Depuis 100 ans, l’Union des Bons Amis anime le quartier de Burange, à Dudelange. La très populaire Birenger Kirmes n’est qu’une des activités très variées de l’association. Rétrospective.
Une ruelle, une petite place, un hall agricole, transformé pour l’occasion en salle des fêtes, quelques manèges, des buvettes, une baraque à frites et un barbecue. Voici le cadre d’une des plus anciennes – et entretemps plus populaires – kermesses de quartier au Luxembourg. Depuis 1939, les gens affluent par centaines pour assister à la Birenger Kirmes, organisée la semaine de l’Ascension (donc ces jeudi, samedi et dimanche) par l’Union des Bons Amis de Burange. «La kermesse est très appréciée, à l’intérieur de notre village et loin au-delà. Dès la première édition, l’ambiance était à son comble», évoque fièrement la présidente, Sylvie Peter.
Burange ne se résume donc pas aux panneaux autoroutiers dirigeant les automobilistes vers l’entrée nord de Dudelange ou à l’arrêt ferroviaire à son nom. C’est bien la Birenger Kirmes qui permet de découvrir le caractère chaleureux de ce quartier rural. Et le mérite revient en bonne partie aux fondateurs de l’Union des Bons Amis, créée le 1er avril 1925. «
Quatre Burangeois partis en vadrouille ont fait halte au Café des mille colonnes à Luxembourg. Autour d’un verre, ils ont eu l’idée de créer une association pour rassembler les gens de leur quartier, pour forger l’unité et encourager la convivialité», retrace la présidente. Grande particularité : au départ, l’Union des Bons Amis était uniquement ouverte aux hommes célibataires : «Les femmes n’étaient pas admises. Après s’être mariés, les célibataires étaient exclus de l’association.»
La Birenger Kirmes est née en 1936
Les membres fondateurs étaient Jean Dennewald, devenu premier président, Mich Bourkel, Jemp Marso et Jean Reis. Des pièces de théâtre – une jouée pour Carnaval et une à la Saint-Sylvestre, suivie d’un bal – ainsi que des voyages figuraient parmi les premières activités de la jeune association. Le choix de créer un club pour célibataires a été pleinement assumé : en 1935, lors de la cavalcade de Dudelange, les membres se sont présentés sur un char, tous déguisés en femmes.
En 1939, le Luxembourg fête les 100 ans de son indépendance. Pour célébrer cette date historique, l’Union des Bons Amis décide d’organiser «quelque chose de spécial». La Birenger Kirmes, alors appelée «Erofferskirmes», est née.
«Le jour de l’Ascension, le bourgmestre Théid Thiel est conduit en calèche depuis la place de l’Hôtel-de-ville à Burange. Chaleureusement accueilli, il se voit offrir du jambon et le gâteau de kermesse ainsi qu’un verre d’eau-de-vie. Le folklore et la nostalgie marquent cette journée», explique Sylvie Peter.
Une chansonnette est même écrite par Jean-Pierre Hoffmann, le secrétaire communal de l’époque. La musique est composée par Jäng Eiffes. Cet hymne est toujours entonné aujourd’hui.
Suit un chapitre plus sombre. «La Deuxième Guerre mondiale rend Burange muet. Après des temps difficiles, ils étaient encore dix célibataires à relancer l’Union des Bons Amis en 1945. En 1946 a lieu la première kermesse d’après-guerre. Un grand cortège s’élance en direction de Burange avec à sa tête le bourgmestre, Jean Fohrmann», expose Sylvie Peter.
Seuls les hommes célibataires étaient admis
Un tournant majeur dans l’histoire de l’association se produit en 1961. «Le club est réorganisé. Il n’est désormais plus réservé aux seuls hommes célibataires et les femmes sont enfin admises», se réjouit la présidente actuelle. Également dans les années 60, la Birenger Kirmes gagne sans cesse en popularité.
Des bals, d’abord organisés sous un chapiteau, attirent des centaines de personnes. L’entrée est fixée à 20 francs luxembourgeois, soit 0,5 euro. «En 1961, on a compté 809 participants payants le samedi soir, et 534 le dimanche, d’abord pour un thé dansant, puis en soirée pour un nouveau bal», relate Sylvie Peter.
«À l’époque, le quartier de Burange comptait encore plusieurs cafés. Les tenanciers se sont battus pour pouvoir servir leurs bières lors de ces bals», raconte le bourgmestre Dan Biancalana.
En 1978, l’Union des Bons Amis se voit mettre à disposition un hall agricole de la famille Wegener, toujours utilisé pour la Birenger Kirmes. «En 1988 est une première fois engagé le célèbre Fausti (NDLR : chanteur luxembourgeois réputé). Plus de 800 personnes s’aventurent sur la piste de danse spécialement aménagée à l’aide de carrelages», reprend la présidente. Aujourd’hui, le hall accueille le samedi de la kermesse une soirée luxembourgeoise et un quiz. Le jeudi de l’Ascension y est célébré une messe, avant le début des festivités dans l’après-midi.
«Une merveilleuse et unique histoire»
Arrivé en 1987, le «Birenger Zichelchen», un petit train à moteur, avec des wagons colorés à l’effigie de figures de bande dessinée, marquera des générations d’enfants, montés à bord pour faire la ronde de la kermesse. Tous les ans, la locomotive doit se frayer un chemin parmi les nuées de visiteurs, particulièrement le jeudi après-midi.
«Nous possédons une merveilleuse et unique histoire, désormais centenaire. Nous honorons avec respect et gratitude tous nos prédécesseurs et mettons avec beaucoup de joie et de confiance le cap sur les 100 prochaines années. On est une association dynamique qui joue un rôle important dans la vie culturelle et sociale de notre quartier», souligne Sylvie Peter.
La présidente met aussi en avant le «caractère familial» de son association : «Des jeunes et des moins jeunes se rassemblent. Des familles sont représentées depuis quatre générations. Travailler, fêter et voyager ensemble nous soude et renforce notre unité.»
L’Union des Bons Amis compte à peine 84 membres. Mais son rayonnement est bien plus important. Il suffit de passer ce jeudi, samedi ou dimanche à Burange. «Chez nous Burangeois, on ne s’ennuie jamais», promet Sylvie Peter. La fête ne fait que commencer.
L’Union des Bons Amis compte dans ses rangs pas mal de bricoleurs. Pour preuve, en 1991, l’association acquiert un terrain dans le quartier (rue du Nord) pour y faire sortir de terre un hall destiné à servir de siège à l’association, mais aussi de local pour les activités telles qu’un bal de Carnaval pour enfants, ou une soirée «Après ski».
À partir d’une structure en acier, les membres prennent eux-mêmes en main la construction de toutes les autres composantes du hall, achevée au bout d’un chantier de quatre ans.
Bien plus connu et populaire est le «Birenger Zichelchen», ce petit train à moteur et aux wagons colorés arborant des figures de bande-dessinée. Pendant l’hiver 1986-1987, une poignée de passionnés de mécanique construisent la locomotive. Elle restera en service jusqu’en 2024, avant d’être remplacée par une autre machine, une nouvelle fois construite en régie propre. Depuis un an, le «Birenger Zichelchen n° 2» (voir photo) circule à l’occasion de la kermesse, mais aussi d’autres événements locaux, tels que le cortège de la Saint-Nicolas à Dudelange.