Alors que la Coupe du printemps se déroule à partir de ce vendredi à Kockelscheuer, Fleur Maxwell revient sur sa longue et riche carrière.
Quelle est l’adversaire la plus forte que vous ayez affrontée ?
Fleur Maxwell : Je me souviens avoir vu Michelle Kwan aux JO de Nagano en 1998. J’avais neuf ans. Et en la voyant évoluer sur la glace, je me suis dit que c’était ça que je voulais faire. Et aux JO de Turin, en 2006, j’ai pu m’entraîner avec elle. La rencontrer, c’était une forme d’accomplissement. Malheureusement, elle n’a pas pu concourir, car elle était blessée.
Votre plus belle victoire ?
Pour moi, ce sont mes premiers championnats d’Europe à Turin (en 2005). J’étais 10e à l’issue du programme court. Je me rappelle que j’avais le sentiment d’avoir réussi à tout réunir en même temps : le mental, le physique et la technique. C’était le début de la nouvelle notation, j’avais tellement de points! C’était une vraie surprise pour moi, car j’étais si jeune.
Votre meilleur souvenir ?
Forcément, aller aux Jeux olympiques et porter le drapeau. À ce moment-là, on se dit que tout ça, ça valait le coup. J’ai ressenti une immense fierté. C’était un honneur pour moi d’être la seule représentante du pays et de défiler dans un si beau stade et devant le Grand-Duc. C’était un sentiment magique. Malheureusement, je n’ai pas pu faire d’autres JO. Une fois, j’ai raté la qualification d’un rien et, l’autre fois, j’étais blessée.
Votre plus gros regret ?
Je crois que j’étais trop dure avec moi-même. Je voulais toujours plus, toujours mieux, avoir toujours davantage de points. Être sportive de haut niveau demande énormément de sacrifices. Et je n’ai pas réalisé à quel point c’est une expérience traumatisante, les difficultés qu’on doit affronter. Ça prend beaucoup de soi.
Me faire opérer pour remplacer ma hanche m’a donné une seconde chance
Votre plus grosse blessure ?
Quand j’avais 21 ans, je me disais que tout allait bien. Mais maintenant, j’ai 34 ans et je me sens comme une vieille personne. J’ai une prothèse de hanche, des douleurs au dos, aux genoux. Quand tu patines, tu sautes et tu atterris. Tout ça pendant 20 ans, plusieurs fois par jour et six jours par semaine, et voilà le résultat. Quand j’ai consulté un médecin, car j’avais mal, il m’a dit qu’il n’y avait plus rien. C’était du marshmallow. J’ai repoussé pendant trois ans l’opération de remplacement complet de la hanche, car j’avais peur de l’inconnu. Mais il y a deux ans, je m’y suis résolue. J’avais tellement mal que je ne pouvais plus dormir. J’avais du mal à sortir de ma voiture. Je souffrais tout le temps et ça jouait aussi sur qui j’étais. Et j’ai bien fait. C’est la meilleure chose qui me soit arrivée. Ça m’a donné une seconde chance. Et mon plus gros regret, c’est de ne pas l’avoir fait avant!
À Courchevel, un autre patineur m’a coupé le doigt
Votre plus gros accident ?
C’était à Courchevel, lors d’un entraînement pour l’été. Un autre patineur ne regardait pas. Il m’est rentré dedans et m’a coupé le doigt. Quelqu’un l’a ramassé, on me l’a recousu à l’hôpital, mais depuis je n’ai plus aucune sensation au niveau du majeur de ma main droite. Et j’ai beaucoup de mal à le bouger correctement.
Le jour où vous avez décidé d’arrêter ?
Je m’en souviens très bien. J’étais à Kockelscheuer et j’ai réussi tous mes sauts. J’ai fait un triple-triple, mais j’avais tellement mal. J’ai senti que c’était fini. J’ai arrêté en 2018. Et depuis, je suis remontée une fois sur la glace, à Central Park en hiver, car ma femme voulait me voir patiner. Mais c’est un sport où tu ne peux pas te permettre de prendre plus de deux jours de repos, car les sensations s’en vont si vite. Après avoir patiné pendant vingt ans, tu arrives sur la glace et tu ne peux plus rien faire. C’était tellement déprimant. Comme passer d’une supercar à une voiture toute pourrie. Depuis, je n’y suis plus retournée.
Votre plus grosse fête ?
Il y en a eu plusieurs. J’ai eu la chance de participer à une tournée Art on Ice lors de plusieurs shows en Suisse. Avec des patineurs comme Evgueni Plushenko (NDLR : champion olympique, triple champion du monde, septuple champion d’Europe) ou Stéphane Lambiel (NDLR : double champion du monde et vice-champion olympique). Et ce qui était sympa, c’est qu’on était sur scène avec des artistes. J’ai pu rencontrer Sting, Anastasia ou encore le violoniste David Garrett avec qui j’ai performé. C’était un super show, une énorme production, avec un travail de lumières magnifique. On préparait tout avec les artistes avant le spectacle. Et on faisait une super fête après!
Ses faits d’armes
Seule Luxembourgeoise présente aux JO de Turin en 2006, Fleur Maxwell a terminé 24e de la compétition. Multiple championne nationale, elle a participé à de nombreux grands championnats en se classant notamment 14e aux championnats d’Europe de Turin, puis 29e aux Mondiaux de Moscou, à chaque fois en 2005. Au total, elle a décroché neuf médailles dans des événements internationaux.
Aujourd’hui
À 34 ans, Fleur Maxwell, née d’une mère australienne et d’un papa danois et élevée au Luxembourg, a complètement changé de vie. Partie pour New York en décembre 2019 afin d’y passer des vacances, elle y rencontre sa future femme et s’installe à Big Apple. Elle développe sa propre méthode, «Body by Fleur», qu’elle a mise au point en se servant de toute son expérience au fil des années. Elle donne désormais des cours à des personnes de «35 à 80 ans», à qui elle enseigne un moyen de rester en forme quel que soit leur âge. Par ailleurs, un astéroïde porte son nom, découvert en 2005 par Matthew Dawson, Britannique qui collabore avec l’observatoire du Luxembourg.