Une première journée de réflexion s’est déroulée à Remich, suscitant de l’espoir parmi la soixantaine d’associations présentes.
C’est un moment historique!», a déclaré lundi matin à Remich, la ministre de l’Égalité des genres et de la Diversité, Yuriko Backes. Bien que prononcée le jour de l’investiture de Donald Trump, cette phrase ne commentait pas l’actualité des États-Unis – la seule référence à ce qui se passait de l’autre côté de l’Atlantique fut un laconique : «le contexte mondial est difficile». Non, ce «moment historique», c’étaient les premières «Assises des violences fondées sur le genre» qui avaient lieu à Remich. Toute une journée consacrée à cette problématique à laquelle ont participé plus de 60 associations et ONG travaillant quotidiennement sur les violences faites aux femmes, mais aussi des représentants du parquet et de divers ministères ou communes.
Après avoir écouté l’allocution de la ministre et une conférence portant sur «les violences fondées sur le genre couvertes par la convention d’Istanbul», la centaine de participants s’est ensuite dispersée dans l’un des cinq ateliers thématiques proposés.
Axés sur le besoin de formation, la sensibilisation, la collecte des données et la prise en charge des auteurs et des victimes, ils ont été l’occasion pour chacun d’échanger ses expériences. Mais aussi, et surtout, de soumettre des pistes d’amélioration.
L’objectif étant d’aider à la conception d’un plan national sur les violences fondées sur le genre (femmes, hommes, personnes non binaires et enfants dans toute leur diversité) avant l’été et de faire du futur Centre national d’aide pour les victimes de violences, un lieu le plus opérationnel possible dès avril. «Un travail titanesque», selon la ministre, reconnaissant que «bien qu’on ne commence pas de zéro, il faut un cadre stratégique».
Ana Pinto, présidente de l’ASBL La Voix des survivant·e·s, se réjouissait de faire la connaissance d’autres associations et espérait beaucoup de ces assises. Mais surtout, après les avoir réclamées pendant cinq ans, elle souhaitait qu’elles soient suivies d’effet, avait-elle confié avant de se rendre à l’atelier sur la sensibilisation.
«Une lueur d’espoir»
Bien qu’il sache que ces assises ne résoudraient pas d’un coup de baguette magique tous les problèmes, Walid Megharbi, responsable d’Infomann, a estimé, après cette journée, qu’elles avaient été «un espace qu’on a rarement, voire jamais». Lui qui coanimait l’atelier sur la prise en charge des victimes a raconté comment cela s’était passé. «Plusieurs intervenants de différents aspects de la prise en charge ont posé leurs questions, notifié leurs difficultés au quotidien», a-t-il rapporté. «Je pense que ce qui est revenu un peu dans tous les groupes, c’est qu’il y avait un manque de communication entre les différentes parties, le service judiciaire, tout ce qui est ministère, etc., et qu’il faudrait créer un lien entre ces trois axes.»
Les échanges au cours de cet atelier lui ont-ils appris quelque chose? «Oui. Par exemple, on se pose toujours la question de savoir pourquoi les enfants ont été placés à tel ou tel moment. Le parquet nous a expliqué sur quels éléments ces décisions se basaient. Au sein de l’association, nous n’avons que le retour des personnes qu’on voit en consultation, sans disposer des informations officielles. Donc oui, ça nous a éclairés sur plusieurs choses et surtout sur le fait qu’au Luxembourg, il n’y a pas vraiment de cadre légal sur le partage d’informations entre les différents partenaires», résume-t-il.
Quant à Ana Pinto, jointe, elle aussi, le lendemain des assises, elle a remarqué que ce qui ressortait plus ou moins de tous les ateliers, c’était que «pas assez n’est fait» pour lutter contre les violences de genre. Et de pointer «les campagnes de sensibilisation» quasi inexistantes ou pas là où les victimes peuvent les voir. Certaines femmes victimes de violences n’ont pas la possibilité de se connecter sur internet, a-t-elle expliqué aux représentants du ministère lors de l’atelier, eux qui ne pouvaient imaginer que l’accès au web pouvait être confisqué à ces victimes par leur mari. Après avoir discuté avec d’autres associations, Ana Pinto a constaté qu’«on avait toutes un peu une lueur d’espoir, on a trouvé que c’était quand même très, très positif qu’ils appellent tout le monde. Pas seulement nous, mais vraiment tous les acteurs. Il y avait même l’Ombudsman pour les droits de l’enfant», s’est-elle réjouie, elle qui place les enfants en tant que victimes au cœur de son engagement.
D’ici à deux semaines, les animateurs des ateliers vont transmettre leur rapport au ministère de l’Égalité des genres (MEGA), en mentionnant les problématiques soulevées et les solutions proposées par les intervenants eux-mêmes. Puis, une réunion interministerielle devrait se tenir en février. «Seront présents la Justice, le MEGA, l’Éducation nationale, la Santé, les Affaires étrangères, etc. Ils vont travailler sur ce que nous avons dit lors de ces assises. Des idées vont sortir de ça. C’est positif», affirme Ana Pinto qui ira prochainement défendre à la Chambre une proposition de loi pour lutter contre les violences fondées sur le genre et leurs conséquences sur les enfants.