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Ce que l’on sait de l’attaque au couteau ayant visé des enfants à Annecy


Six personnes, dont quatre enfants, ont été blessées. (photo AFP)

Six personnes, dont quatre enfants de 22 à 36 mois, trois d’entre elles étant entre la vie et la mort, ont été blessées jeudi matin dans un parc proche du lac d’Annecy par un homme de nationalité syrienne armé d’un couteau.

Voilà ce que l’on sait sur cette attaque, dont l’éventuel caractère terroriste est toujours en cours d’évaluation.

Que s’est-il passé ? 

Peu après 9 h 30 aux abords du jardin de l’Europe, un parc très fréquenté situé sur les rives du lac d’Annecy, un homme vêtu d’un short noir, un foulard bleu noué sur la tête, a agressé au couteau un groupe d’enfants âgés de 22 mois à trois ans sur une aire de jeu.

Selon différents témoignages, l’homme a tenté de s’enfuir de l’aire de jeu et a attaqué une personne âgée, avant d’être rapidement interpellé par des policiers, qui ont ouvert le feu.

La police a mis quatre minutes pour interpeller l’auteur de l’attaque. Selon une source policière, un premier appel a été reçu par la salle de commandement d’Annecy à 9 h 41 et il a été interpellé à 9 h 45.

« Courez ! Courez ! »

« La foule, des cris, du sang » : l’attaque au couteau perpétrée jeudi contre des enfants et des adultes aux abords du lac d’Annecy a semé l’effroi dans cette ville d’ordinaire paisible de Haute-Savoie, où témoins et habitants se montraient stupéfaits et anéantis.

« C’est un choc », a confié Kévin Poncin, 27 ans, sur son vélo arrêté à proximité du jardin de l’Europe, non loin de l’esplanade du Pâquier bordant les eaux cristallines du lac, où s’est déroulée cette attaque perpétrée par un réfugié syrien qui a fait six blessés, dont quatre enfants âgés de 22 mois à trois ans.

Dans une vidéo très crue de l’attaque circulant sur les réseaux sociaux, on peut voir l’homme vêtu de noir avec un foulard sur la tête sauter dans une aire de jeux du parc après avoir été pris à partie par un homme muni d’un sac. On le voit poignarder plusieurs enfants, dont deux installés dans un landau à deux places, puis repasser de l’un à l’autre en sautillant. Un homme crie: « Appelez la police! »

L’assaillant finit par être repoussé par une femme qui criait « Au secours ! Arrêtez-le ! Arrêtez-le ! » en tentant de protéger le landau, et par l’homme au sac qui appelle à l’aide les passants : « Aidez-moi à le maîtriser » !.

« Mon enfant de 17 ans y a assisté. Une personne a brandi un couteau et poignardé un bébé dans un landau, c’est ce qu’il a vu, après il a vu la foule, des cris, du sang. Ça n’était pas beau à voir », a rapporté une mère de famille venue chercher son fils à la préfecture. Au début de cette vidéo, on le voit lever les bras au ciel et crier en anglais « au nom de Jésus! », a confirmé une source proche du dossier.

Selon différents témoignages, après avoir fui l’aire, l’homme a attaqué une personne âgée avant d’être interpellé très rapidement par des policiers qui lui ont tiré dessus pour l’immobiliser.

Un employé des pontons au bord du lac d’Annecy a confié au Dauphiné libéré avoir remarqué la présence de l’assaillant sur un banc au bord du lac d’Annecy, chaque jour du matin au soir depuis environ deux mois. Il décrit un homme « qui marmonnait dans sa barbe » mais sans agressivité apparente.

« C’est inhumain. J’ai entendu les cris des parents, puis j’ai vu l’agresseur avec le couteau. C’est là que j’ai compris qu’il se passait quelque chose de grave. Je me suis dit que si je courais j’allais mourir, donc je me suis éloignée en marchant. Dans ces cas-là on n’a que sa survie en tête. Puis il est parti vers la promenade du lac et on a entendu des coups de feu », a notamment témoigné Clémence, lycéenne de 17 ans.

« Je courais au bord du lac, et je vois tout d’un coup des dizaines de personnes qui courent dans le sens contraire de moi. Je me demande ce qu’il se passe, il y a une maman qui me dit ‘Courez! Courez! Il y a quelqu’un qui poignarde tout le monde tout au long du lac, il a poignardé des enfants!’ « , a raconté dans une story Instagram l’ancien footballeur professionnel Anthony Le Tallec.

