Marcel Wagener a annoncé au soir du dernier match de l’année qu’il quitterait la présidence du T71 à l’issue de cette saison. Il revient sur sa décision.
Vous venez d’annoncer votre départ de la présidence du T71 à la fin de cette saison. Pourquoi une telle décision?
Marcel Wagener : C’est quelque chose qui a mûri dans mon esprit depuis le mois d’août dernier. Je m’étais toujours fixé pour objectif de quitter le club au bout de vingt ans, à condition que lui et moi soyons en bonne forme. Et c’est le cas.
Tant d’un point de vue sportif que financier, on se porte très bien actuellement. Si bien que je peux quitter ce « job » avec l’esprit tranquille. C’était le but. Sur le plan sportif, avec notre victoire de mercredi, on est à 99 % sûrs d’être en play-offs chez les messieurs.
Quant aux dames, même si ça ne marche pas très bien actuellement, je ne me fais pas de souci, elles auront une bonne saison. Et sur le plan financier aussi, au bout de vingt ans, je laisse le club en bonne santé.
Pourquoi l’annoncer maintenant?
Il y avait plusieurs possibilités. La première, c’était de le faire tout de suite au mois d’août. Mais à l’époque, on traversait une période compliquée, notamment chez les hommes, avec des blessures, des absences ou des renoncements de dernière minute.
Je ne voulais pas perturber le club outre mesure, la question de la présidence n’était pas primordiale. Du coup, je me suis dit que j’allais laisser le club travailler jusqu’à Noël et le dire à ce moment-là. Et ensuite, laisser venir en toute tranquillité la personne qui me succèdera, lui laisser le temps de se mettre dans le bain tout en l’aidant autant que possible dans sa nouvelle tâche.
Je pense que c’était le bon moment. Je ne regrette pas de l’avoir fait. D’un côté, on est serein, de l’autre, ça laisse le temps de trouver quelqu’un d’autre.
Qui?
Je ne voulais pas le faire, mais mon comité m’a demandé de donner des noms. Du coup, j’ai lancé quelques pistes. Et à partir du moment où la personne aura été choisie, on ira prendre un petit-déjeuner pour discuter un peu de ce qui l’attend afin que je lui donne quelques trucs et astuces pour sa future mission.
J’ai eu tout ce qu’un président pouvait avoir au Luxembourg
Que retenez-vous de ces vingt ans à la tête du T71?
D’un point de vue sportif, j’ai eu tout ce qu’un président pouvait avoir au Luxembourg. On a fait six fois champion chez les messieurs, on a gagné six fois la coupe. Trois fois champion chez les dames et deux fois la Coupe.
On a dû avoir une bonne demi-douzaine de titres de vice-champion, sans oublier deux victoires en Coupe d’Europe en poules, ce qui n’était jamais arrivé au Grand-Duché. Mais ce qui est le plus exceptionnel, je pense, c’est que depuis notre montée au sein de l’élite en 2005 – je suis arrivé en 2004 –, on n’est jamais redescendus.
En 19 ans, on s’est retrouvé en play-downs une seule fois, tant chez les messieurs que chez les dames. Et ça, ça reste quand même un bel exploit. C’est une fierté d’avoir réussi à garder ce club au haut niveau à tous les échelons, qu’il s’agisse des hommes, des dames ou des jeunes. Mais c’est le mérite de toute une équipe.
Quel est votre état d’esprit après cette annonce?
Je me sens un peu mieux. Ce n’est pas quelque chose de facile. Et c’était même une surprise pour beaucoup de gens. J’avais informé mon comité il y a deux semaines. On a essayé de garder tout cela secret. Mais le Luxembourg est petit et tout se sait rapidement.
Donc j’ai attendu les matches de mercredi avant de le dire officiellement. Je crois que le plus étonné, c’était l’entraîneur Yves Defraigne, qui m’a rappelé un peu plus tard. Je tiens d’ailleurs à lui rendre hommage.
Il fait du très très bon travail à Dudelange chez les hommes. Si on regarde tous les jeunes venus d’ailleurs, on constate qu’ils ont fait d’énormes progrès en l’espace de trois ou quatre mois, c’est exceptionnel.
Le candidat idéal à votre succession, vous le voyez comment?
Là encore, il y a plusieurs possibilités. Personnellement, j’étais le type de président toujours très proche de ses joueuses et joueurs. À l’heure actuelle, ce qui est le plus important, c’est d’essayer de fidéliser les sponsors actuels et d’aller en chercher d’autres. Heureusement qu’on a un peu économisé et qu’on se porte bien.
Mais c’est le plus grand challenge : trouver de l’argent. L’autre volet, c’est, selon moi, d’être capable de canaliser les différents courants de pensée qui existent au sein du club. De faire en sorte que tout le monde fonctionne ensemble et reste dans le club. Il ne faut jamais oublier que nous sommes une ASBL, qui fonctionne avec des bénévoles et non pas une association à but lucratif où on peut dégager n’importe qui comme on veut.
