Depuis un peu plus d’une semaine, Johny héberge chez lui deux Syriens, Alaa et Abdulkareem dans «une belle atmosphère».
Vendredi, midi. Alaa, 24 ans, Abdulkareem, 27 ans, et Johny, 39 ans, s’attablent. Au menu : moutabal (mousse à base d’aubergines), pois chiches, omelette, fèves, naan… Et tout le monde mange avec les mains, « comme chez nous, en Syrie », disent Alaa et Abdulkareem. Et pourtant, le repas se déroule dans la maison de Johny à Differdange.
Et pour cause. Depuis un peu plus d’une semaine, Abdulkareem et Alaa vivent chez Johny et son fils de 9 ans Mika. Leur rencontre s’est faite « simplement et naturellement », affirment les trois hommes.
«On forme une petite communauté»
« Depuis le début de la crise des migrants, j’ai eu envie d’aider, mais je ne savais pas trop comment , raconte Johny. J’ai pensé un moment aller en Grèce. Un jour, je suis tombé sur Facebook sur l’initiative Oppent Haus/Open Home. Mi-décembre, je suis allé à une réunion d’information. J’y ai rencontré Alaa et Abdulkareem. Et le feeling est tout de suite passé entre nous. » « En dix minutes, tout était réglé. Un vraiment moment de joie pour nous », complètent Alla et Abdulkareem, arrivés au Grand-Duché respectivement il y a six et dix mois, et tous deux passés par Luxexpo, le Monopol et les chalets de Michelau.
Après leur rencontre, les trois hommes ne perdent pas de temps. Ils effectuent les démarches administratives ensemble, rangent et aménagent les deux chambres libres de Johny. Et depuis huit jours, Alaa et Abdulkareem vivent sous le toit du Differdangeois. « J’avais de la place, pour moi, c’est normal de les accueillir , confie en tout simplicité Johny. J’ai déjà hébergé cinq sans-abri chez moi. Quelques jours avant leur arrivée, un musicien roumain est resté ici pendant un mois. Je pense que c’est naturel d’accueillir les gens dans le besoin. Ma devise est : le mien est le tien. »
Et comment se passe la cohabitation ? « Dans une belle et parfaite atmosphère », répond Johny. On forme une petite communauté. » Les trois hommes partagent les repas, chacun fait découvrir la culture culinaire, les traditions et les coutumes de l’autre. « On vit ensemble depuis huit jours seulement, mais on a l’impression de se connaître depuis plusieurs années », indiquent les trois hommes. On discute beaucoup, on se raconte nos vies et on apprend énormément les uns des autres. » Johny poursuit : « J’apprends quantité de choses avec eux, mon fils aussi. »
«Vivre ici va accélérer notre intégration»
« C’est exceptionnel ce que fait Johny pour nous , estiment Alaa et Abdulkareem. Il nous a offert une chambre, un lieu à nous et du calme. On retrouve une certaine indépendance. Et vivre chez un Luxembourgeois va sûrement nous permettre de nous intégrer plus facilement et plus vite. »
Les deux Syriens suivent des cours de français à l’Institut national des langues de Mersch trois fois par semaine. « Il faut absolument qu’on parle parfaitement le français pour nous intégrer », ont conscience les deux demandeurs de protection internationale. Et des projets, ils en ont. Alaa espère pouvoir reprendre, au Grand-Duché, les études en informatique, qu’il avait commencées dans sa ville natale de Raqqa. De son côté, Abdulkareem a fait beaucoup de petits boulots en Syrie et au Koweït (employé dans une boulangerie, un call center…) Aujourd’hui, il « espère monter son petit commerce ici ». De quoi ? Pour le moment, il garde son idée pour lui.
En attendant, Abdulkareem et Alaa prennent leurs marques dans leur nouvelle vie à Differdange. En parallèle de leurs cours de langues et leurs démarches administratives, les deux Syriens souhaitent devenir bénévoles pour aider les autres réfugiés dans les foyers d’accueil au Luxembourg et continuer de rencontrer des résidents. Vendredi après-midi, ils ont d’ailleurs accompagné Johny, qui animait un atelier de tricot à la Maison de la transition à Esch-sur-Alzette.
Et combien de temps resteront-ils chez Johny ? C’est le propriétaire des lieux qui répond : « On n’a pas fixé de date. Ici, ils ont un CDI. »
Guillaume Chassaing