Six ans après la Palme d’or puis la polémique autour de « La vie d’Adèle », le Français Abdellatif Kechiche a secoué le Festival de Cannes jeudi avec « Mektoub My Love: Intermezzo », une expérience de 3h28 radicale jusqu’à l’overdose, dont les trois quarts se déroulent en boîte de nuit.
Précédé d’une rumeur sulfureuse, ce film en compétition officielle contient comme attendu son lot de surprises et de provocations, dont une scène de cunnilingus de 13 minutes. Pendant la projection officielle jeudi soir plusieurs personnes sont sorties de la salle. « Pas d’autre solution : c’est un film porno… Le cinéma c’est autre chose ! », commentait une spectatrice en quittant les lieux.
Le caractère très sexuel de l’œuvre n’est pas vraiment inattendu de la part d’un cinéaste qui avait déjà marqué les esprits avec une scène de sexe de huit minutes dans La Vie d’Adèle et une autre torride en ouverture de Mektoub my Love: canto uno. Suite de ce précédent opus, ode au désir de près de trois heures, présenté à la Mostra de Venise en 2017, Intermezzo en reprend les personnages principaux : une bande de jeunes à Sète.
Mais là où le premier passait d’un lieu à l’autre, alternant scènes de jour et de nuit, avec déjà une longue scène de soirée, le second se déroule presque exclusivement dans un lieu unique : une boîte de nuit. Et alors que le premier volet avait déjà suscité pas mal de commentaires sur la façon de filmer les femmes en s’attardant sur leurs courbes, leurs fesses en particulier, il récidive à haute dose dans ce second volet. Il multiplie ainsi les plans sur les corps de jeunes femmes qui dansent en mini-shorts et brassières, avec d’innombrables images de pole dance.
Expérience éprouvante
Mektoub My Love: Intermezzo se révèle être une expérience de cinéma éprouvante, répétant en boucle des images de danse accompagnées de musique de boîte de nuit jusqu’à devenir quasiment hypnotique et laisser le spectateur groggy. On y retrouve le timide Amin (Shaïn Boumedine), aspirant photographe et scénariste qui aime observer les filles, la séduisante Ophélie (Ophélie Bau), qui n’arrive pas à choisir entre celui qu’elle doit épouser et son amant Tony (Salim Kechiouche), alors que son mariage se rapproche à grands pas, l’amie de vacances Céline (Lou Luttiau) ou encore Camélia (Hafsia Herzi).
Le film débute sur une plage de Sète, par une journée ensoleillée. Les filles se baignent et discutent et les garçons draguent une nouvelle venue, Marie, Parisienne de 18 ans à qui ils proposent de sortir avec eux. Le reste se déroulera dans une boîte, où ces jeunes discutent, se draguent, se touchent, s’embrassent et surtout dansent beaucoup.
Mektoub my Love: canto uno avait été encensé à sa sortie en salles par la presse française, louant une distribution éclatante, avec des acteurs quasiment tous débutants, aux côtés de comédiens plus confirmés comme Hafsia Herzi et Salim Kechiouche. Ils sont à nouveau impressionnants dans ce second volet.
La présence du film en compétition marque en tout cas le retour du cinéaste de 58 ans sur la Croisette après la Palme d’or en 2013 pour La Vie d’Adèle et ses actrices, Léa Seydoux et Adèle Exarchopoulos, et la polémique sur les conditions de tournage du film. Léa Seydoux avait notamment dénoncé des conditions de tournage « horribles », tandis qu’Adèle Exarchopoulos, alors âgée de 19 ans, avait parlé de « dix journées entières à tourner » la très longue scène de sexe du film.
LQ/AFP