Alors que le Luxembourg a battu des records de chaleur, le Mouvement écologique rappelle la nécessité de reverdir les communes pour faire baisser les températures.
La semaine dernière, le Luxembourg a connu une vague de chaleur que l’on aurait encore qualifiée d’inédite il y a quelques années. Mais la vigilance rouge qui a déferlé sur le sud du pays commence à devenir la norme en été. Une situation qui inquiète de nombreux écologistes dont les avertissements depuis déjà de nombreuses années semblent rester lettre morte. Au Luxembourg, le Mouvement écologique (Méco) a une fois de plus souhaité tirer la sonnette d’alarme après les fortes chaleurs de ces derniers jours et rappelé la situation de plus en plus délicate dans laquelle se trouve de nombreuses villes.
Déjà caniculaires, les températures ont en effet atteint des sommets dans les zones urbaines avec des maximales qui frôlaient les 40 °C. Béton et asphalte emmagasinent en effet bien plus la chaleur que les prairies ou les arbres, entraînant des températures supérieures jusqu’à 3 °C de celles que l’on peut constater à la campagne. Pour le Méco, il est donc urgent d’agir avec des mesures concrètes comme la végétalisation des villes devenues de plus en plus minérales au fil des années. «Il faut un plus de campagne dans les villes», lance Claire Wolff, responsable de la biodiversité et de l’environnement naturel au Méco.
Créer des îlots de fraîcheur
En pleine canicule, il est plus agréable de se trouver dans une forêt qu’en plein centre de Luxembourg. Alors qu’il est aujourd’hui indispensable de devoir s’adapter au climat, la verdure doit retrouver une plus grande place en ville. Adapter les bâtiments et proposer des ombrages artificiels ne suffira plus à contrer les vagues de chaleur.
Les plantes, en plus de fournir de l’ombre, peuvent rafraîchir la température ambiante grâce à l’évapotranspiration. Ce phénomène permet aux végétaux de réguler leur température par évaporation de l’eau contenue dans leurs feuilles. Renvoyée dans l’atmosphère environnante sous forme gazeuse, l’eau peut alors refroidir l’air, créant ainsi des îlots de fraîcheur. «Cette différence de microclimat est facilement perceptible : il suffit de faire le test soi-même – où se sent-on mieux : à l’ombre d’un store ou sous un vieux tilleul?»
Une question de santé publique
Mais au-delà du simple ressenti, le Méco a aussi des preuves plus concrètes. En observant des images thermiques de la capitale, il apparaît clairement que la végétalisation rafraîchit les rues. D’après les analyses réalisées par l’ASBL, la température peut même chuter de 15 à 20 degrés sous les arbres par rapport à celle enregistrée quelques mètres plus loin sur le béton. «Ces surfaces scellées sont aussi un problème, car elles sont imperméables et ne laissent pas l’eau pénétrer dans le sol, ajoute Claire Wolff. Il faut les deux : plus d’espaces verts et moins de béton.»
Les communes ont tout intérêt à s’emparer du sujet. Une politique ambitieuse et rapide à ce niveau permettra d’améliorer leur attractivité. Le Méco rappelle qu’une végétation plus abondante offre bien plus que du confort aux habitants. Pour les personnes âgées, parmi les premières à souffrir de la chaleur, c’est aussi une question de santé publique permettant de limiter le nombre décès. «Il est prouvé que les espaces verts ont un effet très positif sur le mental et le bien-être psychologique des individus. Des études ont montré qu’une personne à l’hôpital guérit plus vite si elle voit des arbres de sa fenêtre plutôt que des façades.»
Vers des canicules de plus en plus longues
Si les villes commencent à prendre conscience du problème et à se saisir du sujet, comme le montre le Klima-Bündnis Lëtzebuerg, le chemin est encore long. «Ça avance lentement, mais certaines vont dans la bonne direction», note Claire Wolff. L’idéal serait d’inclure la végétalisation au centre de toutes les réflexions. Le Méco lance donc un appel aux politiques pour mettre en œuvre dès maintenant une végétalisation plus ambitieuse. «Il faut prévoir cette verdure aussi bien dans les quartiers existants que dans les nouveaux projets d’aménagement.»
L’association prône aussi la règle des 3-30-300 : chaque personne doit pouvoir voir au moins 3 arbres depuis son domicile, vivre dans un quartier dont 30 % de la surface est couverte par des cimes d’arbres et se situer à 300 mètres maximum d’un espace vert. «Il faut tout planifier ensemble et penser à la structure verte, les arbres, autant qu’à la structure bleue, en rapport avec l’eau.» Les communes devraient également lancer des projets ciblés comme identifier les îlots de chaleur, transformer les cours de leurs écoles, interdire les jardins minéraux ou encore végétaliser les bâtiments communaux.
Enfin, il est important de ne tolérer aucun recul. Si le gouvernement affirme qu’il y aura bientôt plus de nature dans les villes, le Méco en est moins convaincu. S’il faut favoriser l’apparition de nouvelles surfaces boisées, la protection des anciennes est tout aussi importante. «Il est dangereux de les négliger.» La verdure met du temps à pousser, les vieux arbres et les haies ne peuvent donc être remplacés du jour au lendemain, la loi sur la protection de la nature doit donc continuer à garantir leur préservation et ne pas être affaiblie comme le craint le Méco. Au risque de voir les communes virer de plus en plus au rouge, été après été.
«La végétalisation ne doit pas être un luxe»
La végétalisation des villes revêt aussi une dimension sociale. Comme sur de nombreux autres sujets, ce sont souvent les personnes les plus défavorisées qui souffrent le plus de la chaleur. Le Mouvement écologique, la Chambre des salariés, l’OGBL et le LCGB exigent donc que la question soit intégrée dans le Plan climat social. «La végétalisation ne doit pas être un luxe», rappelle Claire Wolff. Dans certains quartiers, les gens n’ont pas accès à un espace vert ou un jardin et cela doit être pris en compte lors des nouveaux plans d’aménagement urbains. «Il faut le prévoir dans les plans de végétalisation des villes.»