OGBL et LCGB ont décidé de passer à l’offensive pour forcer le patronat à enfin négocier une nouvelle convention collective. Le blocage actuel pourrait conduire le secteur de la construction «droit dans le mur».
Pas plus tard que vendredi, le Conseil de gouvernement s’est penché sur la «situation actuelle du marché immobilier, de la construction et de l’accès au logement». Dès la fin décembre 2022, l’artisanat avait mis en garde contre une catastrophe sociale dans les secteurs concernés. Mercredi, le camp syndical a tenu à relativiser les choses, dans le but aussi de justifier ses revendications dans le cadre du renouvellement de la convention collective.
«Après 10 ans de surchauffe dans le secteur, qui ont assuré aux entreprises une croissance économique et financière, la situation est toujours saine, au contraire de ce que clame le patronat», tranche Jean-Luc De Matteis, le secrétaire central de l’OGBL en charge de la construction. Il se base sur les retours des centaines de délégués présents sur le terrain.
«L’une ou l’autre entreprise, davantage focalisée sur le logement, connaît des difficultés. Malgré tout, les carnets de commandes sont très bien remplis pour 2023, mais aussi 2024, où les investissements prévus restent importants», enchaîne le syndicaliste.
Il rappelle que le logement ne représente qu’un quart de l’activité. «Il faut donc bien faire la différence avec les autres domaines que sont les rénovations et travaux publics, où l’État continue à investir massivement.»
Au vu de ce contexte, il serait «inacceptable» que les patrons continuent à bloquer toute négociation sur le renouvellement de la convention collective, venue à échéance fin 2021. Les tractations durent depuis 20 mois, «avec aucune proposition sérieuse» mise sur la table par les employeurs. «Alors que les entreprises de construction font des bénéfices faramineux, il est sordide que les conditions de travail des 20 000 salariés du secteur stagnent», fustige Jean-Luc De Matteis.
Une grève en dernier recours?
Face à un camp patronal qui «s’obstine à jouer la montre», les syndicats OGBL et LCGB ont décidé de passer à l’offensive. «Nous leur avons donné la chance de mener des négociations sérieuses dans le respect du dialogue social. Or, vu que les patrons n’ont pas compris l’urgence de la situation, il nous faut consulter la base. Le ras-le-bol est collectif», lance le secrétaire central de l’OGBL. «Le patronat dénigre nos propositions», renchérit Robert Fornieri, le secrétaire général adjoint du LCGB.
Les syndicats se disent conscients du «flottement» qui touche le secteur, dû notamment à la flambée des prix des matériaux et de l’énergie. Ils se disent prêts à des concessions. Des revalorisations à plus court terme, «sans impact financier direct» sur les entreprises, sont proposées.
Un accent particulier est mis sur la formation (lire ci-contre), mais aussi les perspectives de carrière. «Sans revalorisations, on risque d’aller droit dans le mur», met en garde Jean-Luc De Matteis.
La saisine de l’Office national de conciliation n’est pas exclue. «Ce serait le dernier pas avant une grève», précise le secrétaire central de l’OGBL. Robert Fornieri estime que le «climat va alors fortement se détériorer». Le camp syndical en appelle à la «conscience» des patrons pour «trouver dans les meilleurs délais des solutions afin d’éviter un conflit social».
Le «refus» de compenser le manque de qualifications en interne
Le manque de main-d’œuvre dans la construction se chiffrerait actuellement entre 30 et 35 %. La situation risque encore de se corser avec les départs à la retraite dans les années à venir. Autant de raisons pour enfin introduire un droit renforcé à la formation.
«Cette mesure contribuerait à compenser en interne la pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Or même cela est refusé par le camp patronal», fustige le secrétaire central de l’OGBL. «Il nous faut profiter à bon escient du temps avant une forte reprise dans le secteur pour investir dans le personnel», complète Robert Fornieri, le secrétaire général adjoint du LCGB. Au bout du compte, ce refus patronal ne ferait que détériorer le manque d’attractivité dont souffre le secteur de la construction.