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[BGL Ligue] Au Swift, «aujourd’hui, on n’est pas prêts à gagner»


Deux grosses semaines après son arrivée à Hesperange et à moins de deux semaines de la reprise de la BGL Ligue, l’entraîneur Français Emmanuel Da Costa ne s’en cache pas : le Swift est «dans l’urgence, dans tous les sens du terme».

À bientôt 47 ans (il les fêtera le 3 septembre) et après 15 saisons à entraîner dans son pays natal, le Français Emmanuel Da Costa a estimé cet été que c’était «le bon moment pour découvrir de nouveaux horizons». Horizons qui ont pour noms la BGL Ligue et le Swift, où l’ancien adjoint de Laurent Battles à l’AS Saint-Étienne en Ligue (juillet 2022-décembre 2023) s’est engagé pour deux ans et renoue, depuis deux semaines, avec un rôle d’entraîneur principal qu’il a notamment longuement exercé à Quevilly-Rouen (2013-2020), montée en Ligue 2 en 2017 à la clé. Entretien avec un technicien exigeant et ambitieux, malgré l’ampleur du chantier qu’il entame à Hesperange.

L’effectif du Swift est passé de 40 à 30 joueurs, en comptant les jeunes. Était-ce un préalable à votre venue ?

Emmanuel Da Costa : C’était capital et primordial. Je casse les pieds à ma direction pour réduire encore, malgré le fait que j’attends des renforts. Mais on ne peut pas travailler avec pertinence avec un groupe de 40 à 45 joueurs. Avoir 22, 23 joueurs plus trois gardiens, ça me paraît cohérent.

Beaucoup d’entraîneurs aiment être accompagnés d’adjoints lorsqu’ils rejoignent un nouveau club. Venir seul n’est pas un problème pour vous ?

Non, ce n’en est pas un. Quand vous arrivez, comme moi, dans un contexte que vous ne maîtrisez pas à 100 %, vous perdez du temps si vous n’avez pas des gens du cru qui connaissent le club par cœur comme « Hako«  (Hakim Menaï). J’ai pris mes renseignements, je savais où je mettais les pieds avec le staff, avec Hako, Luc (Duville, coach des gardiens), et on a aussi récupéré Hugo Cabouret (préparateur physique, ex-Jeunesse et RFCU notamment) que je connais très bien et dont j’ai validé le profil. Donc j’arrive seul sans arriver seul.

Comment jugez-vous la préparation, en termes de programme ? Affronter des équipes assez fortes d’entrée vous convenait-il ?

Pas du tout. Depuis mon arrivée, il y a un peu plus de 15 jours, je suis dans l’adaptation totale, sauf depuis mardi. Maintenant, ça suffit : on va commencer à travailler avec mes idées, pas celles des autres. C’est une préparation très complexe, je n’aurais pas calé ce genre de matches (défaites 3-1 contre Elversberg et 5-1 contre Darmstadt, des clubs de D2 allemande), je n’aurais pas calé la reprise à cette date-là ni comme elle a eu lieu au tout début. Je ne dis pas que ce n’est pas bien, ce qu’ils ont fait, mais en tous les cas ça ne me convient pas.

Quel est le mot d’ordre, pour les deux semaines précédant la reprise ? 

Urgence. Dans tous les sens du terme. On est dans l’urgence, et j’espère que les gens en sont bien conscients. Même si les joueurs travaillent bien, répondent à ce que je leur propose, il y a beaucoup d’exigence dans mon travail et c’est difficile pour eux aujourd’hui d’atteindre ce degré d’exigence, cette rigueur et cette discipline, indéniables si on veut faire de belles choses. On est en retard sur beaucoup de choses, sur l’aspect tactique, le projet de jeu, la préparation physique et bien évidemment la constitution de l’effectif. C’est le point le plus important.

J’ai laissé ma famille à 800 kilomètres donc si je viens ici, c’est pour gagner, tout simplement

Dans ces conditions, quels sont vos objectifs, au moins pour les premières semaines de championnat ?

