Le Quotidien Indépendant Luxembourgeois
Les débats dans le procès des homicides de Leudelange et du Fräiheetsbam de 2016 se sont achevés mercredi avec le réquisitoire. La défense avait plaidé l’acquittement au bénéfice du doute. Mais pour le parquet, Lee K. est bien l’auteur des deux tirs mortels dans la tête. Contre le second prévenu Alden S., 22 ans de prison ont été requis.
«Sans l’ombre d’un doute, je vais vous prouver que les deux hommes qui se trouvent aujourd’hui sur le banc des prévenus sont les bons.» Le procureur d’État adjoint David Lentz n’a pas longtemps tourné autour du pot mercredi après-midi. Ce qu’il avait déjà fait entrevoir au cours des débats, il l’a répété. Il en est convaincu : «Christopher O. et Florentina E. n’étaient que le début d’une série!» En dénonçant son fils à la police, la mère de Lee K. a évité qu’il y ait encore d’autres victimes.
Tout au long de l’instruction, les prévenus Lee K. (36 ans) et Alden S. (24 ans) se sont renvoyé la balle. Tous deux affirmant avoir été au volant de la Mercedes A170 le soir du 9 novembre 2016 lorsque le dealer a été tué d’une balle dans la tête. «Les traces ADN sont plus que parlantes. Elles n’admettent qu’une seule conclusion», a coupé court à leurs histoires David Lentz. Lui aussi avait préparé son histoire. Une histoire en cinq actes, comme il l’a annoncé au début de son réquisitoire.
Le mobile dans cette affaire, selon lui, c’est clairement le vol. Le meurtre aurait été commis pour faciliter le vol ou pour en assurer l’impunité. Une fois déposé dans la forêt entre Leudelange et Schléiwenhaff, le cadavre du dealer nigérian aurait été littéralement dépouillé. Portable, portefeuille avec ses 50 euros, passeport… tout avait disparu! Le duo n’avait pas hésité à revenir ensuite sur les lieux pour extirper de son gosier une boule de cocaïne de 5 g. «Si cela ne démontre pas leur sang-froid!»
À l’époque, Lee K. était criblé de dettes. La situation d’Alden S. n’était pas à ce point catastrophique, mais il n’avait pas de réserves financières non plus, constate le procureur adjoint. En tout cas, lorsque Lee K. et Alden S. rencontrent le dealer nigérian, tous deux n’ont pas un rond sur eux. Difficile donc de croire à un quelconque deal. Surtout quand sur la banquette arrière une sacoche remplie d’armes les accompagne. À cela s’ajoute le message rédigé par Lee K. et retrouvé sur son portable : «T’as envie d’aller tuer quelqu’un…?» «Ce n’était pas un mot en l’air! Trois heures plus tard, le dealer était mort», soulève David Lentz.
«Alden S. était au volant, Lee K. a tiré»
Pour savoir qui a tiré, le procureur adjoint se rabat notamment sur les traces de sang sur le jean porté par Lee K. et les traces ADN retrouvées sur le pistolet Walther P99. La crosse comportait celles de Lee K. et des deux victimes. Mais pas celles d’Alden S. «Il n’y a qu’une seule solution : Alden S. était au volant. Et Lee K. a tiré.»
Mais l’histoire selon laquelle Alden S. se serait laissé entraîner par Lee K. et qu’il aurait eu le malheur d’être simple témoin du coup de feu, il n’y croit pas. Le dealer a été tué pratiquement à bout portant. Dans ces circonstances, il fallait que «l’arme du crime soit prête à l’emploi» au moment où ils ont embarqué la victime sur le siège passager, en déduit le procureur adjoint.
Le comportement du duo après les faits conforte le parquet dans l’opinion qu’il s’agissait bien d’une «action concertée» : «Aucun stress post-traumatique du côté d’Alden S. Il garde le contact avec Lee K. Pas de dénonciation non plus à la police. Tout était bel et bien planifié!»
La prostituée dont le corps sans vie a été retrouvé le 14 novembre 2016 sur le parking du Fräiheetsbam avait également été tuée dans la Mercedes A170 sur le siège passager… d’une balle dans la tête. Même scénario que pour le dealer. «Après le premier mort, le passage à l’acte est plus facile», analyse David Lentz. Elle avait perdu la vie pour 7 euros… Mais pour ce fait, il y a juste un homme dans la ligne de mire du parquet : Lee K. Pour rappel, Alden S. a bénéficié d’un non-lieu.
Ici également, les traces ADN en disent long, selon le parquet. «Sur le paquet de cigarettes Lucky Strike, on a retrouvé un mélange des ADN de Lee K. et de la victime. Tout comme sur une canette de Red Bull souillée de sang.» Mais il y aurait aussi les images de la vidéosurveillance et les aveux faits à une connaissance…
«Les deux prévenus ont prononcé et exécuté la peine de mort pour les deux victimes. À la chambre criminelle d’immortaliser les histoires de Christopher O. et Florentina E. et de rendre un jugement approprié», a conclu le procureur adjoint. Contre Lee K. il réclamera au final la réclusion à vie. Vu l’absence de remords et de repentir, il s’oppose à tout aménagement de peine. Contre Alden S., sans l’aide duquel le dealer n’aurait pu être tué, il demande 22 ans de réclusion.
Prononcé le 8 janvier
«Si vous êtes d’avis que c’est moi, je ne peux rien faire, mais accordez-moi au moins des circonstances atténuantes», a lâché Lee K. aux juges avant qu’ils ne prennent l’affaire en délibéré. La 13e chambre criminelle rendra son jugement le 8 janvier.
Fabienne Armborst
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