Le Premier ministre a rencontré, lundi, une délégation du mouvement Youth for Climate Luxembourg, initiateur de la marche pour le climat du 15 mars à Luxembourg. Les communiqués des deux parties diffusés après cette entrevue témoigne du fossé existant entre les jeunes et les décideurs politiques sur la question climatique.
Dans le communiqué diffusé lundi soir par le gouvernement, on retrouve les poncifs un brin paternalistes que le monde politique adresse aux mouvements citoyens qui se mobilisent contre le réchauffement climatique.
Ainsi, «le Premier ministre a rassuré les jeunes» : «Le gouvernement est sensible à leurs doléances et arguments et il les soutient dans leur engagement parce que le gouvernement est persuadé que les actions en faveur de la protection du climat doivent être menées dans tous les domaines et par tous les acteurs de notre société».
Après le discours classique empreint de bon sentiment montrant que le monde politique est à l’écoute, le communiqué du gouvernement stipule : «Xavier Bettel a rappelé aux jeunes que son gouvernement a initié des mesures en faveur de la protection de l’environnement en général et du climat en particulier.» Manière de dire que l’action en faveur du climat est déjà engagée et qu’il n’ait donc point besoin de transformations radicales.
Enfin, le gouvernement annonce «la participation de la population» à travers «une consultation publique» sur l’enjeu de la protection du climat. Le communiqué informe d’ailleurs que «de telles consultations seront organisées avec la Conférence nationale des élèves au sein des établissements scolaires afin de permettre aux jeunes d’entrer dans un dialogue constructif avec les membres du gouvernement». Là aussi, mais ce n’est pas propre au monde politique luxembourgeois, une action d’envergure est repoussée aux calendes grecques sous prétexte de consultations alors que les solutions et les problèmes sont connus et documentés par les scientifiques depuis de nombreuses années.
Vieux réflexes politiques vs appels à l’action immédiate des jeunes
Dans le communiqué diffusé mardi matin par Youth for Climate Luxembourg, le ton est radicalement différent. Si l’organisation Youth for Climate «accepte la proposition de M. Bettel d’un échange entre les élèves et les ministres pour être à l’écoute de leurs préoccupations», l’organisation de jeunesse use d’un langage beaucoup moins policé quant aux moyens à mettre en œuvre pour lutter contre le réchauffement climatique. «Youth For Climate Luxembourg appelle à un changement radical du système politique, économique et social. Nous sommes convaincus qu’il est désormais bien trop tard pour encore essayer de combattre le changement climatique à petits pas.»
Et les jeunes de mettre le doigt là où ça fait mal : la «croissance économique continue, construite sur une utilisation grandissante des ressources naturelles, est incompatible avec un futur pour l’humanité». «Youth For Climate Luxembourg exige que le gouvernement arrête sa politique climatique pragmatique pour à sa place assurer une politique climatique guidée par une vision pour un avenir meilleur».
Les jeunes réclament, rien que ça, un changement total de paradigme en matière d’organisation du système économique et social, un abandon de la religion de la croissance. Et ce changement, à leurs yeux, pourrait être un atout : «Les nouveaux efforts fournis pourraient être présentés en tant que nation branding, présentant ainsi le gouvernement luxembourgeois comme pionnier mondial».
«Les grèves continueront»
De toute manière, les jeunes ne comptent pas relâcher la pression : «Les grèves continueront, en tant qu’outil de pression sur les acteurs politiques pour qu’ils agissent enfin contre le changement climatique.»
Ces deux communiqués, l’un du gouvernement, l’un des jeunes mobilisés dans la lutte contre le changement climatique, illustre parfaitement l’abysse qui sépare – dans toutes les démocraties occidentales, pas qu’au Luxembourg – des décideurs politiques démocratiquement élus qui fonctionnent encore sur un vieux modèle et ne font de l’écologique qu’un aspect cosmétique de leurs politiques, et des jeunes qui se rendent compte que le temps des discours et des discussions est révolu.
La dernière phrase du communiqué des jeunes est d’ailleurs révélatrice : «Nous considérons comme impératif que toute future législation proposée soit jugée par rapport à deux critères. Son effet sur le bien-être et son impact environnemental. Youth For Climate Luxembourg regrette que le Premier ministre n’ait pas pris ceci suffisamment en compte.»
N. K./LQ
Le globalisme est la cause primaire du changement climatique.