Les représentants de l’archevêché affirment qu’il était envisagé, en août dernier, de créer une nouvelle entité pour reprendre les activités nationales de Caritas. Le projet a rapidement été enterré.
Pourquoi l’archevêché, cofondateur de Caritas Luxembourg, n’a pas cherché à sauver la Fondation, coulée par un détournement de fonds de 61 millions d’euros? Telle est la question centrale posée par les députés de la commission spéciale appelée à retracer la gestion politique et administrative de cette affaire qui a éclaboussé le Grand-Duché en juillet dernier.
Jusqu’à présent, le cardinal Jean-Claude Hollerich s’est montré assez discret. Tout au plus, il a avancé que l’archevêché ne disposait pas des moyens financiers pour sauver seul la Fondation Caritas. De plus, les responsables de la Fondation n’auraient que tardivement pris contact pour évoquer les tenants et aboutissants du détournement de fonds.
Hier matin, un peu plus de lumière a été faite lors de l’audition des représentants de l’archevêché à la Chambre des députés. Le cardinal séjournant à l’étranger, il s’est fait représenter par l’évêque auxiliaire Leo Wagener et l’économe général, Marc Wagener.
Le principal enseignement de l’entrevue est qu’il a été question, en août dernier, de créer, avec le soutien de l’archevêché, une nouvelle entité pour reprendre les activités nationales de Caritas. Le nom choisi : «Caritas NewCo». L’Église était prête à injecter 500 000 euros. Un montant supérieur ne pouvait pas être débloqué, a expliqué hier Leo Wagener, faute de moyens financiers suffisants, y compris en puisant dans les avoirs immobiliers. Les liquidités nécessaires pour mettre sur pied une nouvelle structure étaient bien plus importantes. À lui seul, le montant des salaires des employés de Caritas se chiffrait à cinq millions d’euros pour la période consécutive à la fraude, peut-on lire dans le compte rendu de la réunion, publié sur le site de la Chambre. Un autre frein aurait été l’absence d’un cadre statutaire clair.
Une nouvelle tentative de fraude
Après une réunion avec le comité de crise, le projet «NewCo» a été rapidement écarté. Par la suite, les représentants de l’Église n’ont plus été impliqués dans les travaux visant à trouver une solution. «L’archevêché aurait (…) eu connaissance de la décision de la création d’une nouvelle entité (HUT) par voie de communiqué de presse le 12 septembre 2024. C’était un jour avant une réunion prévue à la Maison épiscopale (…) qui avait été initiée par le cardinal Jean-Claude Hollerich», renseigne la Chambre.
Le fait que l’archevêché n’ait pas été convié à siéger au comité de crise a étonné plusieurs députés, hier. Leo Wagener a conclu que «la volonté (était) de mettre en place un comité restreint composé de personnalités disposant de connaissances en droit ou issues de l’entrepreneuriat privé, notamment afin de prendre des décisions rapidement».
L’évêque auxiliaire a ajouté qu’«il fallait se montrer reconnaissants du fait que les employés (de Caritas) aient largement pu conserver leur emploi au sein de HUT» et que les bénéficiaires de l’aide (sociale) continuent «à recevoir le soutien dont ils ont besoin». Parmi les membres de la commission spéciale, certains élus reprochent, par contre, à l’archevêché une trop grande passivité dans le sauvetage de la Fondation Caritas.
Les activités internationales de Caritas Luxembourg n’ont pas pu être maintenues. Cette décision a fait perdre leur emploi à 30 salariés au Grand-Duché et 70 collaborateurs au Soudan du Sud et au Laos. Un don de l’archevêché, à hauteur de 310 000 euros, a permis de prendre en charge les engagements envers les collaborateurs au Soudan du Sud. L’aide a finalement transité par Caritas Pays-Bas, car, selon l’économe Marc Wagener, une tentative de fraude aurait été lancée pour détourner cet argent.