Moins présents, moins engagés dans le temps, les pompiers volontaires du CGDIS reflètent les changements sociétaux qui conduisent les secours à repenser leur système de volontariat.
Parmi tous les services vitaux, le Corps grand-ducal d’incendie et de secours (CGDIS) a la particularité de fonctionner grâce à l’engagement essentiel des 6 974 pompiers volontaires (en 2024), soit 85 % de son effectif total. Aussi engagé soit-il, le volontariat au sein des secours est cependant loin d’être parfait.
Certes, rapportait le CGDIS dans son dernier rapport, «une étude réalisée par le Liser sur le volontariat au sein du CGDIS devrait permettre de rendre le modèle du volontariat des services de secours encore plus attractif».
Mais Jean-Jacques Schroeder, le chef du département des pompiers volontaires, est catégorique : «Nous n’avons pas un problème de recrutement, mais un problème de présence sur les listes d’astreinte.»
Dans les centres d’incendie et de secours (CIS), chaque pompier volontaire doit marquer ses disponibilités dans un outil de gestion, et l’officier constate que «les gens sont beaucoup moins présents qu’il y a vingt ans».
«La société a évolué»
Le nombre de volontaires ayant augmenté de 8 % entre 2021 et 2024, ce n’est donc pas la quantité mais la qualité de l’engagement qui fait défaut.
La raison? «La société a évolué, mais les secours sont un peu en retard», répond Jean-Jacques Schroeder, qui évoque les changements démographiques et sociétaux, dont l’exemple le plus flagrant est celui du dimanche.
«Quand j’ai commencé dans les années 1990, il n’y avait pas de problème de présence le dimanche. Les gens allaient à la messe, puis restaient à la maison ou au café, donc ils étaient disponibles.»
Aujourd’hui, peu nombreux sont ceux qui restent chez eux, selon l’officier, entre les matches de football en Allemagne, les week-ends à l’étranger et les centres commerciaux. «Les gens ne sont pas disponibles toute la journée et voudraient donc plus de flexibilité.»
Le système actuel d’astreinte, qui ne permet pas d’offrir cette flexibilité en permettant de noter ses disponibilités heure par heure, «n’est plus adapté».
En effet, il est difficile, voire impossible, d’être d’astreinte et de vaquer à ses occupations, «car si nous ne sommes pas à six minutes de la caserne, nous ne sommes pas utiles».
Un volontariat moins long, moins fort
En semaine, le problème se pose aussi, et il est tout aussi contemporain. «Les gens travaillent de plus en plus loin de leurs communes, les femmes travaillent plus, il y a beaucoup de bouchons sur la route, donc les gens ont moins le temps», résume le chef de département. La situation économique actuelle a également un impact, selon lui.
«Aujourd’hui, il n’est plus possible pour un garagiste de fermer son garage en pleine journée, le temps d’une intervention, et de dire à son client de revenir le lendemain. Il perd son client et de l’argent en faisant cela.»
Pour Cédric Gantzer, le chef du département de la direction, le constat est clair : «Le pompier qui investit tout son temps libre dans son engagement au sein du CGDIS n’est plus le profil standard, comme cela était le cas par le passé.»
L’état-major du CGDIS a également conscience que l’engagement des pompiers volontaires «a évolué dans son intensité et sa durée». «Avant, les gens s’engageaient pour la vie, maintenant c’est plutôt pour cinq ou dix ans», confirme Jean-Jacques Schroeder.
Ce dernier cite encore la diversité grandissante des associations comme l’une des raisons de la dispersion du volontariat.
«Flexibiliser l’engagement»
Malgré ces difficultés, «notre objectif n’est pas de tout professionnaliser», précise l’officier du département des volontaires. Un tel objectif serait inatteignable, sachant que 74 des 95 CIS sont purement composés de volontaires et que seulement 50 professionnels sont recrutés chaque année.
Afin d’améliorer la qualité de l’investissement des volontaires, «des travaux sont en cours pour un état des lieux du volontariat avec des recommandations pour un statut volontaire adapté aux évolutions sociétales et juridiques», annonce Cédric Gantzer.
À l’avenir, le CGDIS devrait pouvoir présenter «des pistes afin de flexibiliser l’engagement, en adéquation avec les besoins du service».
Au-delà de ce changement, Jean-Jacques Schroeder évoque une autre piste, complexe : l’intégration des personnes immigrées. «Nous avons un taux de migration de presque 50 %, mais le problème est que nous ne pouvons pas intégrer les gens qui ne parlent pas luxembourgeois», regrette-t-il.
La formation des volontaires se déroule en luxembourgeois, tandis que la langue de l’examen est l’allemand. «Et puis, la communication sur le terrain est très importante. Ne parler qu’anglais c’est compliqué.» De quoi se priver du renfort d’une bonne partie de la population.
Un dispositif en cas de manque de personnel
Lorsque le gestionnaire de permanence du centre d’incendie et de secours (CIS) constate un manque de personnel, il peut d’abord lancer un rappel pour voir si des pompiers volontaires n’ayant pas introduit leurs disponibilités sont éventuellement disposés à se libérer.
Si cela ne suffit pas, un groupe «back-up» est activé en cas d’alerte pour trouver le personnel nécessaire afin de garantir le bon déroulement de l’intervention. La dernière solution est celle de l’alerte générale, qui est notamment utilisée en cas de catastrophe comme la tornade de 2019 ou les inondations de juillet 2021.
L’indemnisation des volontaires

Pour une permanence en astreinte, le pompier volontaire perçoit 1 euro par heure de prestation. C’est dix fois plus pour une permanence en garde casernée, soit 10 euros de l’heure.
Pour l’exercice de fonctions managériales (chef de centre, chef de groupe, chef de centre adjoint, chef de groupe adjoint), le volontaire touche une indemnité mensuelle forfaitaire
fixée en fonction d’une charge de travail théorique, de 160 à 250 euros par mois.