[Cyclisme] Tour de France : Jonas Vingegaard enterre vivant Tadej Pogacar

Le maillot jaune danois a écrasé la concurrence et surtout son rival slovène, mardi sur le contre-la-montre de Combloux où le Danois a fait un grand pas vers un deuxième succès consécutif dans le Tour de France. Avec désormais près de deux minutes d’avance sur Tadej Pogacar, Jonas Vingegaard peut voir venir.

Pouvait-il y avoir un décor plus grandiose pour la grande explication des chefs ? La chaîne du mont Blanc ouverte en grand, un soleil assassin avec 36 degrés pour faire monter et monter encore l’atmosphère lourde, pesante, insupportable. On allait savoir. Le duel des deux inséparables de ce Tour de France allait bien avoir lieu. Avec des données claires. Tadej Pogacar, avec ses dix secondes de retard sur Jonas Vingegaard, n’avait pas le choix des armes pour espérer prendre le maillot jaune sur le dos du Danois. Simplement aller plus vite que lui.

Mais le rêve est passé si vite pour le Slovène bien vite repoussé à dix, quinze, puis vingt-cinq secondes, quarante et enfin une minute et trente-huit secondes sur la ligne.

Vers un deuxième succès consécutif pour le danois

Tadej Pogacar n’était pas moche, mais peu à peu, il lâchait du lest et avait presque perdu le coup de pédale aérien qui est le sien depuis le début de ce Tour de France. Le Tour de France était en train de basculer sans guère plus d’espoir pour le Slovène, teint livide, yeux plantés sur le sommet de la vacharde côte de Domancy, l’air résigné. Il n’allait pas si mal puisqu’il terminera deuxième, mais le coureur danois évoluait dans une autre dimension.

Jonas Vingegaard avait certes décidé de ne pas changer de vélo avant d’emprunter le plus dur de la pente de ce chrono en montagne, mais bien avant que le Slovène échange de monture, l’écart avait déjà enflé dans des proportions rédhibitoires. Sans accident sur la suite de ce Tour de France enthousiasmant, le coureur danois file donc vers son deuxième succès consécutif. Car sur la ligne d’arrivée où le public restait presque sans voix en voyant apparaître la silhouette du maillot jaune, les écarts avaient pris des proportions énormes, pas attendues en tout cas.

La différence, énorme, d’une minute et trente-huit secondes sur cette 16^e étape, ne laisse donc plus guère de doute sur la suite. L’équipe Jumbo-Visma, qui a déversé des tonnes de compétence dans la gestion de sa course d’équipe depuis le début de ce Tour de France, va prendre un malin plaisir à cadenasser à double tour une course que les coureurs UAE-Emirates de Tadej Pogacar, pour l’honneur, pour le fun, continueront d’animer, dès aujourd’hui sur le terrible col de la Loze, ou même avant, sait-on jamais.

Vu les écarts réalisés par Jonas Vingegaard, vu la facilité que le Danois avait pour emmener son vélo de chrono au plus fort de la pente, il est presque illusoire de croire à un quelconque retournement de situation.

Les deux grands rivaux de ce Tour de France, virevoltant et très enthousiasmant, restaient jusqu’ici liés à la colle glu. C’est désormais un petit gouffre qui sépare les deux hommes. Très sportivement, Tadej Pogacar est allé féliciter le vainqueur dans l’aire d’arrivée. Mais le Slovène, qui s’était dans un premier temps surpris de revenir si bien après sa blessure du printemps, était sans doute détruit, même s’il n’en montrait rien.

La claque administrée par Jonas Vingegaard est aussi grande que celle que Tadej Pogacar avait d’ailleurs donnée au maillot jaune d’alors, Primoz Roglic, dans le chrono de la Planche-des-Belles-Filles, avant-dernière étape du Tour 2020, balayant le maillot jaune, repoussé alors à 1’56“.

«Ce n’était pas ma meilleure journée»

Mardi, «Pogi» a ressenti cet inconfortable sentiment de se retrouver fessé en public. On le voyait abasourdi par la réalité des chiffres bruis. Mais, grand seigneur, il gardait un discours digne.  «Oui, je n’ai rien pu faire de plus, je suis allé à fond, ce n’était pas ma meilleure journée, ce n’est pas encore fini. Mais là, il m’a pris beaucoup de temps, je vais essayer de revenir. Oui, j’ai changé de vélo, mais cela ne fait pas de grosses différences. Quoi qu’il en soit, je ne pouvais pas aller plus vite. Je ne m’attendais pas à ça, ça peut arriver et je me classe deuxième de l’étape, c’est quand même bien…», répétait-il.

Le maillot jaune, qui avait bien conscience d’avoir assommé le Tour, se gardait bien d’en rajouter. «Cela allait si vite que j’ai perdu mes données de watts, je ne voyais plus mes watts», expliquera à son tour le maillot jaune. Lequel restera évidemment sur ses gardes sur les deux dernières étapes de montagne que le peloton a encore à se farcir, aujourd’hui sur le col de Loze à Courchevel et samedi dans les Vosges avec l’arrivée au Markstein. Mais Tadej Pogacar lui-même y croit-il encore vraiment ?