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Du chocolat équitable pour Pâques ?


D’après l’ONG Fairtrade Lëtzebuerg, le cacao équitable a connu une croissance extraordinaire entre 2021 et 2022. (Photo : archives lq/hervé montaigu)

Si le chocolat reste incontournable à Pâques, sa production de masse dissimule des réalités plus préoccupantes. Face à ces enjeux, l’ONG Fairtrade Lëtzebuerg promeut depuis plusieurs années une alternative plus éthique et responsable.

Que serait Pâques sans chocolat? Chaque année, durant cette période, des milliers de tonnes de cacao sont produites puis transformées pour permettre aux consommateurs de manger des lapins, poules, petits œufs et autres douceurs chocolatées. Mais derrière ces plaisirs sucrés se cachent des réalités préoccupantes. Déforestation, utilisation excessive des pesticides, recours au travail des enfants… C’est pour lutter contre ces phénomènes que l’ONG Fairtrade Lëtzebuerg a décidé de développer une alternative plus responsable : le chocolat équitable.

«Le cacao du commerce équitable provient exclusivement de coopératives de communautés villageoises, précise Jean-Louis Zeien, le président de Fairtrade Lëtzebuerg. Grâce à ce système, on leur garantit un prix minimum, mais aussi la prime fairtrade (…).» De quoi transformer des vies : «Je me souviens que, lors d’une visite dans une coopérative de cacao au Ghana, une paysanne âgée m’avait confié que, grâce au commerce équitable, elle allait, enfin, pouvoir subvenir à ses besoins et devenir quelqu’un».

Au-delà de l’aspect économique, la commercialisation de chocolats équitables a des vertus sociales : elle permet également de lutter contre le travail des enfants, un véritable fléau dans l’industrie du cacao en Côte d’Ivoire. «Environ, 1,6 million d’enfants travaillent dans ce secteur. Dans les coopératives équitables, c’est évidemment interdit. La coopérative se doit, d’ailleurs, de financer les frais de scolarité, les fournitures scolaires et les uniformes afin que les enfants puissent aller sans problème à l’école», explique Jean-Louis Zeien.

Le Luxembourg, marché phare du commerce équitable

Avant que le chocolat équitable du Grand-Duché arrive jusqu’aux supermarchés ou chez les artisans luxembourgeois, il faut, en premier lieu, que le cacao soit récolté en Afrique ou en Amérique latine. Il est ensuite transformé dans des usines en Europe. «J’ai déjà visité une fabrique de chocolat en Afrique. Cela existe, mais c’est plutôt une exception», note le président de Fairtrade Lëtzebuerg.

Si se procurer des produits issus du commerce équitable reste très simple au Luxembourg, leur prix, plus élevé, peut être un frein pour les consommateurs. «Malgré une certaine augmentation des prix, le cacao s’est développé considérablement ces dernières années. Cela montre que bon nombre de consommateurs sont prêts à opter pour un chocolat équitable», observe Jean-Louis Zeien.

Et les chiffres le confirment. D’après l’ONG Fairtrade Lëtzebuerg, la part de marché du chocolat équitable se situe entre 8 et 10 % dans le pays. «Nous avons observé une croissance extraordinaire entre 2021 et 2022, de près de 137 %. Puis il y a eu une légère baisse de 13 %, ce qui est absolument compréhensible après ce développement spectaculaire. Outre les marques étrangères, de nombreux acteurs luxembourgeois ont contribué à cette forte progression.»

L’ONG Fairtrade Lëtzebuerg travaille avec plusieurs coopératives agricoles en Afrique. Photo : fairtrade lëtzebuerg

Si le chocolat a la cote, d’autres produits issus du commerce équitable connaissent eux aussi un développement important au Luxembourg. La banane équitable reste, par exemple, la denrée phare de ce secteur. Par ailleurs, un fruit sur trois est vendu sous le label équitable. «Il y a plus de 5 000 références de produits enregistrées sur le marché au Luxembourg. Certains produits comme le café se développent très bien, tout comme certains produits non alimentaires, comme les roses. Avec 79 euros de dépenses moyennes par habitant en produits Fairtrade, le Luxembourg est l’un des marchés phares du commerce équitable. Ce chiffre est, par ailleurs, beaucoup plus élevé qu’en Autriche, Belgique, France ou Allemagne», indique Jean-Louis Zeien.

Comment peut-on expliquer ces différences avec les autres pays européens? «Les salaires, plus élevés au Luxembourg, peuvent jouer. La Suisse est le leader mondial du commerce équitable et on sait que le pouvoir d’achat est important dans ce pays. Pour autant, cela ne veut pas dire que les consommateurs de produits équitables font tous partie des couches aisées, bien au contraire», conclut le président de l’ONG Fairtrade Lëtzebuerg.

Le prix des chocolats s’envole

Cette année, les prix des chocolats de Pâques sont en forte hausse. Chez nos voisins français, par exemple, selon l’association UFC-Que Choisir, le prix de ces friandises a augmenté de 14  % en moyenne en un an. Une hausse liée au bond spectaculaire du prix du cacao. Il a été multiplié par cinq entre 2023 et mi-2024. Les mauvaises récoltes en Afrique de l’Ouest dues à une météo difficile et les plantations vieillissantes ont nourri ce phénomène.