Ce n’est pas évident de garder tout le monde sans les vexer et en les motivant. L’an passé, il y avait 140 bénévoles qui nous ont prêté main-forte tout au long de la saison. Si on commence à être trop exigeant, on les perd et on ruine le club. C’est ce que j’essaierai d’expliquer à mon successeur.
Justement, doit-il connaître le club et le sport?
Avant mes vingt ans de présidence, j’avais été pendant six ans à la commission des jeunes, donc cela fait 26 ans au club au total. Mais je venais du foot, je n’avais aucune idée de ce qu’était le basket. D’un côté, ça peut apparaître comme un désavantage, mais je ne le pense pas.
Parce qu’on arrive avec un œil neuf. Plus neutre. Personnellement, je pense qu’il n’est pas nécessaire d’être un spécialiste du basket pour diriger un club de basket.
Comment jugez-vous vos vingt ans à la tête du T71?
Je pense que si on m’avait dit à l’époque que je serais là vingt ans plus tard, j’aurais répondu à la personne : « Tu déconnes ». En fait, tout était positif. J’ai rencontré de très grands personnages, notamment chez les coaches. Tout a commencé avec Carsten Steinser qui a reboosté le tout.
Ensuite, Jan Enjebo a géré les stars, il y a eu Tim Collins, Ken Diederich, Phil Dejworek, Pascal Meurs et maintenant Yves Defraigne. Chez les dames, Jacques Sitz, Thierry Kremer et Jérôme Altmann. Tout ce qu’ils ont fait m’a fasciné. Ce sont tous de sacrément bons coaches que je n’oublierai jamais.
Mais si tout s’est globalement très bien passé, c’est parce que j’ai bien été aidé par tous mes bras droits. À mon arrivée, c’était plus un one man show mais, au fil des ans, j’ai pu déléguer de plus en plus. Et maintenant, je délègue environ 90 % des tâches à des personnes de confiance et compétentes. Ces dernières années, je ne m’occupais pratiquement plus que des finances. Ça, je m’en occupe quotidiennement afin qu’elles soient saines.
Vous verra-t-on encore au club l’année prochaine? Ça va vous faire drôle de devoir payer votre billet à l’entrée?
Honnêtement, ce n’est pas ça qui me tracasse. Mais à l’heure actuelle, je ne sais pas du tout si j’arriverai à aller voir les matches tout de suite ou bien si je romprai avec le basket.
C’est impossible de vous dire à l’heure actuelle ce que je ferai au mois de septembre prochain. Cela dépendra de plusieurs choses, de la personne qui me succédera. Et qui sait, peut-être que je vais me chercher un passe-temps complètement différent.
Qui serait quoi?
C’est vaste. Ça peut aller de l’aide aux demandeurs d’asile jusqu’au football, que pratique mon petit-fils. Peut-être de la politique. Ou une chose à laquelle je ne pense même pas du tout maintenant…
J’ai vécu de très grands moments
Pour conclure, si on vous demande votre plus grand moment en tant que président?
Il y en a eu plusieurs. L’un des plus grands reste le premier trophée du club après 20 ans de disette en 2009, la Coupe contre Contern devant près de 6 000 personnes à l’Arena. Il y a eu aussi la super finale à Steinsel où on n’était pas favoris, mais où Tim Collins a sorti ses trucs avec des systèmes incroyables.
J’ai eu aussi la chance de vivre deux victoires en Coupe avec mes filles dans l’équipe (NDLR : 2011 et 2014). Il y a eu beaucoup de jolis moments. Je me rappelle aussi du titre à la dernière seconde des dames contre la Résidence avec mes deux filles sur le parquet (2009).
Après, il y a des moments qui me restent en travers de la gorge, comme la demi-finale contre Gréngewald l’an passé, des joueurs qui sont partis sans m’avertir… Mais les bons moments compensent largement les mauvais.
Et je tiens également à conclure en disant qu’en 20 ans, que ce soit chez les hommes ou chez les dames, on n’a pratiquement jamais viré un coach en pleine saison. Et le succès que j’ai eu, je le dois avant tout bien sûr aux joueuses et joueurs.
Chez les joueuses, on a toujours eu la chance d’avoir de très bons éléments : mes filles et Alex Kugener au départ. Maintenant, il y a toute la bande des Catherine Mreches, Mandy Geniets, Nadia Mossong…
Et chez les messieurs, je pense bien sûr au trio Gilles Ruffato/Tom Schumacher/Frank Muller qui nous a permis de célébrer des succès fous. Désormais, on souhaite aux deux équipes d’aller le plus loin possible. Pour moi, ce serait le plus beau des cadeaux.