Gilles Bettmer arrête sa carrière. Retour vers le passé avec cet ancien petit prince d’un football luxembourgeois en reconquête, un peu après 2005…
Gilles Bettmer s’arrête et ce n’est pas n’importe qui que perd le football luxembourgeois. Mais celui qui fut longtemps considéré comme le futur petit prodige de la sélection nationale, avec laquelle il a commencé à 16 ans et 229 jours, dépassé seulement en termes de précocité depuis par Vincent Thill, à qui il avait donné ce conseil à ses débuts, il y a sept ans :
«Au début, ça fait mal, tu ne dois pas te plaindre, il ne faut montrer ni de la faiblesse ni de la peur. Tu prends un coup ? Tu te relèves et tu fermes ta gueule ! Tu es peut-être un gamin qui joue à l’étranger, tu restes un gamin quand même.» Bettmer, c’est un titre en Bundesliga U19, des débuts avec Miralem Pjanic, des campagnes européennes et une joie de vivre qui lui a peut-être coûté une plus grande carrière. Mais il n’a visiblement aucun regret. Et a encore un rêve…
Pourquoi est-ce que vous arrêtez ?
Gilles Bettmer : Déjà, j’avais promis à ma copine en signant à Käerjeng que je faisais encore trois ans et que c’était fini. Après… c’est comme ça, c’est la vie : on devient vieux, et puis, il y a la famille. Moi, si tu regardes ma saison, j’ai passé la plupart du temps blessé et ça ne sert plus à rien de continuer. Et puis, il y a mon fils, qui a 5 ans maintenant et qui comprend bien que son père n’est jamais à la maison. Il a commencé le foot – mais il est droitier, lui – à Sanem, sous les ordres de Kim Kintziger, dont le fils joue aussi là.
La saison passée, c’est votre grand pote, Ben Payal, qui s’est arrêté. Vous aviez commencé ensemble en sélection. Cela vous avait fichu un coup ?
Bah, pas longtemps après, on s’était vus pour manger ensemble au restaurant et on n’avait quasiment pas parlé de football!
Mon fils commence le foot à Sanem avec Kim Kintziger comme coach
Tous les deux, avez-vous commencé trop jeunes pour espérer durer plus longtemps?
Oui, on était jeunes. J’ai quand même 18 ans de carrière derrière moi et j’ai vu le monde.
Le monde pro notamment. Assez à votre goût?
Oh, le monde pro, ça m’a un peu déçu. La façon dont cela s’est passé, avec notre relégation à Trèves (NDLR : en 2010), ça ne m’avait pas plu. Notamment le fait que le coach avait été viré après seulement deux matches. Pourtant, Mario Basler, c’était un super gars, un coach génial qui nous faisait toujours nous entraîner avec ballon. Il était un peu fou et il m’aimait bien.
Pas de regret de ne pas avoir fait « mieux », alors que vous aviez remporté le titre de champion d’Allemagne U19 avec Fribourg, en 2008, avec le brassard de capitaine sur le bras?
Non, pas de regret. J’ai eu ma carrière. Et puis, Fribourg, j’y étais parti à 15 ans et j’avais envie de revoir mon pays, mes amis. Je voulais revenir chez moi.
Vous aviez à l’époque laissé un autre grand pote de chambrée faire une très belle carrière : Ömer Toprak (ex-Leverkusen, Dortmund et Werder Brême)…
On s’est un peu perdus de vue. On s’envoie des messages pour les anniversaires, ce genre de choses. Mais on n’a plus trop de contacts.
Moins qu’avec Miralem Pjanic, avec qui vous aviez disputé l’Euro-2006 au Luxembourg…
(Il rit) On avait d’ailleurs bien perdu contre l’Espagne! (NDLR : 7-1). Mais je me souviens bien du but de Mire. C’est là qu’on avait tout de suite vu, sur cette fantastique volée, que c’était un futur crack.
Moi je suis revenu au Luxembourg, et là, c’était terminé
On se posait aussi la question pour Gilles Bettmer.
Moi, ce n’était pas le cas. Moi, je suis revenu au Luxembourg et là… c’était terminé. À Dardari (NDLR : Aiman Dardari, U19), d’ailleurs, qui vient de gagner le titre en Bundesliga avec Mayence en marquant le but décisif, je conseillerais de rester en Allemagne, d’y poursuivre sa formation. Et d’y croire jusqu’au bout.
Quel goût a-t-elle cette dernière saison de DN?
C’est grave de finir comme ça, la plupart du temps blessé. Et puis, il y a aussi notre position au classement… Mais la saison n’est pas finie. Déjà, j’espère pouvoir être sur le banc lors du dernier match (NDLR : à Wiltz) et j’espère qu’on aura un match de barrage à disputer. Parce que rester en BGL Ligue, ça, ce serait une belle fin! Avec beaucoup de monde au bord du terrain pour voir ça! Mais bon, j’ai eu de belles années. La plus belle, c’était celle de la saison passée, la montée avec Käerjeng, à cause de l’ambiance dans le club. Mais si je recherche les bons souvenirs, il y en a deux qui reviennent instantanément : la victoire en Suisse (NDLR : en septembre 2008, 1-2), et puis ce match de Coupe d’Europe contre le Paris Saint-Germain au Parc des Princes (NDLR : avec le FCD03, le 25 août 2011, 2-0). Peu de gens ont fait ça.
La suite? Fini le football?
Oh, je reste au club. En équipe 3. Pourquoi en équipe 3? Parce qu’on n’y a plus d’entraînement : tu viens juste le vendredi soir, tu joues, puis tu vas manger avec les copains. C’est comme une équipe du troisième âge (il rit). Vous savez moi, de toute façon, je n’ai jamais aimé courir, et ça n’a pas changé! Par contre, je ne sais pas si j’arrête définitivement. Si je ne referai pas quelque chose. Peut-être que ça me manquera…