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Bagarre entre bandes rivales à Gasperich : les prévenus prêts à se battre, pas à tuer


Deux bandes de jeunes se rejettent la faute de la bagarre qui a mal tourné. (Photo : archives lq/fabrizio pizzolante)

Dans un camp comme dans l’autre, on était prêt à en découdre, a estimé le procureur. Affirmer le contraire serait naïf. Il a toutefois écarté l’intention de tuer du chef des prévenus.

Qui a commencé et qui a donné le premier coup ? Deux bandes rivales se sont affrontées à Gasperich, vers 2 h, dans la nuit du 24 au 25 août 2018. Dan et Gilles ont sévèrement blessé deux jeunes hommes d’un coup de poing et d’une balle de pistolet à air comprimé. Ils comparaissent ces jours-ci face à la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg pour tentative de meurtre et coups et blessures volontaires, entre autres. Des faits loin d’être anodins dus à ce qui ressemble à des gamineries.

À la barre, les membres des deux bandes se rejettent la faute, ainsi que l’initiative des provocations et des intimidations. Plutôt que d’éviter la confrontation, les deux bandes qui prétendent à la fois se craindre et ne pas avoir pris au sérieux les menaces, se sont retrouvées pour assister à «un un contre un» entre Daniel et Garba. «Lors de la première phase de la bagarre, je n’ai rien pu faire. Garba a enroulé mes cheveux autour de sa main pour m’immobiliser. Cela faisait mal», explique Daniel, petite queue de cheval sur le haut du crâne, qui assure ne pas avoir eu l’intention de blesser son adversaire. «Je n’ai fait que lui donner un seul coup de poing. Il s’est écroulé et il est mal tombé.»

« Ils l’avaient cherché en venant à Gasperich »

Le prévenu a expliqué jeudi que les deux bandes ont «paniqué» et n’ont pas pensé à prévenir les secours ou la police. Ce que leur reproche la présidente. «Il a failli mourir et Ivo aurait pu perdre un œil», le gronde-t-elle. «Et vous n’avez pas cherché à savoir ce qui était arrivé aux blessés ou à demander à Gilles ce qui lui a pris de tirer au visage de quelqu’un?» Gilles ne parvient pas à expliquer son geste. Il aurait pris l’arme «sans réfléchir», «par sécurité», «pour ramener le calme si besoin».

«Vos dépositions font peur. Vous étiez énervé parce que Sully a pris un coup et vous avez tiré sur Ivo», constate la juge. Ce grand costaud est dans ses petits souliers. «Nous avons été bêtes. Pour moi, sur le moment, ils l’avaient cherché en venant à Gasperich», explique Gilles. «Le lendemain des faits, vous avez provoqué les cousins d’Ivo en leur disant que vous les attendiez», lui rappelle la présidente. L’art de remettre de l’huile sur le feu.

Responsabilité partagée

Le procureur a conclu à une «légèreté blâmable» «des deux côtés». Les victimes présumées, tout autant que les prévenus, étaient, selon lui, prêts à se battre. À se battre, à faire mal, mais pas à tuer. Il a demandé au tribunal de ne pas retenir la tentative de meurtre à l’encontre des deux prévenus, mais les coups et blessures volontaires, ainsi que la détention d’armes prohibées pour le pistolet à air comprimé et un poing américain. Il a rejeté la légitime défense et l’excuse de provocation invoquées par la défense et a requis une peine de 22 mois de prison et une amende appropriée contre Daniel et Gilles. Le magistrat ne s’est pas opposé à un sursis intégral.

De quoi ne rasséréner qu’à moitié la défense qui est d’avis que Garba était l’agent provocateur qui «s’est acharné pour trouver Daniel pendant des semaines après l’incident survenu en juin dans une boîte de nuit pour régler les choses avec lui», selon Me Lynn Frank. «Il voulait un un contre un parce qu’il pensait avoir été traité de manière injuste en boîte de nuit». Garba a reconnu lui-même à la barre avoir voulu en découdre avec Daniel, a rappelé Me Henri Frank qui conteste la demande de la partie civile. «Si vous ne la déclarez pas irrecevable, je demande un partage de la responsabilité largement favorable à mon client», plaide-t-il.

«Les gestes commis sont irréparables»

Loin des avocats l’intention de minimiser les faits, «les gestes commis sont irréparables» et inexcusables, mais ils ont prié la chambre criminelle d’être clémente envers leurs clients. Ils se rallient au parquet quant aux qualifications et plaident le dépassement du délai raisonnable comme circonstance atténuante. Me Says a enjoint le tribunal de condamner Gilles, le cas échéant, à une peine aménageable pour qu’il ne perde pas son emploi.

Les deux prévenus se seraient tenus à carreau ces dernières années et ne seraient pas les méchants garçons dangereux pour lesquels la partie adverse essaye de les faire passer. «J’ai encore reçu des provocations de Garba ces derniers mois», confie Daniel en larmes après lui avoir présenté ses excuses. «J’espère que la prochaine fois que nous nous croiserons, cela se passera de manière paisible.»

Le prononcé est fixé au 2 mars.