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Attentat à la pudeur : le prévenu demande la récusation de la chambre criminelle


L’affaire n’en finit pas alors qu’elle n’a pas encore commencé.

Personne ne l’avait pas vu venir : alors que l’affaire traîne depuis des années, le prévenu a trouvé un nouveau moyen d’obtenir son ajournement. Il dénonce la partialité de la présidente.

«Un jour, on arrêtera de jouer», avait prévenu la présidente de la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg le 5 mars dernier. Il se pourrait qu’elle quitte la partie avant Nesat. Le prévenu joue avec les nerfs du tribunal et les limites des droits de la défense pour obtenir de nouvelles remises de son affaire. Mardi, il a demandé en début d’audience à son avocat de déposer une requête en récusation de la juge. Et le procès a, une nouvelle fois, dû être ajourné sine die.

À quoi le Serbe de 45 ans joue-t-il ? Quel est le but de celui qui à la barre a prétendu vouloir que son procès soit enfin évacué ? Mardi matin, Nesat a continué sur sa lancée déjà maintes fois éprouvée depuis sa demande d’opposition à un jugement de 2019 qui le condamnait par défaut à une peine de 5 ans de prison pour avoir commis un attentat à la pudeur avec les circonstances aggravantes de violences et de menaces sur une fillette dans un foyer de réfugiés à Foetz le 3 février 2016. Au moment où tombait la sentence, Nesat était à Belgrade. Considéré comme fugitif, il a intégré la liste des prédateurs sexuels les plus recherchés d’Europe en octobre 2020 avant de négocier son retour au Luxembourg puis de s’opposer à sa condamnation. Son nouveau procès était fixé aux 15 et 16 juin 2021. Les remises se sont enchaînées depuis.

D’entrée de jeu mardi, son avocat a demandé une nouvelle remise, arguant que son client n’avait pas reçu la traduction de son dossier d’accusation en serbo-croate. Or, un traducteur s’est rendu au centre pénitentiaire Ueschterhaff, où Nesat est incarcéré depuis le 5 août 2022 après avoir passé 7 mois à Schrassig – avec le principal enquêteur pour les lui remettre en main propre le 22 mai dernier. «Il ne les a pas acceptés», lui a rétorqué la présidente. «Tous les éléments essentiels à sa défense ont été traduits. La seule pièce qui ne l’était pas était un transmis. Il aurait pu demander à l’interprète de lui traduire ce document administratif.» Depuis le début de son procès, outre les avocats, le prévenu a étrenné à peu près tous les interprètes dont dispose le tribunal en serbe et en anglais et continue de prétendre ne pas savoir exactement de quoi il est accusé.

Parquet et tribunal pensaient avoir paré à toute éventualité, mais Nesat a toujours un coup d’avance. Il use et abuse de l’article 6 de la convention européenne des droits de l’homme qui stipule que le prévenu doit, entre autres, être informé dans une langue qu’il comprend et de manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation qui est portée contre lui.

En temps normal, dans un souci d’équité et en vertu de la présomption d’innocence, le tribunal doit donner droit aux desiderata de la défense. Mais pas cette fois. Après s’être retiré quelques instants pour délibérer, le tribunal a décidé de commencer le procès coûte que coûte. «Depuis le 21 mars 2023, il refuse systématiquement les documents qui lui sont adressés. Qu’il ne vienne pas nous dire que ses droits n’ont pas été respectés», a noté la présidente qui ne se doutait pas encore être assise sur un siège éjectable.

Un procès sans fin

Après avoir décliné son identité, Nesat, dans un anglais parfait, a demandé la récusation de la juge. Lors de la précédente audience, elle a déclaré que «même s’il commence déjà légèrement à m’énerver». Cette phrase, reprise par nos collègues du Luxemburger Wort, «est inacceptable et fausse l’impartialité du jugement», a expliqué le prévenu, reprochant à la présidente d’avoir trop élevé la voix. Il se victimise en se plaignant d’un prétendu «non-respect des procédures» – «Tout était contre moi» – et annonce qu’il ne participera pas au reste de son procès s’il continue sans récusation de la présidente. Sur quoi le tribunal a ordonné une nouvelle suspension d’audience.

À la reprise, vers 9 h 45, Me Paris a quitté précipitamment la salle sans mot dire. A-t-il choisi de jeter l’éponge comme une dizaine de confrères avant lui ou est-il allé rédiger la requête en récusation ? Trente minutes plus tard, il est de retour avec un document en français qu’il fait signer à Nesat. «Il me fait confiance», répond-il au tribunal étonné avant de repartir aussi sec pour remettre le document au greffe du tribunal. La présidente a décidé d’interrompre l’audience jusqu’à ce que tombe la décision quant à la recevabilité de la requête. L’affaire n’en finit pas avant d’avoir commencé.

En attendant, une jeune fille aujourd’hui âgée de 15 ans et ses parents attendent que son agresseur présumé soit jugé définitivement. Le prévenu nie les faits et se dit victime du chantage d’une gamine alors âgée de 7 ans. Il aurait attiré la fillette dans sa chambre pour lui faire subir des actes sexuels après lui avoir fait porter des vêtements de son épouse. Selon lui, la gamine aurait profité qu’il dormait pour s’introduire dans la pièce, mettre les vêtements, allumer une cigarette et boire de sa bière avant de le menacer de l’accuser d’attouchements s’il la dénonçait.

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