Jos Steil et le prince Jean s’invitent dans les débats. Les avocats lancent des lignes à la mer et se plaignent de différences de traitement. Sans oublier l’arlésienne, Ben Geiben.
Stebens, Bücheler, Weydert et leurs avocats d’un côté, Pierre Reuland et Me Assa de l’autre. Dans son dos, à un banc d’écart, les deux prévenus dans le procès principal. La dixième audience de ce procès bis peut commencer. Me Pierret a une remarque surprenante sur le cœur et la partage avec l’audience.
«Je trouve scandaleux que deux suspects dans l’affaire aient des rendez-vous avec le juge d’instruction et le procureur de l’époque et qu’après ces entrevues, on n’entende plus parler d’eux au niveau judiciaire.» L’avocat de Guy Stebens fait référence à Ben Geiben et au prince Jean, le frère du Grand-Duc Henri. «Nos clients, qui n’ont absolument rien à voir avec l’affaire, attendent depuis onze ans de s’en sortir. Je ne les accuse pas d’être les Bommeleeër, mais je pense que les deux suspects ont eu droit à un traitement préférentiel. Nous aurions tous aimé l’avoir.»
Leurs fonctions de l’époque ne les ont pas protégées. Me Harpes a regretté que son père, Aloyse, 97 ans et absent au procès, «un officier décoré» soit «accusé d’entrave à la justice», «de complicité avec un poseur de bombes» et «de minimiser son rôle de l’époque» pour masquer des informations.
Comme l’identité du ou des poseur(s) de bombes qui ont sévi dans les années 1980 au Luxembourg, par exemple. Un mystère encore bien entretenu quarante ans plus tard. Grâce aux problèmes de mémoire des témoins de l’époque, selon la thèse du ministère public. Dont Aloyse Harpes, ancien commandant de la gendarmerie de 1985 jusqu’à sa retraite en 1988 qui a créé le groupe d’enquête mixte pour élucider les attentats.
«Il avait 60 ans. Pendant l’instruction de l’affaire, il en avait 85 et on a exigé de lui qu’il reconstitue chaque détail», se plaint son fils. Aloyse Harpes n’aurait pas tout noté, il y avait d’autres affaires criminelles tout aussi importantes. «L’affaire Bommeleeër n’était pas l’affaire criminelle du siècle, il y avait d’autres affaires en parallèle : la bande de Waldbillig et le meurtre d’un policier, l’affaire du Geesseknäpchen noyé sous la drogue, l’affaire Peiffer…», cite l’avocat. «Même le procureur Robert Biewer évoquait des crimes de sang plus importants. Dans ce contexte, un pylône de Cegedel écroulé, ce n’est pas grand-chose.»
La mémoire progressivement diminuée de son père, des enquêtes prioritaires plus urgentes que les attentats à l’époque, la violation du droit au silence et un réquisitoire très faible sont autant d’arguments avancés par Me Harpes pour tenter de disculper son père. «Je n’ai pas trouvé d’accusation dans le réquisitoire, pas un élément constitutif, pas de point d’ancrage», note-t-il. «Où est le faux témoignage?»
«Nul, aucune substance!»
Il critique ensuite l’enquête et relance la piste Steil, protégé de Charles Bourg, l’adjoint d’Aloyse Harpes et ami de Geiben. Et décédé en 2004. Selon l’avocat, l’observation devait être une action spontanée de Jos Steil, adjudant et sous-chef de la brigade mobile. idem pour l’interruption de l’enquête. Toute l’observation se serait passée sans que son père n’en ait donné l’ordre et n’ait été informé de son abandon. «Il n’est pas le champion du monde des environs qui a tout organisé.»
Prêt à tout pour disculper son père, pendant plus de deux heures, il écarte un reproche de faux témoignage après l’autre. «Faux témoignage? Nul, aucune substance!», lance l’avocat en soulignant la performance de l’octogénaire à la barre lors du procès principal. «Il a essayé d’apporter des réponses. Quand il n’en avait pas, il s’est tu.»
La représentante du parquet n’aurait pas de preuve d’une intention malsaine dans le chef d’Aloyse Harpes. Son fils critique sa logique de se baser sur des suppositions et d’estimer que les prévenus n’ont pas de repentir pour les priver de sursis. «Un repentir pourquoi? S’ils ne savent pas qui est le Bommeleeër, ils ne peuvent pas l’inventer.»
Faute de lien avec les faits concernant les deux présumés poseurs de bombes, l’avocat réclame l’acquittement de son père. Guillaume Bücheler, à son tour, espère pouvoir terminer ses jours libéré du poids de l’affaire Bommeleeër. «18 mois de prison, est-ce ma récompense pour quarante ans de service sans accrocs», indique celui qui se défend sans avocat. «Mes propos n’ont eu aucune incidence sur le procès principal. Je n’ai témoigné ni en leur faveur ni en leur défaveur.»
Le procès se poursuit cet après-midi avec la plaidoirie de Me Entringer.
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