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Back to Sport : «Ce n’est pas le valide à gauche, la personne handicapée à droite»


L’équipe de Back to Sport (B2S) lors des «Roues ovales luxembourgeoises», un tournoi de rugby à 7 en fauteuil.  (Photo: alain rischard)

Fondée en 2016, l’ASBL Back to Sport offre la possibilité de faire du sport aux personnes atteintes d’un handicap, le tout avec des valides. Entretien avec son coordinateur général, Xavier Masson.

Confronté au manque d’accompagnement sportif pour les personnes porteuses d’un handicap après leurs soins, Xavier Masson, rééducateur en neurologie, a lancé l’ASBL Back to Sport afin d’y remédier. Coordinateur général de la jeune association, ce dernier est aidé par les 28 membres du comité d’administration et de l’équipe technique (entraîneurs, bénévoles) afin d’organiser des entraînements et des évènements pour plus d’une centaine d’adhérents, dont la particularité se trouve dans le mélange entre des sportifs spécifiques, atteints d’un handicap, et des sportifs valides.

Quelle est l’origine de Back to sport?

Xavier Masson : C’est une ASBL qui a été pensée à partir de 2010. Puis en 2015, nous avons été un peu fous et nous avons commencé à partir d’une randonnée VTT organisée par mon club. On a voulu apporter des vélos spéciaux pour personnes avec un déficit ou un handicap. Et à la suite de cette bonne expérience-là, en 2016, on a décidé de préparer un triathlon inclusif. Mais nous n’avions pas de club, pas de structure, pas de comité officiel donc nous avons décidé de monter une association afin de créer 5 équipes pour participer à ce premier Spicy 3 (NDLR : triathlon aux lacs de l’Eau d’Heure). Alors, Back to Sport est née afin de préparer ces sportifs. Et de quelques entraînements dans l’eau à Esch-sur-Sûre et Remerschen, on a démarré cette folie qui est l’inclusion de personnes motivées pour faire du sport avec celles portant un handicap.

On a essayé de répondre à plusieurs questions : faire du sport ensemble, autrement, pour et avec l’autre, tout en donnant l’accès aux personnes avec un handicap pour s’entraîner. Cela permet de partager mes passions avec mon boulot de rééducation en neurologie, où l’on est en contact avec les problèmes des patients qui doivent reprendre une vie active le plus possible. Donc ça veut dire aussi reprendre goût au sport. Et c’est la combinaison avec le sport nature, qui est ma passion. On a décidé de mettre l’accent sur la reprise du sport après un choc, une maladie ou un accident et la phase hôpital. Mais pour cela, les gens ne sont pas accompagnés. Il n’y a pas de clubs spécifiques après le centre de rééducation.

Mettre l’accent sur la reprise du sport après un choc, une maladie ou un accident et la phase hôpital

Le manque d’accompagnement sportif existe-t-il encore aujourd’hui?

Oui, complètement, on répond toujours à un manque. Dans une salle de sport, on voit très peu de personnes avec des béquilles, des chaises roulantes ou des spécificités. C’est parce que le culte du sport, c’est la performance absolue et le fait de repousser les limites que l’on connaît à la télévision ou sur les réseaux. Heureusement, il y a une tendance de personnes avec un problème sensoriel ou une difficulté motrice qui peuvent se dépasser, mais elles ne peuvent pas le faire seules. Nous, on ne se ferme pas à une pathologie et ce n’est pas le valide à gauche, la personne handicapée à droite.

Et j’adore que les sportifs continuent d’année en année avec Back to Sport mais si on fait notre job pendant six mois ou un an, c’est très bien aussi. On a ce rôle de potentialiser, propulser et pousser des sportifs vers ce qu’ils veulent faire en autonomie.

Vous êtes également en relation avec des sponsors pour développer l’ASBL?

Oui, il y a des connexions qui sont le résultat d’une même envie : donner l’accès au sport. Que ce soit pour des vélos adaptés, pour un entraînement spécifique ou pour avoir une prothèse. Par exemple, on a rencontré une firme qui donne accès à des tests de prothèse en lame de carbone et nos adhérents pourraient en bénéficier. Back to Sport, c’est l’exemple d’un club qui s’entoure avec des médecins, des spécialistes, des fabricants de vélos et aussi des sportifs partenaires. On a de très bons sportifs qui sont passés par Back to Sport comme Carlos, qui était au premier Spicy en 2016 et qui est maintenant dans l’équipe nationale de handbike du Portugal.

Il y en a qui viennent pour le loisir et d’autres pour des compétitions d’élite

Nous sommes très fiers de cela et ils ont profité des connexions en trouvant un sponsor qui était un de Back to Sport. Parce qu’il faut savoir que par exemple, un vélo handbike c’est 12 000 euros et on ne peut pas en payer à tous. Les partenaires sont ceux qui donnent de l’argent mais aussi des solutions.

Faut-il être sportif pour adhérer à Back to Sport?

Non, si on prend les couleurs au ski, on a du vert, bleu, rouge et noir. Et c’est assez intéressant à analyser, car avec des sportifs d’élite dans leur vie d’avant, on a parfois des surprises et des difficultés pour reprendre car c’est plus dur qu’avant ou différent. Et on en a d’autres qui, avec une vie sédentaire avant, prennent goût au sport spécifique. On a de tout et c’est génial car ce sont différentes réflexions pour nous. Certains viennent, se dépassent et deviennent des surhommes, des héros.

En juin, premier raid triathlon inclusif au Grand-Duché

«Pour la première fois dans la Grande Région, on va organiser un raid triathlon inclusif. Cela va être quelque chose d’un peu fou au Luxembourg», annonce fièrement Xavier Masson, dont l’ASBL souhaite «surfer sur la vague des Jeux olympiques de Paris et du sport pour tous». Prévu le 1er juin 2024, le raid inclusif se déroulera à Remerschen, un bel exemple de connexion avec l’association Baggerweier «qui a voulu faire du lac un site nature et accessible» avec des planchers, des pontons, des vestiaires et des toilettes adaptés.

Le triathlon, en relais d’équipe de quatre dont une personne en mobilité réduite, sera découpé de la sorte : 600 mètres de natation, 2 kilomètres de kayak, 25 kilomètres de vélo et un cross d’orientation pour terminer. Pour l’occasion, les routes aux alentours ne seront pas fermées afin de centrer l’objectif sur la participation. «Je veux que ce soit un défi, qu’il n’y ait pas de pression sportive même si on peut le faire avec un chrono.» Pour les motivés, les inscriptions devraient s’ouvrir début mars.

Xavier Masson, coordinateur général de l’ASBL Back to Sport. Photo : dr
L’ASBL Back to sport permet à ses adhérents d’essayer du matériel sportif spécifique, comme ici le handbike. Photo : dr