« Je continue et je vois le mec effectivement qui arrive en face de moi, sur l’herbe. Je vois des flics qui sont à cinq, dix mètres derrière lui, qui n’arrivent pas à l’attraper. Il arrive vers moi, donc je m’écarte. Et je vois qu’il fonce tout droit vers des papys et mamies, et là il attaque le papy, il le poignarde une fois, les flics derrière lui n’arrivent pas à l’attraper. Et moi je leur dis ‘mais tirez-lui dessus, tuez-le !’, il est en train de poignarder tout le monde ! » « Il attaque une fois, deux fois, et là ils commencent à tirer, donc là ils tirent devant moi, sur la personne, donc il tombe à terre, le papy était déjà touché. Moi je continue ma course, et je vois au fond des enfants par terre, très malheureux, des enfants touchés », a encore témoigné le joueur qui a fini sa carrière dans cette ville, ajoutant « C’est fou de voir ça à Annecy ».

« C’est un endroit où tout le monde va, où toutes les animations ont lieu. C’est affolant ce qu’il s’est passé ce matin, c’est vraiment d’une grande cruauté. S’attaquer à des enfants… », a réagi un père de famille de 48 ans sous couvert de l’anonymat. « Ça touche tout le monde. J’espère que les politiques vont préserver une certaine stabilité entre les gens, qu’ils ne vont pas encourager les amalgames et la confusion » envers les étrangers ou français d’origine étrangère, poursuit-il

Rosemonde, Annécienne de 70 ans, s’est, elle, dite « éberluée », anticipant déjà « tout le cinéma (que des responsables politiques) vont nous faire ».

L’auteur présumé 

L’auteur présumé est un homme né en 1991 de nationalité syrienne, Abdalmasih H., qui a vécu pendant dix ans en Suède, où il a obtenu le statut de réfugié.

Selon une source policière, il a été marié à une Suédoise et a eu un enfant de trois ans avec elle. La jeune femme, qui partageait sa vie avec lui jusqu’à l’an dernier dans le sud-ouest de la Suède, a affiché son incrédulité face à l’acte imputé à Abdalmasih H., dont elle a divorcé il y a quelques mois.

« Je ne sais pas ce qu’il lui est arrivé, ce que vous me dites, c’est terrible. Mais je n’ai pas eu de contact avec lui, je ne sais pas où il vit, ni comment il va psychologiquement », a confié l’ex-épouse, sous couvert de l’anonymat. « Lui ? (…) Mon Dieu, il était très gentil, je ne comprends pas », a ajouté la jeune femme en apprenant la nouvelle.

Selon elle, le départ du Syrien, qui s’est décrit comme de religion chrétienne auprès de la police française, est lié au fait qu’il n’a « pas réussi à obtenir la nationalité suédoise ».

« Nous nous sommes rencontrés en Turquie, nous sommes tombés amoureux et nous sommes venus ici (en Suède). Après deux ans, nous nous sommes mariés, mais il n’a pas pu obtenir la nationalité suédoise, donc il a décidé de quitter le pays. Nous nous sommes séparés parce que je ne voulais pas quitter la Suède », a-t-elle confié au téléphone.

Ce départ a eu lieu « il y a huit mois », selon la jeune femme, qui a confirmé qu’il avait obtenu le statut de réfugié en Suède.

Il a introduit sa demande d’asile à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) le 28 novembre 2022. Comme il avait obtenu le statut de réfugié en Suède, sa demande a été refusée.

Abdalmasih H. portait une croix chrétienne quand il a été interpellé. Dans sa demande à l’Ofpra, il se présentait comme un « chrétien de Syrie », selon une source policière.

Du point de vue du droit de l’Union européenne, l’homme était en situation régulière. Il était aussi inconnu des fichiers de police.

Jeudi en début de soirée, l’assaillant présumé se trouvait en garde à vue au commissariat d’Annecy. Il ne présentait aucune blessure grave, selon la procureure.

Le Syrien qui a attaqué au couteau jeudi à Annecy des enfants en bas âge, dont deux ont un pronostic vital engagé, a dit à deux reprises en anglais lors de l’attaque « au nom de Jésus-Christ », peut-on entendre dans une vidéo consultée par l’AFP et confirmée de source proche du dossier.

L’enquête 

Six personnes, dont quatre enfants, ont été blessées. Le pronostic vital est engagé pour deux des enfants et un adulte, selon une source proche du dossier.

Parmi les blessés figurent un jeune Allemand et un jeune Britannique ainsi qu’un homme de 78 ans, légèrement touché.

Une cellule de crise a été installée à la préfecture de Haute-Savoie et les abords du parc ont été bouclés par un important dispositif policier alors que l’attaque a semé l’effroi dans cette ville d’eau habituellement très calme.

En début d’après-midi jeudi, le parquet national antiterroriste (PNAT) ne s’était pas saisi de l’affaire, une évaluation de l’agression étant en cours pour déterminer si elle est de nature terroriste ou pas, selon une source proche du dossier.

Selon la procureure d’Annecy, « aucun mobile terroriste apparent » n’a jusqu’à présent été relevé.