Accueil | A la Une | Des lycéens à Auschwitz : «C’est un voyage très émouvant»

Des lycéens à Auschwitz : «C’est un voyage très émouvant»


Des élèves et leur professeur à Auschwitz devant la maquette du camp de concentration, le samedi 1er novembre. (Photo : pierre matgé/capsule)

Des jeunes de douze lycées luxembourgeois, de l’Uni et d’un lycée de Trèves reviennent tout juste d’un voyage de mémoire en Pologne à Auschwitz et Birkenau.

Partis du Luxembourg jeudi pour un voyage qui assurément forme la jeunesse, comme l’aurait dit Montaigne, 120 jeunes ont vécu un séjour dont ils se souviendront toute leur vie. Du 30 octobre au 4 novembre, ils sont allés visiter, en Pologne, les camps d’Auschwitz I et de Birkenau. Un événement organisé comme chaque année par l’ASBL Témoins de la 2e génération.

Avant leur départ, tous ces jeunes savaient plus ou moins ce qu’il s’était passé à Auschwitz par le biais des documentaires ou des manuels d’histoire. Mais se trouver sur les lieux et «voir les crématoires, les valises des déportés, les expositions, la réalité… c’est très authentique, très impressionnant», explique Marc Schoentgen. L’ancien professeur d’histoire et vice-président de Témoins de la 2e génération a accompagné le groupe, cette année encore : «Le premier voyage, c’était sur l’initiative de notre président actuel, en 1997. Notre association a été fondée en 2001», rappelle-t-il.

Un programme bien rôdé

Le programme est bien rodé : d’abord une visite de quatre heures des expositions du musée d’Auschwitz I qui retracent le crime de la Shoah en détail, avec des guides locaux. Le lendemain, une visite de «ce qui reste encore de la fabrique de la mort», le camp d’extermination de Birkenau. «Le site, avec ses ruines, les barricades encore présentes, décrit l’ancien professeur d’histoire, est un vaste lieu de mémoire portant partout les traces de ce génocide.»

Dans certains endroits, comme la pièce où sont entreposés des cheveux humains, le crématoire ou les chambres à gaz, les photos sont interdites. «Pour le reste, souligne Marc Schoentgen, les jeunes peuvent prendre bien sûr des clichés et ils le font. C’est naturel, même si au début, on se disait qu’il fallait limiter l’usage du smartphone. Maintenant, je trouve bien qu’ils prennent des photos et qu’ils les montrent à d’autres.» D’ailleurs, pour la première fois, l’association a ouvert un compte Instagram pour documenter le séjour.

Des lycéens très sensibles

Au cours du voyage, les élèves et leurs enseignants ont aussi participé à des ateliers, des activités en lien avec le génocide et la question des droits de l’homme, «pour approfondir et permettre aux jeunes de mieux comprendre ce qu’ils ont vu le matin», précise Marc Schoentgen. D’autres moments ont été réservés à des échanges en petits groupes pour qu’ils puissent poser leurs questions et verbaliser leur ressenti. «C’est un voyage très émouvant, qui n’est pas toujours très facile», glisse-t-il.

Depuis la disparition des survivants qui participaient au séjour jusqu’en 2019, l’association fait intervenir des témoins de la deuxième génération, née après 1945. Cette année, Julien Joseph et Henri Juda, deux résidents luxembourgeois, ont raconté l’histoire de leur famille qui a connu les camps, mais aussi les silences et les récits entendus dans leur enfance… «Les jeunes apprécient beaucoup le lien direct entre la personne et cette histoire-là», souligne Marc Schoentgen, qui ajoute : «Ils sont très sensibles à tout ce qu’ils voient, ainsi qu’aux messages et récits de ces deux messieurs.»

Émotion, réflexion et responsabilisation

L’histoire peut d’ailleurs résonner encore plus particulièrement auprès de certains lycéens, ajoute encore le vice-président. Du fait de la grande diversité des élèves, «il y a des jeunes participants qui vivent une histoire d’émigration ou ont une histoire familiale liée à la guerre. D’autres encore, qu’ils soient noirs, musulmans, femmes ou homosexuels ont vécu des situations de discriminations», constate-t-il. Mais contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’actualité et le contexte international – la guerre à Gaza ou la montée des partis d’extrême droite dans le monde – s’invitent rarement dans les conversations, même si pour les organisateurs, aucune question n’est malvenue.

Que retiennent les jeunes ce voyage pédagogique? D’abord l’émotion, puis une réflexion et une responsabilisation, assure Marc Schoentgen, citant les textes, les poèmes et prises de paroles émis pour clôturer le séjour : «On ne veut pas de racisme, on ne veut pas de discrimination, on ne veut pas de guerre… pourquoi le monde n’a-t-il rien appris ?» Pour l’association, «l’idée, c’est que les jeunes qui étaient avec nous ce week-end deviennent de nouveau les témoins des témoins».

Une forte demande

À peine rentrés de ce voyage d’études, les organisateurs commencent déjà à préparer celui de 2026. Dans l’idéal, pour contenter toutes les demandes, il faudrait prévoir trois voyages de 150 participants par an. Témoins de la 2e génération planche dessus, mais a évidemment besoin de plus de financements et de bénévoles. Si vous êtes intéressé à l’idée de participer au prochain séjour, il faut impérativement être âgé d’au moins 17 ans et avoir été choisi par ses professeurs. Le coût du séjour revient à 250 euros par élève.