Fatigue et alcool au volant sont un mélange dangereux. L’histoire de Domingos en est l’illustration parfaite. L’automobiliste est un miraculé. De même que le camionneur qu’il a embouti.
Domingos est invalide à vie à la suite d’un accident de la circulation qu’il a lui-même causé. Le quinquagénaire rentrait d’un séjour dans sa famille au Portugal quand il a percuté de plein fouet un semi-remorque sur une route nationale en France le 26 août 2020. La justice française s’est désaisie de l’affaire au profit de la justice luxembourgeoise. Il est reproché au prévenu d’avoir administré des coups et blessures de manière involontaire au conducteur du poids lourd et d’avoir circulé en état d’ébriété.
«Je m’étais endormi», a expliqué celui qui s’est passé de l’assistance d’un avocat. «À l’époque, je faisais le voyage d’une traite. J’ai commencé à me sentir fatigué, alors j’ai voulu quitter l’autoroute pour rejoindre la nationale.» Domingos voulait trouver un endroit où se reposer. Au lieu de cela, sa voiture s’est écrasée contre la cabine du camion à une vitesse très élevée. «Un témoin a affirmé que vous l’auriez dépassé à plus de 140 kilomètres par heure à un kilomètre environ du lieu de l’accident», a précisé la présidente de la 9e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg.
Outre la fatigue et la vitesse, l’alcool était également en jeu. Au moment des faits, Domingos présentait un taux de 1,88 gramme d’alcool par litre de sang. «Ma maman m’avait donné du vin à ramener au Luxembourg. En chemin, j’ai eu une soif incroyable», a indiqué, goguenard, le prévenu qui aurait bu l’équivalent de deux verres pour étancher sa soif. «Il était costaud le vin!», a commenté la juge, intriguée. «Vous auriez été plus avisé d’emporter une bouteille d’eau.»
«Vous auriez mieux fait de vous arrêter à une station-service pour boire quelque chose et vous reposer», lui a conseillé le représentant du ministère public. «À présent, j’en fais une. Je ne fais plus le trajet en une seule fois», a juré le prévenu qui encourt une peine de 3 mois de prison avec sursis pour récidive légale, ainsi qu’une amende et deux interdictions de conduire de 24 et 19 mois pour avoir causé des coups et blessures involontaires et avoir conduit en état d’ivresse.
Les magistrats espèrent que la peine requise fera prendre conscience au prévenu du danger que représente l’alcool au volant pour soi et pour autrui. Le chauffeur du camion a été très lourdement blessé. Quant à Domingos, la juge a estimé que «c’est un miracle que vous vous teniez face à nous».
Récidive légale
«Je me sentais bien quand j’ai pris le volant», a affirmé Maria, 48 ans, à la barre hier après-midi. «Toutes les personnes qui se retrouvent face à nous se sentent toujours bien. C’est tout le problème», lui a répondu la présidente. L’audience d’hier était entièrement consacrée aux délits en matière de circulation.
Le 13 février dernier, une collègue lui aurait demandé de lui apporter la clé du domicile d’un des clients où elles vont faire des ménages. «Je venais de prendre mes médicaments, mais par peur de perdre mon emploi, j’ai pris la route», explique Maria. «Ma collègue fêtait son anniversaire. Elle a insisté pour que je prenne un verre. J’ai consommé deux verres de champagne.»
Un témoin qui l’a croisée sur la route du retour a signalé sa manière de conduire dangereuse à la police qui a constaté une alcoolémie de 2,16 milligrammes d’alcool par litre d’air expiré. En août 2023 déjà, Maria avait été arrêtée par les policiers après avoir pris le volant en état d’ébriété et se trouve donc en état de récidive légale.
Le procureur a réclamé une amende appropriée à son encontre, une interdiction de conduire de 22 mois ainsi que la confiscation obligatoire de la voiture. «Je n’accepte pas l’excuse des médicaments. Aucun médicament n’a d’influence sur un taux d’alcool dans le sang. Un taux qui n’est pas compatible avec deux verres de champagne. C’est un mensonge, vous aviez bu plus», a-t-il noté avant de la prévenir que s’il devait y avoir une prochaine fois, il devrait requérir une peine de prison à son encontre.
«Ma cliente s’est sentie piégée par la demande de sa collègue de lui apporter la clé», a justifié son avocate qui a appelé à la clémence du tribunal. Sur quoi la juge a informé Maria qu’«un employeur ne pourra jamais vous obliger à commettre quelque chose d’illégal».
Les prononcés sont fixés au 20 février.