Depuis 2022, la bibliothèque ukrainienne installée au Rollingergrund permet aux réfugiés chassés par la guerre de garder un lien avec leur pays.
C’est un petit bout d’Ukraine en plein Luxembourg. Sur le site du centre culturel Rollingergrund, dans la capitale, l’ASBL LUkraine accueille la diaspora du pays depuis 2014 et l’annexion de la Crimée par la Russie. Avec l’invasion du pays en 2022, le nombre de réfugiés n’a cessé d’augmenter, rendant la mission de l’association toujours plus nécessaire. Mais si accompagner les exilés dans leurs démarches administratives et les aider à s’installer dans un pays complètement inconnu est essentiel, ces derniers peuvent avoir d’autres besoins.
Garder un lien avec leur pays, continuer à s’informer sur son actualité, préserver sa culture et son identité… est tout aussi important quand on doit s’exiler à plusieurs milliers de kilomètres. Au début de l’été 2022, l’association a donc créé une bibliothèque ukrainienne au sein de ses locaux grâce au soutien de la Ville de Luxembourg.
Administrée par Mariya Kolesnyk, la bibliothèque accueille tous les Ukrainiens qui souhaitent renouer avec leur pays et cherchent une aide pour traverser ces épreuves. «Au début, c’était surtout un endroit où les gens venaient chercher un soutien psychologique. Beaucoup étaient détruits à cause de la guerre après avoir perdu tout ce qu’ils avaient.» Certains se sentaient aussi coupables d’avoir laissé leur famille là-bas, des pères, des oncles restés pour combattre la Russie, mais également tous ceux qui n’avaient pas pu partir. Au fur et à mesure de l’enlisement de la situation, la bibliothèque est devenue un endroit culturel et éducatif.

La bibliothèque accueille de nombreux enfants, notamment pour les aider à apprendre l’ukrainien. (Photo julien garroy)
Elle accueille aujourd’hui beaucoup d’enfants et d’adolescents qui peuvent ainsi découvrir la littérature de leur pays, mais également continuer à en apprendre la langue. «Généralement, les enfants arrivés au Luxembourg vont à l’école locale ou internationale et apprennent le luxembourgeois, le français ou l’allemand», précise Mariya Kolesnyk.
Pas facile dans ces conditions de maîtriser l’ukrainien même en continuant de le parler à la maison. La bibliothèque propose donc aussi des livres d’apprentissage. «Ici, ils peuvent apprendre leur langue natale.» Elle accueille aussi régulièrement l’école ukrainienne Mriya de Luxembourg et ses 125 enfants.
«Faire face à la propagande russe»
Mais les plus jeunes ne sont évidemment pas le seul public. Avec environ 3 000 livres sur ses étagères, la bibliothèque ukrainienne a attiré près de 600 lecteurs depuis son ouverture. Elle propose aussi beaucoup de livres européens traduits en ukrainien pour les personnes qui ont envie de découvrir la culture locale. «Cela les aide dans leur intégration.»
De nombreux livres politiques ou traitant de l’actualité ukrainienne sont également disponibles. «Cela permet de faire face à la propagande russe en donnant d’autres sources d’informations.» Une alternative particulièrement utile pour les plus jeunes, qui s’informent en grande partie sur les réseaux sociaux gangrénés par la désinformation venue de Russie.

La bibliothèque propose environ 3 000 références, achetées en Ukraine et ramenées au Luxembourg. (Photo julien garroy)
Beaucoup de gens, fatigués émotionnellement, cherchent aussi à se protéger du flux d’actualité angoissante qui défile sur leurs téléphones. «Ils veulent lire quelque chose de léger.» Les adolescents, quant à eux, n’ont pas des goûts bien différents de leurs camarades européens et privilégient les romans fantastiques et d’action. La littérature ukrainienne, tant classique que plus actuelle, occupe bien sûr une place prépondérante dans les rayonnages. «En ce moment, il y a beaucoup de nouveautés en Ukraine, explique Mariya. Il y a une explosion culturelle et on essaye d’avoir les nouveautés.»
Pour s’alimenter en nouveaux ouvrages, la bibliothèque peut compter sur LUkraine ASBL, mais aussi sur l’Association luxembourgeoise des bibliothécaires, archivistes et documentalistes. «Nous sommes obligés de les acheter en Ukraine, puis de les rapporter ici». Mais sa mission ne s’arrête pas à simplement proposer des livres.
Mariya tente aussi d’organiser régulièrement des événements en invitant des auteurs ukrainiens. Une autre manière encore de défendre l’identité de son pays, de créer un pont avec la culture luxembourgeoise et d’aider ses compatriotes à relever la tête face à cette épreuve.

La bibliothèque propose environ 3 000 références, achetées en Ukraine et ramenées au Luxembourg. (Photo julien garroy)