On les trouvait dans les salles de classe et les bibliothèques, mais rarement au pied du sapin de Noël: les atlas attirent de nouveaux lecteurs qui cherchent à mieux comprendre les désordres du monde grâce à des cartes de plus en plus esthétiques et pédagogiques.
« Il y a une trentaine d’années, la majorité des atlas consistaient en une compilation de cartes topographiques », indique Florian Boudinot, l’éditeur chargé des atlas chez Armand Colin, l’un des principaux acteurs du secteur.
Depuis, « les cartographes ont fortement travaillé » pour rendre les cartes « plus accessibles et compréhensibles », mais aussi « esthétiques » grâce à « l’utilisation d’outils issus d’autres secteurs comme l’illustration, l’animation ou les jeux vidéo », explique-t-il.
L’essor des bases de données libres de droits leur a en outre permis de « cartographier des sujets plus inattendus, innovants voire décalés, et ainsi représenter spatialement des informations demeurées invisibles jusqu’à présent », ajoute Florian Boudinot.
La nouvelle génération des atlas doit beaucoup au succès du « Dessous des cartes », l’émission d’Arte qui décrypte les enjeux géopolitiques au moyen de cartes animées et d’infographies depuis 1990.
Le succès aidant, l’émission a été déclinée en atlas qui se sont vendus à plus de 650.000 exemplaires, selon les coéditeurs Arte et Tallandier.
« Les cartes facilitent la compréhension du monde. Par exemple, on saisit mieux pourquoi la Finlande a peur de la Russie en regardant la longueur de leur frontière commune sur une carte », souligne Isabelle Pailler, qui supervise ces atlas.
Cartes insolites
A l’heure du numérique, un atlas en papier « permet de prendre du recul en ayant le temps d’analyser en détail une carte », renchérit Anne Lacambre, directrice des atlas chez Autrement, une maison d’édition qui propose 150 titres.
Spécialisée dans les ouvrages pour étudiants ou enseignants, Autrement a récemment lancé des atlas décalés, comme celui sur les 70 capitales ayant été déplacées au cours des siècles par une catastrophe naturelle, un conflit ou une décision politique. C’est le cas en Côte d’Ivoire, d’Abidjan à Yamoussoukro, en Birmanie, de Rangoun à Naypyidaw ou, actuellement en Indonésie, de Jakarta à Nusantara.
De son côté, l’atlas « des frontières insolites », chez Armand Colin, fait le tour des enclaves et autres territoires inexistants, avec une approche très graphique assumée.
« Le caractère épuré des cartes, en trois couleurs avec le fond bleu et jaune et les frontières en rouge, permet de faire jaillir la fracture, parfois étonnante, insensée ou dramatique, de la frontière coupant un territoire en deux », estime Florian Boudinot.
« Il y a chez les Français, notamment les jeunes, le besoin de comprendre le présent à la lumière du passé », remarque Bertille Comar, éditrice des atlas aux Arènes.
La maison d’édition a vendu plus de 200 000 exemplaires de la collection des Atlas historiques (du Monde, de la France ou de la Terre), qui s’appuie sur l’expertise reconnue du géohistorien Christian Grataloup.
Pour les fêtes, Armand Colin a lancé « Les Cartes nomades », des albums de petits posters à afficher. L’un d’eux, jouant sur la nostalgie, reproduit les célèbres cartes murales du géographe Paul Vidal-Lablache, qui ont décoré les salles de classe pendant près d’un siècle.