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Des preuves insuffisantes pour attester l’envergure du trafic de stupéfiants supposé


Le trio est accusé d’avoir contribué au trafic. (photo Sophie Kieffer)

Le parquet est persuadé que les prévenus ont vendu bien plus de stupéfiants que l’enquête n’a pu le prouver. Les indices existeraient en ce sens, mais pas les preuves formelles.

La 7e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg a eu à débattre d’une «affaire extrêmement frustrante» pour le parquet mardi après-midi. Trois jeunes hommes, dont deux frères jumeaux de 27 ans, sont suspectés de s’être livrés à un trafic de stupéfiants dans des quantités conséquentes. Malheureusement, l’enquête de police – entre ouï-dire et indices probants – n’a pas permis de déterminer les quantités exactes. Les trois prévenus se sont engouffrés dans cette faille.

Un des trois jeunes hommes a affirmé aux policiers que les jumeaux avaient acheté jusqu’à 5 kilogrammes de marijuana toutes les deux semaines ainsi qu’au moins un kilogramme de cocaïne entre septembre 2019 et fin avril 2021. «Nous n’avons jamais vendu de telles quantités», disent les deux frères d’une seule voix.

«Les quantités retenues à notre encontre ne sont pas bonnes. Nous n’avons vendu que quelques grammes. 20, 25… Nous n’avons jamais vendu des kilogrammes», jure un des jumeaux. «Et je n’ai jamais vu le kilogramme de cocaïne que nous aurions acheté pour 34 000 euros.»

Les transactions, pense l’enquêteur, auraient eu lieu à l’hôtel Ibis de Livange. Les jumeaux y avaient été pris avec 2,6 kilogrammes de marijuana, 250 grammes de cocaïne, plus de 6 000 euros en liquide et plusieurs téléphones portables. «Ils sont allés souvent à l’hôtel», note la représentante du parquet. «Ils n’ont pas eu de chance. Les deux fois où ils ont été arrêtés, c’était avec des quantités importantes.» Se sachant recherchés, ils avaient notamment fui la police à Arlon en voiture. Leurs compagnes avaient été arrêtées et 700 grammes de marijuana avaient été saisis dans le véhicule. D’où le reproche d’importation et d’exportation de stupéfiants également retenu contre eux.

D’autres indices plaideraient pour un trafic d’une autre envergure que celle consentie par les frères. Des témoignages de proches notamment et le train de vie dont ils faisaient montre sur les réseaux sociaux, «alors qu’ils ne travaillaient pas», a constaté la représentante du ministère public.

«Cinq ans, du temps perdu»

Le troisième larron est lui aussi suspecté d’avoir acheté et vendu des stupéfiants ainsi que d’en avoir importé en Allemagne, où il vivait à l’époque des faits. «Avec mes amis, nous mettions notre argent en commun pour acheter de plus grandes quantités à un prix plus avantageux», explique le trentenaire, ancien cocaïnomane. «Je n’ai jamais vendu de drogue. Il n’y a jamais eu d’argent en jeu. Je consommais des joints avec mes amis, chacun apportait quelque chose à son tour.»

Il finançait sa consommation avec ses économies et n’avait pas acheté tant que cela, justifie le jeune homme suspecté d’avoir été un des vendeurs des deux frères. «Nous n’avons pas pu déterminer s’il se livrait à un réel trafic», a consenti l’enquêteur. De son propre aveu, il achetait sa cocaïne dans le quartier de la Gare à Luxembourg et la consommait en Allemagne.

La représentante du parquet exclut finalement l’association de malfaiteurs à l’encontre du trio, mais retient la vente, la détention, l’importation et le blanchiment. Elle requiert des peines de 5 ans de prison ferme contre les deux frères et de 24 mois de prison ferme contre le troisième prévenu. Les trois prévenus n’ont, selon elle, plus droit à un sursis étant donné «leurs antécédents spécifiques». Leurs avocats, Mes Lanoue et Hellinckx, prétendent le contraire et soulèvent le dépassement du délai raisonnable.

«Il n’y a aucun élément au dossier pour prouver l’envergure du trafic, à part les déclarations du troisième prévenu, qui sont à prendre avec des pincettes. Et il ne les a pas réitérées aujourd’hui», note Me Hellinckx, qui défend un des jumeaux. Selon lui, si la police n’a rien trouvé contre les deux frères, «c’est parce qu’il n’y avait rien». Le tribunal doit juger sur des faits, pas sur des suppositions, selon l’avocat qui demande au tribunal de prononcer des peines inférieures à celles requises et de se déclarer incompétent pour juger la course poursuite à Arlon. «Il n’y a pas de connexité avec le Luxembourg.» «Cinq ans, c’est du temps perdu», a finalement assuré son client.

Le prononcé est fixé au 28 novembre.