La députée déi gréng et ancienne ministre de l’Environnement Joëlle Welfring déplore un accord affaibli et alerte sur l’influence des lobbies à la COP 30 de Belém.
«C’était censé être la COP de la vérité, de la mise en œuvre», commence la députée déi gréng Joëlle Welfring. «On se retrouve au final avec quelque chose de plat et pas vraiment de grandes avancées.» La COP 30, qui s’est tenue à Belém au Brésil du 10 au 21 novembre, devait être un moment clé pour la lutte contre le changement climatique et il n’en a rien été, selon l’ancienne ministre de l’Environnement (2022-2023).
Pour la première fois, le Luxembourg disposait d’un pavillon national, quittant l’espace partagé jusque-là avec la Belgique, les Pays-Bas et la BEI. Joëlle Welfring n’était pas présente sur place, mais elle a assisté à «la dernière ligne droite», avec «quelques séances de clôture».
La députée écologiste explique avoir vécue une «vraie dramaturgie», avec un brouillon de texte, le mardi 18 novembre, «présentant des espoirs concrets». Mais le texte final de vendredi en est une version «largement édulcorée».
Malgré quelques objections sud-américaines, la présidence menée par André Corrêa do Lago a refusé de rouvrir les négociations. «Elle n’a donc pas introduit de formulations plus claires concernant la sortie des énergies fossiles ou sur l’objectif global d’adaptation.» Selon elle, «au final, personne n’était satisfait».
Certains pays ont refusé d’augmenter leur contribution financière, d’autres, notamment les pays exportateurs de pétrole, ont bloqué tout engagement comprenant une «terminologie explicite», notamment le terme de décarbonation.
L’Inde ou l’Arabie saoudite ont, selon elle, joué un rôle déterminant dans l’atténuation des engagements inscrits dans le texte final. L’influence du lobby pétrolier s’est révélée particulièrement forte. «Les lobbyistes étaient plus nombreux que jamais», déplore-t-elle.
«Même la France avait intégré des représentants du secteur pétrolier dans sa délégation», précise-t-elle. Pour la députée, cette présence pose un réel problème de crédibilité. «Tant que ceux qui freinent la transition sont assis à toutes les tables, il sera difficile d’obtenir des engagements forts.»
«Trois déceptions majeures»
Joëlle Welfring pointe trois déceptions majeures : le recul sur la sortie des énergies fossiles, le report de cinq ans pour la mise en œuvre du financement de l’adaptation et l’absence de feuille de route crédible sur la déforestation, alors même que la conférence se déroulait à côté de l’Amazonie.
Elle insiste sur l’urgence d’actions concrètes : «On a entendu des témoignages bouleversants de communautés directement menacées. On ne peut plus se permettre d’attendre.»
Malgré ces constats, elle reconnaît quelques éléments positifs. «La COP reste un rendez-vous annuel indispensable. On ne peut pas attendre qu’une seule conférence transforme tout. Il faut avancer petit pas par petit pas.»
Elle appelle néanmoins à repenser la gouvernance du processus, notamment la gestion des lobbyistes et la règle du consensus, qui permet à un seul État de bloquer tout progrès. «Si on ne modernise pas le fonctionnement des COP, on continuera à produire des déclarations creuses.»
L’ancienne ministre décrit la réalité du terrain d’une COP : «En tant que ministre, on peut enchaîner jusqu’à huit réunions par jour», explique-t-elle. Cette réunion annuelle, dont «la première semaine est technique et la deuxième est politique», est «un mélange entre un salon professionnel et des négociations diplomatiques de haut niveau».
L’événement est aussi l’occasion pour les pays de rassembler leurs forces pour peser. Par exemple, «chaque matin, les pays européens se réunissent pour faire le point ensemble». La société civile, représentée par les ONG, a également un rôle à jouer : sa présence permet d’entendre «des témoignages très forts de pays qui vivent déjà les impacts du changement climatique, et cela rappelle l’urgence d’agir», souligne la députée.
Cette année, la délégation luxembourgeoise conduite par Serge Wilmes, le ministre de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité, a présenté le projet «Rio Changemakers», une plateforme basée sur l’IA visant à faciliter les investissements privés dans les solutions climatiques et de biodiversité.
Pour Joëlle Welfring, ce type d’initiative témoigne certes de la volonté de contribuer à la transition écologique, mais la députée souligne que les efforts nationaux ne suffiront pas : «Le Luxembourg peut faire sa part, mais sans une dynamique internationale forte, nous resterons en retard sur l’urgence climatique.»