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Caritas Jeunes & Familles : la direction étrillée par l’OGBL 


«Les délégués restants n’osent pas reprendre le travail, car ils ont peur des conséquences possibles», affirme Smail Suljic. La direction dit que la délégation «travaille et est joignable». 

Le syndicat évoque une «attaque sans précédent». Quatre délégués du personnel ont été écartés, accusés de «faute grave» et de «faux témoignages». La direction riposte en dénonçant des «fausses allégations».

Nous ne voulons pas mener de guerre, mais on se doit de réagir à des attaques sans précédent par une direction contre une délégation du personnel», souligne d’emblée Smail Suljic, le secrétaire central du syndicat santé, services sociaux et éducatifs de l’OGBL. «On est surpris (de voir) avec quelle légèreté et impudence la direction agit», ajoute-t-il.

Quel est le fond de ce clash? Le 22 octobre dernier, lors d’une réunion avec la direction et le conseil d’administration de Caritas Jeunes & Familles (CJF), l’OGBL et la délégation du personnel auraient «discuté» d’une nouvelle répartition du contingent des heures de dispense, légalement accordées à la délégation. La vice-présidente aurait demandé à pouvoir se consacrer à plein temps (40 heures/semaine) au travail de déléguée, et ce, à partir du 1er novembre 2024.

«Lors de son dernier jour de travail dans la crèche où elle officiait, elle a amené un gâteau pour dire au revoir à ses collègues. Elle a remis sa clé à sa chargée de direction et n’était plus prévue dans le planning de travail de la semaine suivante», rapporte Smail Suljic. La vice-présidente se serait aussi vu remettre par le service informatique de CJF un ordinateur et un téléphone portable pour assurer son travail de déléguée à plein temps.

«Une désescalade n’était pas voulue»

Dix jours plus tard, la direction de CJF lui adresse une lettre lui notifiant une mise à pied pour faute grave. Cette mesure «rend immédiatement et définitivement impossible le maintien des relations de travail», renseigne l’Inspection du travail et des mines (ITM) sur son site internet. Le motif invoqué est que l’employée – une mère célibataire de quatre enfants – ne se serait plus présentée à son travail.

«Un des aspects les plus importants d’un contrat de travail stipule que les employés viennent travailler. L’employée concernée n’a pas rempli cette condition simple (…)», se défend la directrice générale de CJF, Carina Gonçalves, dans une lettre adressée au personnel, également envoyée à la presse. Elle y souligne aussi qu’une libération de la déléguée n’aurait pas figuré à l’ordre du jour de la réunion du 22 octobre, accusant l’OGBL d’émettre de «fausses allégations» qui jetteraient «un trouble dans notre atmosphère de travail au sein de CJF».

La direction ne serait en outre pas «concernée» par l’organisation interne de la délégation. Seule obligation : notifier quel délégué bénéficie de combien d’heures de dispense. «Or à aucun moment (jusqu’à la mise à pied) le choix de la vice-présidente comme déléguée complètement libérée n’a été communiqué à la direction», renchérit la directrice générale.

Cette version des faits est farouchement contestée par l’OGBL. Une fois informée de la mise à pied, le syndicat aurait aussi cherché à engager le dialogue avec la direction afin de trouver une solution à l’amiable. «Une désescalade n’était pas voulue. On s’est donc vu dans l’obligation d’introduire un recours devant le tribunal du travail», informe le secrétaire central.

C’est ici que s’ouvre le deuxième chapitre de cette affaire. L’OGBL récolte des témoignages de trois autres délégués présents à la réunion du 22 octobre 2024, en l’occurrence le président de la délégation, le délégué à la sécurité et un autre membre effectif. «Ils ont signé une attestation testimoniale pour confirmer que la dispense de 40 h avait bien été évoquée», indique Smail Suljic. User de «droit démocratique fondamental» aurait toutefois été considéré comme un comportement «déloyal» envers la direction et le personnel. La conséquence : trois nouvelles mises à pied, motivées par de présumés «faux témoignages».

Privés de salaire au bout de trois mois

«Malheureusement, trois autres membres de la délégation (…) se sont mis dans une situation très délicate. Ils ont essayé d’influencer la procédure judiciaire (…) en présentant de faux témoignages – témoignages d’ailleurs non cohérents (…)», avance la directrice de CJF.

La mobilisation syndicale est aujourd’hui lancée. Des militants ont fait la tournée des plus de 40 crèches, maisons relais et foyers gérés par CJF. «Les retours obtenus sont quasiment unanimes. Bon nombre d’employés nous ont dit que l’ambiance était loin d’être idéale. Les méthodes de la direction sont connues», relate Smail Suljic.

Les 700 employés ne disposeraient désormais plus de délégation qui fonctionne. «C’était clairement le but de la direction», accuse le syndicaliste. Carina Gonçalves affirme par contre que la délégation «travaille et est joignable». «C’est faux. Les délégués restants n’osent pas reprendre le travail, car ils ont peur des conséquences possibles», répond Smail Suljic.

La directrice a aussi affirmé, hier matin sur les ondes de 100,7, que les délégués écartés continueraient à toucher leur salaire. «C’est également faux. Trois mois après la mise à pied, leur salaire est suspendu.»

L’OGBL se dit toutefois disposé à renouer le dialogue.