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Chicanerie à la Chambre autour du rôle des syndicats


La députée Djuna Bernard a voulu faire reconnaître le rôle exclusif des syndicats par le gouvernement, mais sa motion a été rejetée…  (Photo : archives lq/hervé montaigu)

La motion de la députée Djuna Bernard (déi gréng), qui réclamait une reconnaissance du rôle des syndicats dans les négociations de conventions collectives, a bien failli être acceptée. Mais non.

Décidément, les syndicats ne savent pas sur quel pied danser et les députés de l’opposition non plus. Hier, au Parlement, une motion déposée par la députée écolo Djuna Bernard a failli être approuvée avant l’intervention du député Gilles Baum, chef de la fraction libérale.

Le contexte du débat se situe dans le récent éclat qui a eu lieu lors d’une réunion du comité permanent du travail et de l’emploi (CPTE), au début du mois. Les syndicats avaient claqué la porte face à l’attitude du ministre du Travail, Georges Mischo, qui leur présentait l’avant-projet de loi devant transposer une directive européenne promouvant les conventions collectives. Ce jour-là, le ministre leur avait bien fait sentir que 56 % des délégués dans les entreprises n’étaient pas affiliés à un syndicat et que, dès lors, il n’était pas nécessaire de voir les centrales syndicales à la table des négociations desdites conventions collectives.

Pour les syndicats, il n’était plus possible dans ces conditions de garantir des rémunérations adéquates ou d’améliorer les conditions de vie et de travail des salariés qui ne sont pas couverts par une convention collective. La négociation de ces conventions «demeure une prérogative exclusive des syndicats, comme cela est d’ailleurs explicitement prévu par la directive ainsi que mentionné par l’OCDE et les conventions de l’Organisation internationale du travail», indiquaient les syndicats dans un communiqué commun.

Hier, à la Chambre, le député CSV Charel Weiler avait déjà posé une question orale au ministre Mischo sur ce point, insistant sur l’importance du dialogue social pour le Luxembourg, son fameux modèle que d’autres pays lui envient. Le ministre Georges Mischo lui a répondu qu’il était tout à fait d’accord avec lui et a déclaré qu’il n’avait jamais dit que les syndicats se verraient retirer leur prérogative.

Et Gilles Baum a parlé…

La députée Djuna Bernard, en déposant sa motion demandant au gouvernement de s’engager «à ne pas restreindre le rôle des syndicats justifiant de représentativité nationale générale ou sectorielle dans la négociation et la signature de conventions collectives de travail», ne pouvait qu’espérer une issue favorable. Le CSV, par la voix de la députée Stéphanie Weydert, s’est dit d’accord avec la motion à condition de changer quelques points de vocabulaire. Soit, l’esprit restait le même.

Quand le député de déi Lénk Marc Baum a suggéré d’ajouter que les syndicats avaient un rôle «exclusif» à prendre en considération, tout a basculé. Le député DP Gilles Baum a indiqué que, dans ces conditions, sa fraction voterait contre la motion. Le CSV a aussitôt changé son fusil d’épaule et a rejeté la motion puisqu’il était question d’accorder aux syndicats l’exclusivité des négociations.

Pour Georges Engel (LSAP), cette motion était même «superfétatoire» puisque la loi confère déjà aux syndicats leur rôle de négociateurs dans les conventions collectives. La majorité a voté contre, de quoi inquiéter encore davantage les syndicats.

Une façon de procéder «inacceptable»

Lors de ce fameux CPTE avorté, Georges Mischo avait jugé que la prise de position des syndicats n’apportait à ses yeux «aucune plus-value» et qu’il n’était là «que pour écouter les différentes positions», après quoi il prendrait «ensuite seul une décision quelles que soient les positions défendues par les différentes parties au sein du CPTE».

Une façon de procéder «inacceptable» pour les syndicats, tant elle dédaigne le modèle luxembourgeois du dialogue social. Pour la présidente de l’OGBL, «il s’agit très clairement d’une ligne rouge». Impensable de négocier sans les syndicats, même si 56 % des délégués ne sont pas affiliés. «On s’attaquerait alors à l’ensemble de la structure salariale, au régime des conventions collectives et aux syndicats», fustige Nora Back. Selon elle, le camp syndical est le seul à disposer «de l’indépendance, des moyens et des ressources pour négocier de bonnes conventions collectives qui apportent de vraies améliorations pour les salariés».