J’ai laissé mes enfants et toute ma petite famille à 800 kilomètres donc si je viens ici, c’est pour gagner, tout simplement. Maintenant, il faut aussi prendre du recul et être objectif : aujourd’hui, on n’est pas prêts à gagner. Le chantier est énorme, on part presque d’une page blanche et je peux vous dire que les journées sont très courtes en ce moment. On est dans l’urgence dans beaucoup de choses, d’ailleurs si j’ai encore annulé un match cette semaine, c’est que nos premiers matches étaient arrivés à un moment où on n’était pas capables de les jouer. Donc il faut être aussi prudent par rapport à ça.

Le fait de ne pas avoir joué la Coupe d’Europe est donc une bonne chose ?

Vu ce qui se passe aujourd’hui, oui, mais si on avait la chance d’être en Coupe d’Europe, l’attractivité du club aurait été plus importante et peut-être qu’on aurait eu des signatures plus rapidement. J’étais encore hier soir à minuit au téléphone (NDLR : entretien réalisé samedi) avec deux joueurs pour les convaincre, parce qu’il y avait de la concurrence, et que les Français sont toujours un peu dubitatifs au sujet du Luxembourg et veulent avoir le plus de renseignements. Il faut convaincre, activer les leviers pour les attirer, mais ça fait partie de mon job. Il nous manque un peu de tout, encore, mais l’urgence aujourd’hui, ce sont des joueurs offensifs.

En matière de recrutement, dans quelle mesure avez-vous été impliqué sur les premières signatures ?

Je suis arrivé très tard et lorsqu’il n’était pas question que je signe, évidemment qu’ils ne me demandaient pas mon avis. Aujourd’hui que je suis là et qu’on accélère dans tous les sens du terme, tous les profils qui arriveront seront validés par le coach. C’est très clair avec la direction : ils ont bien compris que le coach veut travailler avec ses profils à lui, en mettant en place sa philosophie et ses principes.

Envisagez-vous de créer un loft, si vous ne parvenez pas à réduire suffisamment l’effectif ?

Non, car il faut respecter les gens, être dans l’humain. C’est la base de mon métier d’avoir des relations avec mes joueurs. Je suis très dur avec eux, ils peuvent en témoigner, mais je suis le premier à la défendre et les « chérir« . Il n’y aura pas de loft avec moi, on s’adaptera. Je ne laisserai jamais quelqu’un sur le bord de la route. Ce n’est pas ma philosophie.

Comment définiriez-vous votre philosophie ?

J’ai vécu des saisons très sympas, d’autres difficiles, mais toujours avec des contenus plutôt intéressants. Après, c’est le talent des joueurs qui fait la différence, c’est pour ça qu’il ne faut pas qu’on se trompe sur les recrutements, mais j’aime que mes équipes produisent du jeu, aient un jeu offensif avec des prises de risque intéressantes. Mais il faut aussi s’adapter à l’effectif que vous avez.

Il n’y aura pas de loft avec moi, on s’adaptera. Je ne laisserai jamais quelqu’un sur le bord de la route

Quel est votre regard sur la règle des « Première licence » ?

Ça ne me dérange pas trop, contrairement à ce que je peux entendre. Je trouve tout à fait normal qu’il y ait des gens du cru, du pays, pour créer un état d’esprit, une identité. Quoi de mieux, pour ça, qu’avoir des joueurs d’ici? En termes de mentalité, si vous n’amenez que des mercenaires, ça ne sert pas à grand-chose. Je suis d’origine portugaise et au Portugal, dans le passé, ils ont mis en place ce genre de règlement, donc ça ne me choque pas.

La saison dernière a été marquée par des rumeurs de retards de paiements chez certains joueurs. Est-ce quelque chose sur lequel vous avez exigé une forme de rigueur et de clarté avant de vous engager avec le club ?

J’ai en ai eu vent, mais assez tardivement. Et j’ai fait en sorte auprès de ma direction que les choses se règlent. Ce n’était pas de mon fait, je n’étais pas là, mais je me devais d’intervenir. Mes joueurs, je peux les chérir, les « pourrir« , mais il faut avancer avec eux donc quand il y a une problématique comme ça, je dois me mouiller. J’ai fait ce qu’il fallait à mon niveau pour que les choses rentrent dans l’ordre. Une chose est sûre, c’est que la nouvelle feuille de route est mise en place et pour moi, c’est quelque chose de très important. Ça ne doit pas arriver.