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[Critique Cinéma] «Jurassic World : Rebirth» : le re-retour des dinosaures 


Retrouvez notre critique cinéma de la semaine.

Comme le rappelle le film, il n’y a pas photo entre les dinosaures et les hommes : tandis que les uns, avant leur disparition, ont occupé la Terre pendant 160 millions d’années, les autres y sont seulement depuis 300 000 ans… Derrière le rapport de force inégal, un constat évident : les grosses bêtes ont la peau dure, ce qui s’observe aussi au cinéma avec, à l’écran, ce septième volet d’une saga imaginée par Steven Spielberg en 1993. Pour mémoire, le cinéaste américain, grand raconteur d’histoires, s’inspirait des romans de Michael Crichton pour ressusciter toute une bande de monstres aux dents longues et à l’appétit féroce, avec ce qu’il fallait d’esprit bon enfant, de frissons et d’héroïsme pour faire un carton au box-office. Preuve en est : plus de trente ans après, ils sont toujours là.

Personne n’est assez fou pour aller où nous allons!

Toutefois, après deux premiers volets maîtrisés, l’effet de surprise retombait. Pire, après une trilogie cantonnée au «parc» d’attractions, la franchise s’ouvrait au «monde» et se perdait en chemin. Sacrifiés sur l’autel de la machine à fric créant à la chaîne des blockbusters sans malice, les carnivores prenaient des allures gargantuesques et s’installaient en ville. Au milieu de ce cirque, ni Chris Pratt ni Bryce Dallas Howard ne pouvaient sauver les apparences, ni le sort d’une série condamnée à finir à l’état de fossile. Après la catastrophe de Jurassic World : Dominion (2022), il était donc devenu nécessaire de se réinventer, de mettre un coup d’éponge sur le tableau pour mieux repartir. D’où aujourd’hui, cette promesse d’une «renaissance». Faut-il y croire ou aura-t-on le droit à un énième recyclage?

Cette volonté de renouveau s’affiche dès le casting, avec comme appât Scarlett Johansson, alias Zora Bennett, mercenaire façon Lara Croft qui ne crache pas sur les millions que lui offre Martin Krebs (Rupert Friend), figure d’une industrie pharmaceutique en col blanc qui prévoit de réduire les maladies cardiaques grâce au sang de dinosaures. Seul hic : en raison du réchauffement climatique, ils sont quasiment tous morts, en dehors de ceux vivant dans l’île de Saint-Hubert, bout de terre perdu dans l’océan Atlantique et ancien théâtre d’expérimentions génétiques pas très claires. Mieux : le prélèvement doit se faire en 48 heures chrono et en toute discrétion sur trois mastodontes. De quoi nécessiter l’appui d’une équipe surentraînée conduite par le baroudeur Duncan Kincaid (Mahershala Ali) et aidée des connaissances paléontologiques du Dr Henry Loomis (Jonathan Bailey).

Un air de déjà-vu, dites-vous? Normal, car Jurassic World : Rebirth ne change pas grand-chose à la recette de départ, malgré quelques intentions louables : d’abord confier l’opération à Gareth Edwards, réalisateur déjà fan de grosses bêtes (Monsters, Godzilla) et de films d’aventure à gros budgets (Rogue One, The Creator), candidat idéal pour remettre la franchise sur de bons rails. Ensuite convier à l’écriture le scénariste David Koepp, à l’origine des deux premiers opus de la série. Enfin, prévoir une seconde histoire, parallèlement à la mission suicide («Personne n’est assez fou pour aller où nous allons!», lâche ainsi Mahershala Ali), avec une famille qui se hasarde dans des eaux bien trop dangereuses – particulièrement quand vous êtes la cible d’un Mosasaurus, poisson aussi grand qu’un paquebot. Tout ce beau monde, en mode survie, va se trouver dans la touffeur de la jungle équatoriale, habitée par de sacrées bestioles dont un mégamonstre au doux nom de Distortus Rex, à l’étrange parenté avec l’alien spatial de Ridley Scott.

Plutôt que d’oser, une fois pour toutes, de revoir les codes de la franchise, voire explorer la piste d’un spin-off ou d’un préquel, ce septième épisode bégaye, une nouvelle fois, clonant encore et encore les mêmes sujets, les mêmes scènes comme celles de l’émerveillement exagéré devant un troupeau d’herbivores (sans danger, donc), ou à l’inverse, du cache-cache improvisé derrière les étagères d’une supérette (les tiroirs d’une cuisine marche également), histoire d’éviter de finir en sandwich pour T-Rex. Cet effet miroir fonctionne aussi avec les personnages : le scientifique réfléchi pour qui la crise environnementale est à prendre au sérieux, l’homme d’affaires (bien coiffé) sans scrupules, et au milieu, une ancienne militaire qui hésite à faire parler sa fibre humaniste ou sa cupidité, et des dinosaures toujours plus grands et effrayants. Mentionnons alors la phrase fondatrice de la saga, lâchée par le Pr Ian Malcolm : «Dieu crée les dinosaures. Dieu détruit les dinosaures. Dieu crée l’homme. L’homme détruit Dieu. L’homme crée les dinosaures». À cela rajoutons : et Hollywood en profite.

 

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