Une affaire de double de clé, de détention arbitraire et de fenêtres sans poignée a occupé la 7e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg hier après-midi.
Costume trois pièces noir, chemise blanche, cravate et cheveux gominés. Axel avait mis toutes les chances de son côté pour se présenter face à la 7e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, hier.
Un soin que n’a pas manqué de remarquer le président. Le jeune homme de 23 ans est, entre autres, suspecté d’avoir retenu contre son gré Océane, la maman de son enfant, au domicile partagé avec ses parents, ainsi que de vol et de tentative de vol dans un immeuble. Le procureur a demandé la jonction des deux affaires et requis une peine de 18 mois de prison à son encontre. Il ne s’est pas opposé à un sursis simple ou probatoire.
«La situation ne me semblait pas normale. J’avais l’impression qu’elle était enfermée», témoigne l’assistante sociale qui suivait Océane et son nourrisson. Le 14 septembre 2020, la jeune fille mineure la contacte pour lui demander de l’aider à s’échapper du logement dans lequel elle dit être enfermée. L’assistante sociale prévient la police qui «délivre» la victime présumée qui «n’avait pas de papiers, pas d’argent et pas l’autorité parentale sur l’enfant».
Le prévenu et ses parents n’auraient pas jugé utile de faire un double des clés du logement pour la jeune fille qui aurait passé la majorité de ses journées enfermée pendant près d’un an. «Il ne le faisait pas exprès. Il ne voulait pas m’enfermer», témoigne Océane, hésitante.
«Quand ses parents étaient là, ils m’ouvraient. Je ne leur demandais pas souvent. Je n’avais pas spécialement envie de sortir.» «Personne n’a eu l’idée d’aller faire un double des clés?», note le président. «Non», répond-elle d’une toute petite voix.
Une lettre de rétractation
«Elle a toujours pu sortir. Personne ne le lui a jamais interdit», affirme au contraire Axel. «Quand elle avait besoin de sortir, je lui donnais la clé avant de partir travailler le matin.» «S’il y avait eu un incendie, elle aurait cramé à l’intérieur avec l’enfant ?», s’emporte le président qui, comme le procureur, ne comprend pas pourquoi le jeune homme ne voulait pas confier les clés à son ancienne compagne. Axel lui-même ne parvenant pas à l’expliquer.
La jeune femme avait précisé que les fenêtres de l’appartement donnant sur le rez-de-chaussée n’avaient pas de poignée et que la fenêtre la plus accessible avait été condamnée avec des planches en bois. «La poignée était mobile», ajoute-t-elle.
Une seule poignée ouvrait toutes les fenêtres. Pourtant, elle n’aurait jamais songé à s’échapper par l’une d’entre elles. «Des leurres», note le représentant du parquet qui estime qu’une mère n’aurait jamais risqué une sortie par l’une d’entre elles avec un nourrisson.
Le prévenu est également accusé de violences, mais le parquet se rapporte à prudence du tribunal. La veille de la libération d’Océane, le 13 septembre 2020, Axel l’avait griffée avec la clé lors d’une dispute «pour une tromperie», dit-elle. En 2019, il l’avait déjà giflée.
Le jeune homme reconnaît les disputes, mais pas la détention arbitraire de la mère de son enfant. Il n’y avait pas de double de la clé et «elle ne voulait pas se lever le matin pour récupérer la clé quand il partait travailler», soulève son avocat qui produit une lettre de rétractation de la jeune femme datant de 2021 dans laquelle elle reconnaît ne pas avoir été détenue contre son gré le 14 septembre 2020.
Le procureur a toutefois estimé que la détention et la privation de liberté pouvaient prendre différentes formes qui ne se limitaient pas uniquement à l’enfermement.
Il fumait à l’extérieur
Axel ne serait pas plus l’auteur des infractions de vol et de tentative de vol dans un immeuble de Soleuvre le 24 août 2020, argumente son avocate. Pascal, un témoin, l’avait pourtant observé sortir en courant d’un immeuble à Soleuvre avant de se diriger vers un immeuble voisin avec un autre homme pour finalement entrer dans les caves et en forcer les portes à coups de pied. La police les avait pris à leur sortie de l’immeuble. Le butin, resté dans la cave, était soigneusement rangé dans des sacs et prêt à emporter.
Le prévenu se défend en indiquant ne jamais être entré dans l’immeuble et avoir tenté de raisonner son ancien beau-père de ne pas commettre les vols. «Je me trouvais à l’extérieur à fumer un joint», précise Axel. Le témoin affirme pourtant n’avoir vu personne devant l’immeuble au moment de la commission des faits.
L’avocate du prévenu insiste : son complice présumé a dit aux policiers avoir agi seul et rien n’a été trouvé – ni empreintes, ni outils ou éléments du butin – attestant de son implication dans les faits.
Elle a plaidé l’acquittement du jeune homme de l’ensemble des faits qui lui sont reprochés et subsidiairement un sursis probatoire et plus subsidiairement encore une amende ou du travail d’intérêt général.
Le prononcé est fixé au 22 décembre.