La canicule d’une précocité inédite s’amplifie en France, avec un tiers du pays placé en vigilance vendredi, avec des pics de chaleur prévus au-delà de 40 degrés, comme en Espagne, déjà confrontée à plusieurs feux de forêt.
Au total, 37 départements français, soit 18 millions de personnes, sont touchés par cette vague de chaleur précoce, arrivée du Maghreb via la péninsule ibérique. En Espagne, les températures ont grimpé en flèche le weekend dernier, avec des pointes allant jusqu’à 43 degrés et plusieurs feux de forêt, notamment en Catalogne.
En France, les 40°C seront fréquemment atteints voire dépassés dès vendredi sur un grand quart sud-ouest, selon Météo-France. Jeudi, le thermomètre a déjà grimpé à 40°C à Saint-Jean-de-Minervois, (sud), un record de précocité pour la France métropolitaine hors Corse, selon Météo-France.
Le ministère de la Santé a activé un numéro gratuit Canicule info service et celui de l’Éducation a annoncé que les écoliers et collégiens des 12 départements en rouge pourront rester chez eux vendredi.
La vigilance rouge, niveau le plus élevé du « plan national canicule », commencera vendredi à partir de 14H00 dans 12 départements situés dans le sud-ouest et la façade Atlantique. Météo-France a en outre étendu la vigilance orange à 25 départements au total.
Marqueur du changement climatique
« C’est la vague de chaleur la plus précoce jamais enregistrée en France » depuis 1947, indique Matthieu Sorel, climatologue à Météo-France. « De nombreux records mensuels voire absolus (…) devraient être battus dans plusieurs régions », dit-il, y voyant un « marqueur du changement climatique ».
Cette vague de chaleur qui intervient après un printemps particulièrement chaud et sec va encore aggraver la sécheresse des sols, notamment agricoles, alors que plusieurs départements restreignent déjà l’utilisation de l’eau. Dans le nord de l’Italie, l’eau est déjà rationnée dans plusieurs villes de la Plaine du Po et la Lombardie se prépare à déclarer l’état d’urgence face à une sécheresse record menaçant les récoltes. La plaine du Po, qui traverse le nord du pays et abrite d’importantes cultures agricoles, affronte sa pire sécheresse depuis 70 ans.
En France, c’est la quatrième fois -et le plus tôt dans la saison- que la vigilance rouge canicule est utilisée depuis la mise en place du dispositif après les leçons tirées de la canicule historique de 2003 qui avait fait plus de 15.000 morts dans le pays. Vingt ans après, les maisons de retraite ont mis en place des mesures pour protéger leurs résidents avec arrosage des façades, glaçons dans les boissons, ventilateurs et séquences prolongées dans les salles climatisées. Mais les seniors isolés à leur domicile restent vulnérables.
« On est encore plus vigilants que d’habitude avec les anciens. C’est dur pour eux. Souvent, ils sont seuls, amoindris physiquement, en perte d’autonomie », témoigne Sarah Jalabert, infirmière à domicile dans le Tarn (sud-ouest). Dans cette région, plusieurs rencontres sportives et manifestations publiques ont été annulées par les autorités.
Plus au nord, en Vendée, la préfecture a levé les mesures de confinement des volailles consécutives à l’épizootie de grippe aviaire. Avec la chaleur, la qualité de l’air s’est en outre détériorée dans plusieurs régions, avec des pics de pollution à l’ozone en région parisienne et dans l’est, où les usagers de la route sont invités à réduire leur vitesse.
De leur côté, les pompiers en alerte guettent les départs de feu, favorisés par la chaleur et l’assèchement de la végétation. La multiplication des vagues de chaleur, notamment en Europe, est une conséquence directe du réchauffement climatique, expliquent les scientifiques, les émissions de gaz à effet de serre augmentant à la fois l’intensité, la durée et la fréquence de ces phénomènes.
L’Espagne, qui a connu cette année son mois de mai le plus chaud depuis le début du siècle, selon l’agence météorologique, a déjà traversé quatre épisodes de températures extrêmes sur les dix derniers mois.