Accueil | A la Une | Chenilles processionnaires : le Parc Le’h se prépare pour l’invasion

Chenilles processionnaires : le Parc Le’h se prépare pour l’invasion


Le parc sera fermé toute la journée de mardi et mercredi. (Photo DR)

Le parc Le’h doit être traité mardi et mercredi contre la chenille processionnaire du chêne. Une petite bête aux poils urticants qui commence à revenir.

C’est la deuxième année que Dudelange emploie les grands moyens pour éradiquer les chenilles processionnaires du chêne, une espèce qui est devenue envahissante avec le dérèglement climatique. Le traitement devait débuter hier au parc Le’h. La pluie qui vient lessiver et annuler l’action du produit a obligé la commune à repousser d’au moins une journée cette action de prévention qui doit tout au moins diminuer l’invasion. Le parc devrait donc être fermé ces mardi et mercredi, et si la pluie vient s’inviter, ce délai pourrait à nouveau être prolongé.

La décision a été prise par le collège échevinal de Dudelange en étroite collaboration avec l’administration de la Nature et des Forêts. Sans intervention humaine, ces chenilles urticantes tombent des arbres sur les chemins et potentiellement sur les promeneurs. Nous sommes au tout début de la saison, le moment où l’on peut encore agir.

Le produit biocide microbiologique Foray ES, basé sur la protéine d’une bactérie, est utilisé à ces fins dans les couronnes des arbres. Agréé au Luxembourg, il est non toxique pour les autres insectes, y compris les abeilles. C’est le seul produit autorisé au Grand-Duché par le ministère de l’Environnement. «Chaque année, il faut redemander une nouvelle dérogation», explique une personne de la commune. Ce produit ne peut être utilisé que du 15 avril au 15 juin. «C’est un domaine très réglementé», précise-t-elle encore.

Toujours en groupe

Ce papillon thermophile est présent dans une grande partie de l’Europe et colonise uniquement les chênes, c’est d’ailleurs à ça qu’on le reconnaît. D’autres chenilles peuvent être en groupe et envahissantes sur d’autres arbres, mais ne représentent pas pour autant un danger. La chenille processionnaire, comme son nom l’indique, vit et se déplace systématiquement en communauté. Si ce n’est pas le cas, encore une fois, c’est probablement qu’il s’agit d’une autre espèce, probablement pas dangereuse pour la santé humaine.

La femelle pond jusqu’à 300 œufs dans la partie supérieure de la couronne des chênes et c’est sa progéniture qui forme alors une nouvelle colonie à l’éclosion, l’année suivante. Chaque année, une nouvelle génération vorace fait son apparition.

La chenille se développe en automne et passe tout l’hiver dans l’œuf. En début de la période de végétation (fin avril, début mai), les chenilles éclosent. Elles passent alors par six stades de développement pour arriver à la nymphose.

À partir du troisième stade larvaire, la chenille peut lâcher dans l’air des poils pourvus d’aiguillons urticants, contenus dans une poche. Ces poils sont armés d’une toxine appelée thaumétopoéine. Le nombre et la longueur de ces poils irritants augmentent à chaque mue de la chenille.

On peut observer les nids de la processionnaire du chêne à partir du cinquième stade de développement de la chenille (mi-juin) sur le tronc ou sur les branches maîtresses du chêne. Ils sont notamment composés de déjections et de poils, et peuvent s’étaler sur une longueur d’un mètre. C’est là que les chenilles viennent se reposer. La nymphose a lieu à partir de juillet dans le nid et dure entre trois et six semaines, à l’issue elles se transforment en papillons de nuit. Cela ne signifie en rien la fin des ennuis pour les voisins humains qui se grattent depuis des semaines. Les nids, avec les restes de mue et les poils urticants persistent dans les arbres et conservent leur caractère allergénique.

Des poils qui irritent et s’enlèvent difficilement

Une réaction allergique peut être déclenchée à cause des poils urticants de la chenille processionnaire du chêne contenant la protéine thaumétopoéine. «Ces poils irritent la peau humaine, ce qui conduit à des démangeaisons désagréables pouvant aboutir à des réactions inflammatoires de la peau (dermatite, urticaire). Des irritations des yeux et des voies respiratoires sont également possibles», peut-on lire sur le site sante.public.lu. Déjà présente mais peu connue il y a encore quelques années, elle est désormais crainte et détestée par une grande partie de la population et a occupé nombre de conversations l’été dernier. Les symptômes peuvent aller jusqu’à de la fièvre et des vertiges. La sensibilité et l’intensité de la réaction des personnes touchées augmentent avec chaque contact. Les animaux domestiques sont aussi concernés.

Il est recommandé de ne pas toucher les chenilles ou les nids et d’en expliquer les raisons aux enfants. Bien sûr, il ne faut pas s’approcher ou rester à proximité de chênes contaminés. Si le contact n’a pas pu être évité, il faut retirer ses vêtements et les laver en machine, prendre une douche, rincer ses yeux et bien laver les cheveux.

Les poils peuvent être enlevés avec de l’eau et du savon sur la peau, au pire avec une pince ou du papier collant. Il faut également éviter de marcher avec ses chaussures à l’intérieur de la maison.

En cas de problème grave, il est nécessaire de consulter un médecin. L’urticaire de la peau est traitée par des crèmes antihistaminiques ou corticoïdes. Des compresses refroidissantes apaisent les symptômes.

En cas d’ingestion, on peut diluer la quantité de poils ingérés en buvant beaucoup d’eau. Les réactions plus sévères peuvent nécessiter une hospitalisation.

Les pesticides comme solution font débat

L’an passé, dans un communiqué datant du 23 avril, soutenu par l’ASBL natur&ëmwelt, l’Ëmweltberodung Lëtzebuerg (EBL) et le groupe entomologique de la Société des naturalistes luxembourgeois (SNL), la plateforme Ouni Pestiziden avait tiré la sonnette d’alarme. Le communiqué dénonçait au moins quatre autorisations d’utilisation d’un pesticide (NDLR : biocide Foray ES) contre les chenilles processionnaires qui avaient été délivrées par le ministère de l’Environnement, dont le parc Le’h à Dudelange, le Parc Merveilleux à Bettembourg ou encore 19 lieux situés dans la commune de Schengen.

L’ancienne ministre, Carole Dieschbourg, avait élaboré, en collaboration avec l’administration de la Nature et des Forêts (ANF), un plan d’action pour le traitement des processionnaires du chêne, qui avait été publié le 22 avril 2021 sur le site sante.public.lu.

La plateforme préconisait de d’abord intervenir avec des moyens mécaniques, c’est-à-dire en aspirant les chenilles. Les mouvements écologiques regrettaient, concernant le parc Le’h, que le pesticide soit utilisé sur 18 des 24 hectares du parc sans nuance entre les aires de jeux, très à risque, les chemins ou les alentours du restaurant et les zones moins fréquentées.

Selon les associations, le risque de l’utilisation de ces produits chimiques est de réduire la population d’oiseaux et de chauves-souris qui se nourrissent des processionnaires, papillons et papillons de nuit.

Personne ne remet en cause la nécessité de lutter contre ce phénomène qui est désormais un problème récurrent.