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Blessée par balle à Fentange : le parquet requiert une interdiction de chasse de 5 ans


Selon l'expert, c'est un tir dévié qui a terminé dans la mâchoire de la victime installée sur une terrasse à Fentange le 24 septembre 2016. (Photo : archives lq/Hervé Montaigu)

Mercredi après-midi, le parquet a également requis 5 000 euros d’amende contre le chasseur qui avait grièvement blessé au visage une femme installée sur une terrasse à Fentange fin septembre 2016.

« Le tir en direction du sanglier était dangereux, car en raison de la topographie des lieux, il était quasiment impossible d’arrêter la balle en l’enfouissant avec certitude dans le sol.» La phrase aura retenti plus d’une fois au cours des débats ces deux derniers jours. À l’aide de nombreux graphiques et calculs, l’expert a étayé mercredi après-midi sa conclusion.

C’est un tir dévié qui a touché la victime installée sur la terrasse d’une résidence à Fentange, le 24 septembre 2016 en fin d’aprèsmidi. La balle aurait ricoché sur le sol sableux à 150 m du chasseur. Là elle aurait pris une nouvelle trajectoire pour terminer dans la joue droite de la quadragénaire. Une simple variation de l’angle du tir et cet accident de chasse aurait pu avoir bien d’autres conséquences. Si la victime a été touchée à 569 m de distance, la portée du type de balle employé par le chasseur est de 2 800 mètres.

«C’était un samedi après-midi. Il faisait beau. Vous auriez pu toucher des promeneurs, des cyclistes, des joggeurs, des personnes se rendant au cimetière de Fentange ou encore des piétons dans la rue Armand-Rausch…», a tenté d’inculquer au prévenu le substitut principal Laurent Seck. Pour le représentant du parquet, ce qu’a fait le chasseur était «mortellement dangereux » : «Il est chasseur depuis 1985. Il devait savoir quelle distance une balle peut parcourir et le dommage qu’elle peut causer!»

À la barre quelques instants plus tôt, le prévenu de 51 ans avait campé sur sa position. Selon lui, au moment où il a tiré, il y avait une butte d’au moins un mètre derrière le sanglier qui aurait permis d’«enterrer » la balle. «Si l’expert ingénieur conclut que le tir était dangereux, le chasseur n’a pas automatiquement fait une erreur. Son tir a été dévié», a renchéri Me Marc Lentz. D’après l’avocat, impossible de reprocher au prévenu la moindre imprudence ou négligence. Aucun texte ne définirait clairement les règles de sécurité sur la manière dont le chasseur doit «enterrer» sa balle. Son client aurait pris toutes les précautions qu’il connaissait. Voilà pourquoi il serait à acquitter.

« Monsieur constitue toujours un danger aujourd’hui »

Le parquetier a bondi en citant l’exemple du code de la route : «Là non plus, ce n’est pas écrit qu’on n’a pas le droit d’écraser un cycliste ou de foncer dans un arbre. Mais c’est une question de bon sens.» Et d’insister: «Une balle pour tuer un sanglier est aussi mortelle pour l’homme. Si on n’est pas capable de voir où va la balle, il ne faut pas tirer.» «Excusez-moi, Madame, pour ce qui s’est passé», a dit le prévenu en se retournant vers la victime mercredi après-midi. Pour le parquet, ce ne sont que des regrets exprimés à demi-mot. Il a aussi pointé l’attitude du prévenu : pendant plus de deux ans, il aurait fait des pieds et des mains pour se défendre et parlé d’une théorie du complot. C’est seulement mardi à l’ouverture de son procès qu’il a arrêté de contester qu’il était l’auteur du tir qui a grièvement blessé la victime.

«Pour moi, Monsieur constitue toujours un danger aujourd’hui», a conclu le substitut principal. Il a fini par réclamer contre le chasseur l’interdiction du droit d’exercer la chasse pendant une durée de cinq ans et une amende de 5 000 euros. Soit la peine maximale possible. Selon la logique du parquet, l’interdiction de chasse devrait remplacer la peine de prison prévue pour l’infraction des coups et blessures involontaires (jusqu’à deux mois de prison).

À noter que la loi de 2011 relative à la chasse ne prévoit aucune peine si l’on tire sur un homme. La seule disposition pénale qui y figure c’est si on tire sur un animal qui n’est pas classé comme gibier. Dans ce cas, le tireur encourt jusqu’à six mois de prison et une amende. La victime, qui a subi une série d’opérations, s’est constituée partie civile. Elle réclame autour de 19 000 euros de dommages et intérêts et une expertise médicale pour évaluer le préjudice exact. En attendant, elle demande une provision de 20 000 euros. Enfin, elle réclame une indemnité de procédure de 4 000 euros La 13e chambre correctionnelle rendra son jugement le 4 avril.

Fabienne Armborst