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Du Luxembourg à l’espace : quand les ados touchent «presque» les étoiles


Lors d'une parabole, l’appareil monte rapidement, puis coupe les moteurs afin d’entrer en chute libre contrôlée, créant ainsi près de 22 secondes d'apesanteur. (Photo LSA)

Finalistes du concours «Astronaut for a day», une quinzaine de jeunes luxembourgeois ont vécu un vol en apesanteur ce mercredi. Une expérience riche en émotions et porteuse pour le secteur spatial national.

Vêtus de combinaisons bleues d’astronaute et affichant un large sourire, une ribambelle d’adolescents sortent d’un drôle d’avion qui vient de se poser sur le tarmac du Findel, mercredi peu avant 13 h.

Arrivés devant le salon d’honneur de l’aéroport, les jeunes sont accueillis par une trentaine de personnes qui les mitraillent de photos, applaudissent et poussent même quelques cris. Comme s’ils revenaient d’une mission spatiale de plusieurs années.

C’est justement le but, ou presque, d’embarquer à bord de cet Airbus A310 qui arbore un logo inconnu pour les non-initiés : Air Zero G. Il s’agit là d’un avion venu de Bordeaux en France, qui permet de réaliser des vols paraboliques avec zéro gravité et simule des conditions d’apesanteur. Comme dans l’espace.

En ce jour, cette expérience unique a été offerte à 14 Luxembourgeois, 13 Autrichiens et 10 Estoniens âgés entre 14 et 19 ans, et finalistes du concours «Astronaut for a day». Organisée au Grand-Duché tous les deux ans depuis 2023 par la Luxembourg Space Agency (LSA), l’opération se décline aussi en Autriche et en Estonie, partenaires de cette édition.

En gravité martienne, lunaire, puis zéro

Sorti de l’avion et du bain de foule, Gilles, 16 ans, a encore les yeux qui brillent au moment de raconter ce qu’il vient de vivre. «En montant dans l’avion, je n’avais pas peur, j’étais serein mais excité» commence ce lycéen scolarisé à l’Athénée.

«Puis, une fois que l’on avait décollé, ils annonçaient chaque parabole dix minutes avant et là, dans le compte à rebours, l’adrénaline montait.» Les paraboles, ce sont ces manœuvres durant lesquelles l’appareil monte rapidement, puis coupe les moteurs afin d’entrer en chute libre contrôlée, créant ainsi près de 22 secondes d’apesanteur.

14 Luxembourgeois, 13 Autrichiens et 10 Estoniens âgés entre 14 et 19 ans ont participé à l’expérience. (Photo : Hervé Montaigu)

Grâce à cela, le jeune équipage a expérimenté une gravité martienne (environ 38 % de celle de la Terre), «ce qui veut dire que l’on pouvait sauter très haut et facilement faire des pompes ou des tractions».

De quoi se préparer aux deux passages en gravité lunaire, six fois moindre que sur Terre, avant d’atteindre le graal : douze paraboles en gravité zéro. «À ce moment-là, on volait, littéralement» rigole encore l’adolescent en racontant les acrobaties qu’il a réalisées en apesanteur.

«C’était une expérience indescriptible et tellement amusante, témoigne également Frode, même si je me suis senti un peu mal à la fin.» Ce jeune Estonien fait partie des légers malades durant le vol qui, pour l’extrême majorité, s’est très bien passé.

«À la fin, on a demandé et on a crié pour avoir une parabole de plus et on l’a eue» raconte Gilles. Malgré l’euphorie, le jeune Luxembourgeois admet que «si l’on en avait fait trois ou quatre de plus, j’aurais pu être malade».

«Donner une chance aux jeunes d’ici»

Pour la LSA, l’organisation de ce deuxième vol parabolique est donc couronnée de succès et promet de beaux souvenirs à ses participants. Le matin même, Juliette Pertuy, responsable de la communication de l’agence spatiale, a d’ailleurs reçu «un mail très émouvant de la part d’une candidate d’il y a deux ans».

Cette dernière lui faisait part du caractère inoubliable de son vol à zéro gravité et des portes qui lui ont été ouvertes dans le spatial grâce à «Astronaut for a day». «Quand je lis tout cela, je sais pourquoi on le fait.»

Outre le vol parabolique, la LSA offre également aux 14 finalistes luxembourgeois un rôle d’ambassadeurs durant deux ans. «Afin de promouvoir le spatial auprès des jeunes, on s’était dit qu’envoyer des gens aux cheveux gris n’était pas le meilleur moyen pour que le message passe» confie Marc Serres, CEO de l’agence.

Au sol, les participants ont été accueillis par le Premier ministre, Luc Frieden, et Marc Serres, CEO de la Luxembourg Space Agency. (Photo : Hervé Montaigu)

Pour ce faire, les jeunes ont notamment été formés à la promotion lors d’une «Space academy» l’été dernier afin de participer à des conférences ou organiser des initiatives personnelles, à l’école ou dans leurs communautés.

«L’objectif est d’attirer leur attention pour qu’un jour, au Luxembourg, il n’y ait plus aucun jeune qui soit ignorant sur les opportunités dans le secteur spatial.» Le CEO déplore en effet la méconnaissance globale du milieu.

«Ou alors, on ne voit que le métier d’astronaute qui est assez exclusif tandis qu’il y a plein d’autres métiers à côté.» À terme, certains participants pourraient alors se diriger vers des études dédiées au spatial et intégrer l’agence nationale. «On ne développe pas le pôle de talents qu’à travers l’attractivité du pays, il faut aussi donner une chance aux jeunes d’ici» lance, enthousiaste, Marc Serres.

Sur les pas de Tom Cruise

De passage au Grand-Duché, l’Airbus A310 Zero G est la propriété de Novespace, une filiale du Centre national d’études spatiales (CNES) en France. Née en 1986, cette société basée à l’aéroport de Bordeaux-Mérignac a pour «vocation de promouvoir la micropesanteur en tant qu’outil d’expérimentation scientifique».

Les vols en zéro gravité n’étant auparavant réalisés qu’aux États-Unis ou en Russie, Novespace a été fondée afin d’offrir cette opportunité aux États européens.

Sur la trentaine de vols paraboliques réalisés chaque année, la majorité sont effectués pour diverses agences spatiales européennes. Autrement, il s’agit de «vols d’inspiration», tels que pour «Astronaut for a day», ou de sessions ouvertes au public, moyennant 7 500 euros par passager. Pour l’anecdote, la scène en apesanteur dans le film La Momie avec Tom Cruise a été tournée dans cet avion.