Les dirigeants de l’UE s’apprêtent à faire un geste vendredi envers la Première ministre britannique Theresa May, sous pression au Royaume-Uni pour faire avancer les négociations sur le Brexit, au deuxième jour d’un sommet à Bruxelles.
Ils vont entériner sans surprise en fin de matinée l’absence de « progrès suffisants » dans les négociations du divorce, commencées en juin, dans trois dossiers prioritaires: le droit des citoyens expatriés, l’Irlande et sa frontière, et le règlement financier.
« Nous allons examiner l’état des négociations et je ne pense pas qu’il y aura de miracle » pour les débloquer, a dit vendredi matin devant la presse le président de la Commission européen Jean-Claude Juncker.
Les dirigeants des 27 pays qui resteront dans l’UE vont donc confirmer qu’ils refusent d’entamer à ce stade les tractations commerciales pour la période qui suivra le Brexit, que Londres voudrait commencer sans tarder.
Mais ils prévoient, selon un projet de conclusions vu par l’AFP, d’entamer des « discussions préparatoires » internes sur la future relation et une phase de transition après la date officielle du Brexit, le 29 mars 2019, suggérée par Theresa May.
‘Gagner du temps’
Cela permettra de « gagner du temps », assure une source européenne. « L’idée est que les dirigeants soient prêts à décider en décembre un mandat de négociations (pour une deuxième phase de discussions, ndlr), si des progrès suffisants sont alors constatés », a-t-elle précisé.
« Tous les Etats sont loyaux, derrière Michel Barnier », le négociateur en chef de l’UE, a assuré le chancelier autrichien Christian Kern, soucieux comme ses homologues d’afficher l’unité des 27.
Face à des négociations enlisées, l’inquiétude grandit de les voir s’achever sans aboutir à un accord de retrait. Mais la chancelière allemande Angela Merkel a estimé qu’il n’y avait « aucune indication » d’un échec à venir.
« Contrairement à ce qui est parfois écrit dans la presse britannique, ce processus avance pas à pas », a commenté Mme Merkel. « Qu’il s’étire encore sur deux ou trois semaines supplémentaires ne nous empêche pas de travailler dur pour atteindre la deuxième phase », a expliqué la chancelière.
Le président du Conseil européen Donald Tusk a rencontré en tête-à-tête vendredi matin Mme May, qui doit s’éclipser dans la matinée pour laisser les 27 se concerter entre eux.
La Première ministre britannique, sous pression à domicile, a plaidé jeudi soir pour trouver avec ses collègues un accord « que nous pouvons soutenir et défendre devant nos concitoyens ».
Donald Tusk a d’ores et déjà renvoyé au prochain sommet européen de décembre la décision sur le passage à la prochaine phase des discussions, à condition toutefois d’obtenir des propositions « plus concrètes » de la part des Britanniques.
Theresa May « espère que dans les temps qui viennent nous puissions arriver à de nouvelles décisions, mais (elle n’a pas fait) de nouvelles propositions. Je ne m’y attendais d’ailleurs, mais cela doit se concrétiser dans les semaines en amont (du Conseil européen) de décembre », a résumé le Premier ministre néerlandais Mark Rutte.
Son homologue lituanienne Dalia Grybrauskaite a quant à elle exhorté à tenir « de vraies négociations, pas seulement en rhétorique dans les médias ».
Nouvelles méthodes
Avant de se lancer dans leurs discussions sur le Brexit, les dirigeants se sont penchés vendredi matin à 27 sur les nouvelles méthodes de travail proposées M. Tusk pour dépoussiérer l’exercice des sommets européens.
M. Tusk a tracé une feuille de route pour les deux prochaines années, incluant un programme de 13 sommets pour donner un nouveau souffle à l’UE après le choc du Brexit, en profitant de la nouvelle impulsion pro-européenne de la France d’Emmanuel Macron.
Certaines discussions pourraient avoir lieu à 28 en incluant le Royaume-Uni, ou à 27, « en fonction du sujet » abordé, propose M. Tusk, qui veut que les dirigeants européens ne se contentent plus d’afficher leurs consensus lors des sommets.
M. Tusk entend également faire évoluer la méthode de travail en remplaçant l’approche traditionnelle de recherche du consensus par celle de discussions affichant clairement les désaccords.
La nouvelle méthode « rapportera nos différences, décrivant précisément sur quoi porte le conflit pour nous permettre de tenir des discussions politiques sérieuses », a-t-il plaidé avant le sommet.
Le Quotidien / AFP