Accueil | A la Une | Des salariés malades, mais qui vont travailler

Des salariés malades, mais qui vont travailler


Selon cette étude, 85 % des salariés qui ont été malades au moins une fois dans l’année se sont rendus au moins une fois malades au travail.

D’après la CSL, au Luxembourg, les salariés travaillent en moyenne 12 jours par an en se sentant malades, contre 5 jours d’absence.

Le présentéisme est de plus en plus répandu au Luxembourg. C’est en tout cas ce qu’affirme la Chambre des salariés du Luxembourg (CSL) dans son dernier numéro d’«Econews». Dans cette publication, elle se penche sur le phénomène du présentéisme, soit le fait de travailler tout en étant malade.

Défini comme la présence au travail de salariés souffrant de problèmes de santé physique ou psychologique qui nécessiteraient une absence, le présentéisme est un comportement «souvent ignoré, mais aujourd’hui très largement présent». En effet, d’après une enquête de la CSL sur la qualité du travail datant de 2024, les salariés ont déclaré s’être présentés en moyenne 12 jours au travail en se sentant malades au cours des douze derniers mois, contre seulement cinq jours de maladie. En d’autres termes, 69 % d’entre eux ont travaillé durant des jours où ils se sentaient malades. Toujours selon cette étude, 85 % des salariés qui ont été malades au moins une fois dans l’année se sont rendus au moins une fois malades au travail. Parmi les épisodes de maladie, 49 % mènent à une présence totale, 26 % à une absence totale et 25 % à une présence partielle.

Des secteurs plus touchés

Loin d’être anecdotique, le présentéisme s’avère être la partie immergée d’un problème plus vaste lié à la santé et au bien-être des travailleurs. Et ce phénomène dépend aussi des secteurs d’activité et des professions. En effet, les personnes exerçant une profession dite élémentaire, comme aide-ménager ou manœuvre, ont déclaré sur les douze derniers mois «s’être sentis malades 34 jours». Une différence notable avec les professions intellectuelles et scientifiques (14 jours), et les dirigeants, cadres de direction ou gérants (9 jours). «Les différences sont un peu moins prononcées par secteur d’activité que par profession», note la CSL. Concernant le nombre de jours d’absence pour maladie, il varie entre 3,3 jours pour les dirigeants, cadres de direction et gérants et 7,7 jours pour les professions élémentaires.

«Un autre constat intéressant est que les professions élémentaires ainsi que les conducteurs d’installations et de machines et les ouvriers de l’assemblage enregistrent à la fois le plus grand nombre de jours d’absence pour cause de maladie et le plus grand nombre de jours de présence au travail en se sentant malades. À l’inverse, les dirigeants, cadres de direction et gérants ainsi que les professions intellectuelles et scientifiques sont les deux catégories affichant les nombres de jours d’absence mais aussi de présence en cas de maladie les plus faibles», explique la Chambre des salariés.

Du côté des professions, le taux le plus élevé de présentéisme est observé chez les cuisiniers, coiffeurs, gardiens, commerçants et vendeurs. En moyenne, 80 % d’entre eux travaillent en se sentant malades. En bas de la liste, on trouve les personnes occupant un emploi administratif (64 %) ou celles issues d’une profession intellectuelle et scientifique (65 %). Enfin, on retrouve un taux élevé de présentéisme dans les secteurs d’activité de la blanchisserie-teinturerie, de la coiffure, des soins de beauté, des services funéraires et des activités des organisations associatives. Ce dernier secteur se démarque, par ailleurs, avec un taux de présentéisme atteignant les 87 %.

Des conséquences sur la santé et la productivité

Mais alors pourquoi certains salariés travaillent-ils en étant malades ? D’après les résultats de l’enquête de la CSL, ces motivations peuvent être liées à plusieurs facteurs, comme la culture de l’entreprise, la pression des collègues ou de la hiérarchie, la peur de perdre son emploi ou de voir sa carrière freinée ou encore les difficultés financières liées à une absence.

Mais derrière ces constats, les conséquences ne sont pas à négliger. D’une part pour la santé des salariés : «Le présentéisme ne permet pas aux employés malades de récupérer pleinement, ce qui peut aussi engendrer des absences prolongées à plus long terme. Le fait de négliger les problèmes de santé actuels peut mener à des affections plus sérieuses par la suite. La propagation de la maladie aux autres salariés pourrait aussi entraîner une augmentation substantielle des congés maladie au sein de l’entreprise», pointe la CSL. Des répercussions qui peuvent également se faire sentir du côté de la productivité au travail. Les salariés malades ne récupèrent pas totalement, ce qui peut entraîner des absences prolongées et une propagation des maladies.

Face à ce constat, la CSL propose des pistes de réflexion et des mesures qui pourraient favoriser une meilleure prise en compte de l’état de santé des salariés. Elle met notamment l’accent sur l’importance d’améliorer les conditions de travail, de promouvoir une culture de la santé au sein des entreprises et de tenir compte de l’avis des salariés et de leurs représentants.