacement, la ministre l’a martelé, elle a besoin de s’appuyer sur des statistiques denses : «C’est crucial. On veut une politique basée sur des preuves, permettant à la fois de suivre la situation via des indicateurs et de nous adapter si besoin».
D’où l’avancée majeure introduite avec ce plan : la collecte et l’exploitation de données inédites pour le Luxembourg, répondant à une revendication de longue date des militantes féministes.
Pour cela, de nouveaux indicateurs seront ajoutés à la grille d’analyse de l’Observatoire de l’égalité entre les genres, dans les domaines de la culture, des finances, du sport et des violences basées sur le genre.
L’approche intersectionnelle ajoutée
Des chiffres qui seront désormais ventilés par sexe et recueillis selon une approche intersectionnelle afin de rendre enfin visibles les personnes ciblées par plusieurs formes de discriminations.
Des facteurs socio-économiques, comme le revenu, l’accès à l’éducation, aux soins, l’emploi ou les responsabilités au sein du ménage, seront également passés au crible.
Le plan prévoit un suivi précis de la représentation des femmes au sein des conseils d’administration des entreprises avec participation de l’État, tout comme la publication de chiffres clés sur les salaires, postes de cadres et temps partiels au sein de la fonction publique.
Sport, culture, IA, défense
Autre nouveauté, une stratégie spécifique sera construite autour de l’égalité dans le sport, comprenant des offres de formations sur ce thème dédiées aux coachs, dirigeants de clubs et fédérations. Du côté de la culture, la représentation paritaire au sein des conseils d’administration des établissements publics sera scrutée.
Au volet intelligence artificielle, le plan ambitionne de s’attaquer aux biais de genre, notamment en intégrant le MEGA aux discussions menées sur la nouvelle stratégie IA nationale.
Et pour démystifier ce secteur et offrir davantage d’opportunités aux femmes, qui y sont largement sous-représentées, des sessions d’accompagnement pour les salariées en reconversion dans l’IT seront proposées.
Dans la défense, autre casquette de Yuriko Backes, une représentation inclusive sera assurée lors des entretiens d’embauche, l’usage d’un langage neutre en genre sera privilégié, avec l’objectif d’augmenter en parallèle le taux de féminisation au sein de la Direction de la défense.
Deux plans attendus en complément
Un premier cap, en attendant la soumission avant les congés d’été de deux autres plans d’action du MEGA complémentaires à celui-ci : l’un consacré à la lutte contre les discriminations LGBTIQ+, et l’autre, très attendu, contre la violence fondée sur le genre.