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Budget : les pensions inquiètent


La Chambre de commerce propose «un ajustement graduel des pensions nouvelles à l'évolution de la longévité, afin d'intégrer de façon "douce" et objective une contrainte budgétaire (...) incontournable.» (illustration Fabrizio Pizzolante)

Le gouvernement a prévenu qu’il ne toucherait pas au régime des pensions. Restera-t-il sourd aux avertissements lancés de toutes parts et mardi encore par la Chambre de commerce et la Cour des comptes ?

Si le projet de budget est largement dans les clous par rapport aux critères européens de stabilité financière, ce sont les moyen et long termes qui inquiètent les analystes. Le régime des pensions est toujours le premier mal cité et pas seulement par le patronat. La Chambre de commerce y consacre un court chapitre, sans doute lasse d’alerter sur la soutenabilité incertaine du système, alors que la Cour des comptes y rajoute une couche franche.

La situation décrite comme confortable avec un matelas de 18 milliards d’euros risque de se dégrader plus vite qu’on ne pense et la Cour des comptes pointe la fragilité du régime général d’assurance pension à politique inchangée. Si les réserves gonflent, c’est grâce à la main-d’œuvre frontalière et migratoire qui vient occuper les emplois qui ne cessent d’être créés. Or, depuis quelques années déjà, le taux de croissance des dépenses de pension dépasse celui des recettes en cotisation, souligne la Cour des comptes, sans rien révéler de nouveau. «Le régime général deviendrait déficitaire dès 2023 et les réserves accumulées seraient épuisées en 2043», poursuit-elle.

Le scénario de base retenu par le gouvernement table sur un doublement de la population d’ici 2060, mais ce chiffre a été revu à la baisse et la population ne devrait pas dépasser le million d’habitants. Si ces prévisions venaient à se concrétiser, cela risquerait d’accélérer le déséquilibre du régime, avertit la Cour des comptes.

C’est alors la dette qui gonflerait. Depuis la crise économique, ce sont les comptes sociaux qui permettent à l’administration publique de dégager des excédents, mais à politique inchangée «les surplus de la sécurité sociale sont voués à se muer progressivement en déficits structurels occasionnés principalement par le régime général de pension». De quoi alourdir la dette.

Fonte annoncée en 2020

La réforme de 2012 était un bon début, mais le régime des pensions a besoin d’un tour de vis supplémentaire. «La Cour ne saurait qu’encourager nos gouvernants à plancher dès à présent sur une nouvelle réforme plus profonde et les invite à ne pas céder à la procrastination en se reposant sur la bonne santé présumée de la situation financière actuelle du régime général d’assurance pension afin de ne pas hypothéquer les pensions des générations futures», conclut la Cour des comptes sur le sujet.

La Chambre de commerce relève que la sécurité sociale afficherait sans discontinuer des surplus au cours de la période 2017-2021, mais l’excédent passerait de 1,9% du PIB en 2017 à 1,4% en 2021.

«Ce déclin serait principalement le reflet d’une augmentation très marquée des dépenses du régime général de pension», analyse à son tour la Chambre de commerce. Selon le bilan technique du régime général de pension publié en décembre 2016 par l’IGSS, les réserves de pension exprimées en pourcentage du PIB devraient commencer à fondre vers 2020, rappellent les auteurs de l’avis. «Elles auraient disparu peu de temps après 2040», lâche la chambre professionnelle en soulignant que cette échéance n’est pas loin.

La solution ? La Chambre de commerce propose «un ajustement graduel des pensions nouvelles à l’évolution de la longévité, afin d’intégrer de façon « douce » et objective une contrainte budgétaire qui paraît de toute manière incontournable, tout en visant explicitement et non comme un simple « vœu pieux » le maintien des droits à pension totaux – sur un cycle de vie – des générations présentes et futures».

Cette perspective paraît plus sage que d’augmenter la dette. D’ailleurs, si les autorités publiques se félicitent de la stabilisation de la dette en pourcentage du PIB, note la Chambre de commerce, elle rappelle que la dette publique progresserait, en montants absolus, de 10% de 2017 à 2021, soit 1,3 milliard d’euros. «Le ratio d’endettement ne paraît donc sous contrôle qu’à la faveur d’une sensible hausse du PIB nominal et nullement parce que l’endettement à proprement parler serait structurellement endigué», rectifie la Chambre de commerce à l’adresse du gouvernement.

Geneviève Montaigu