Caritas a annoncé l’ouverture d’un nouveau foyer d’urgence, à Liefrange, destiné aux mineurs non accompagnés. L’occasion de revenir sur les préconisations de l’association en la matière, une semaine après la publication du rapport de l’OKaJu.
Sur le front de la protection du droit des enfants, Caritas s’engage davantage en annonçant l’ouverture d’un nouveau foyer destiné aux mineurs non accompagnés (MNA). La structure, située à Liefrange, entend répondre à l’urgence qui s’est instaurée au rythme des flux migratoires liés à la guerre en Ukraine et au climat politique instable dans plusieurs régions du globe. À ce jour, le foyer d’hébergement ne compte que 12 mineurs, mais sa capacité sera augmentée au fil des mois : «D’ici la fin de l’année, on espère accueillir 24 mineurs, voire 36, mais on doit continuer à recruter avant d’augmenter le nombre de places», détaille Tom Brassel, directeur opérationnel à Caritas.
Par ailleurs, l’association s’est appuyée sur l’aménagement de la Maison Saint-Hubert, ouverte en avril 2020, pour concevoir ce nouveau foyer d’urgence. Dans le cadre du programme gouvernemental de solidarité européenne, Caritas y avait accueilli 12 jeunes Afghans et syriens âgés de 11 à 16 ans, malgré le confinement en vigueur. L’ouverture du foyer de Liefrange s’accompagne d’un ensemble de revendications, à l’intention des pouvoirs publics, concernant une amélioration de la prise en charge des MNA.
Dans la droite lignée de l’OKaJu, qui a publié son rapport il y a tout juste une semaine, Caritas propose d’augmenter le nombre de structures d’hébergement adaptées aux MNA, tout en offrant une prise en charge identique à celle des autres mineurs du territoire. Ces préconisations sont assorties de points plus détaillés, dont voici une brève présentation.
L’introduction d’un statut spécifique
Si la loi définit un MNA comme une personne âgée de moins de 18 ans vivant au Luxembourg sans la présence d’un adulte légalement responsable, il n’y a pas de statut spécifique qui convienne à la situation. Une fois arrivés au Luxembourg, ces derniers n’ont d’autre choix que d’introduire une demande de protection internationale (DPI) auprès de la direction de l’Immigration.
Ainsi, pour lutter contre la prééminence du droit national sur l’intérêt supérieur de l’enfant, qui constitue l’un des piliers de la Convention relative aux droits de l’enfant des Nations unies, Caritas propose l’introduction d’un statut juridique spécifique : «Tous les MNA, qu’ils aient introduit une demande de protection internationale ou non, devraient recevoir un statut juridique spécifique, doté de droits supplémentaires, détaille l’association. Il est primordial qu’un jeune qui se retrouve sans parents au Luxembourg doit être directement recensé et accompagné par l’Office national de l’enfance.»
Cette revendication se veut en phase avec les politiques orchestrés par les pays voisins, à l’instar de l’Allemagne, où les enfants qui entrent dans le pays sans accompagnement sont provisoirement encadrés par le «Jugendamt» fédéral, soit l’administration publique chargée de l’aide sociale, de la protection de la jeunesse et de l’assistance aux familles.
Une nouvelle politique pour les administrateurs
La barrière linguistique et la complexité des démarches administratives rendent difficiles l’accès aux droits pour les MNA. Le système juridique luxembourgeois prévoit tout de même la désignation d’un administrateur public, chargé des affaires courantes du mineur, ainsi que d’un administrateur ad hoc une fois la présentation de la demande de protection internationale effectuée. Néanmoins, aucun des deux n’est présent lors de la première présentation auprès de la direction de l’Immigration.
De plus, la loi n’établit pas de délai d’attribution, ce qui peut retarder le dépôt de la demande de protection internationale : «Si la désignation de l’administrateur ad hoc tarde à venir, le risque existe que la demande du mineur non accompagné soit traitée de manière procédurale comme celle d’un adulte», s’inquiète Caritas, qui propose dès lors d’attribuer directement un administrateur public à l’enfant, sans attendre que l’institution d’accueil en fasse la démarche. Tout comme l’OKaJu, l’association propose d’intégrer cette préconisation dans les droits spécifiques du mineur non accompagnée.
Mieux assurer le regroupement familial
Les dispositions légales actuelles ne confèrent pas aux bénéficiaires de protection internationale le droit à une aide financière pour organiser l’arrivée de sa famille dans le cadre du regroupement familial. Or cette organisation a un «coût considérable» au regard des frais d’obtention d’un passeport national ou d’une demande de visa, ce qui amène à des situations financières intenables pour les concernés.
Pourtant, le regroupement familial est reconnu par les instruments juridiques nationaux et européens : «Le MNA peut être rejoint par ses ascendants directs au premier degré sans qu’on exige que ces derniers soient à sa charge ou privés du soutien familial nécessaire dans leur pays d’origine», fait état la loi modifiée portant sur la libre circulation des personnes et l’immigration du 23 août 2008. Pour permettre le regroupement familial dans des conditions décentes et au diapason avec la législation, Caritas préconise ni plus ni moins que la mise en place «d’une aide financière avec des conditions d’octroi claires et transparentes».
Les revendications de Caritas sur le sujet ne s’arrêtent pas là, puisqu’il est également question de réunir plus fréquemment la commission consultative ou d’interdire la rétention d’enfants en situation de migration. Pour consulter toutes les prises de position de l’association, rendez-vous sur le site internet (www.caritas.lu/publications/avis-et-positions).