Ouverte exceptionnellement dans le cadre de la LUGA, la galerie souterraine accueille une exposition sonore inédite. Plongez dans les profondeurs de la capitale.
Place d’Armes, rue des Bains, boulevard Royal… Et dire que sous les rues de la capitale, se cache un tunnel presque inconnu des Luxembourgeois. Ce matin-là, les premiers rayons de soleil viennent réchauffer la ville de Luxembourg, plongée depuis quelques jours dans la fraîcheur et l’humidité. Près de la vallée de la Pétrusse, Luc Reis, manager directeur de la société exploitante de cet événement, attend les premiers curieux. Après un rapide briefing, la visite dans les entrailles de la capitale peut commencer.
À peine entré à l’intérieur, le contraste est saisissant. Des 20 degrés extérieurs, nous descendons à 14. «La température est d’ailleurs constante dans le tunnel», précise Luc Reis. Dans l’atmosphère humide de ce dédale souterrain, on distingue, au fil de nos pas, une musique apaisante. Ces chants, ce sont ceux de l’artiste écossaise Susan Philipsz. Avec le Mudam, elle a imaginé et installé son exposition sonore, ici à l’Aquatunnel. Pour ce faire, elle s’est inspirée de la ville de Luxembourg et d’une légende très connue, le mythe de Mélusine. En écoutant plus attentivement ces sons, on peut reconnaître des chants de la célèbre femme sirène. «L’artiste est venue plusieurs fois dans la galerie pour s’imprégner du lieu. Elle a voulu uniquement intégrer cette bande-son et laisser le côté brut du tunnel. Elle a mis un an pour tout réaliser», explique Luc Reis.
Un bunker à Luxembourg?
Unique dans la capitale, ce tunnel a été construit dans les années 1960. Pendant deux ans, les mineurs ont creusé dans la roche pour construire une galerie, qui servirait à installer les canalisations de la ville de Luxembourg. À l’époque, la capitale, qui devient de plus en plus dense, a besoin d’un système d’évacuation plus moderne. En 1963, l’Aquatunnel est finalisé. «Les ouvriers travaillaient à l’époque avec des procédés manuels. D’ailleurs, ils ont sorti près de 14 000 mètres cubes de pierres», précise le manager directeur de la société exploitante de l’événement. Un usage technique donc, mais dans les années 1960, en pleine guerre froide, on imagine que ce tunnel peut servir de refuge antinucléaire. Mais ce projet ne verra jamais le jour. «Ce tunnel n’a jamais été vraiment conçu pour accueillir de nombreuses personnes, car il n’y a pas de système de ventilation», indique Luc Reis. Aujourd’hui, cette galerie appartenant à la ville de Luxembourg est toujours utilisée pour le transfert des eaux usées de Bonnevoie à la station d’épuration de Beggen. «De nos jours, c’est un tunnel de révision. Tous les trois mois, des agents de la ville viennent contrôler le système», précise Luc Reis.
Un puits datant du XIXe siècle
Au rythme de la musique, nous continuons la visite de la galerie souterraine de la ville et nous arrêtons en dessous d’un lieu bien connu des Luxembourgeois, la place d’Armes. Juste à côté de la pancarte, nous pénétrons dans un lieu quelque peu caché. «Ici, nous sommes situés au niveau du kiosque de la place. À cet endroit, on peut apercevoir une plaque en fonte qui donne sur l’ancien puits de Luxembourg. Dans les années 1800, ses habitants s’y servaient pour alimenter la ville en eau», indique Luc Reis. Quelques mètres plus haut, une autre découverte nous attend. «Cette source vient du Limpersberg. Elle retombe dans le Pfaffenthal. D’ailleurs, ce tunnel relie la vallée de la Pétrusse avec la vallée du Pfaffenthal», ajoute-t-il.
Au fil cette balade souterraine, nous voyons défiler différentes rues du centre-ville. Difficile de s’imaginer que plusieurs mètres plus haut, se joue le ballet incessant de l’agitation de la ville. Nous traversons par exemple la rue des Bains, qui autrefois était alimentée par des sources. Elle abrite aujourd’hui la piscine de Luxembourg. Nous continuons vers la Grand-Rue pour arriver jusqu’au boulevard Royal. La sortie de l’Aquatunnel commence à se rapprocher. Les marquages blancs inscrits sur la roche indiquent les derniers mètres restants. Le sol humide redevient peu à peu plus sec. Après 900 mètres de marche, nous voilà dans l’entrée B du tunnel.
«Les visiteurs peuvent aussi emprunter cette allée pour rejoindre le point A», précise le manager directeur de «sightseeing.lu». Les chants de Susan Philipsz s’évanouissent peu à peu. On découvre un graffiti dont l’auteur est inconnu. En allemand, il y est écrit : «Le bon chemin est doré.» À la sortie, nous nous retrouvons près de la porte Vauban, avec vue sur le pont Rouge qui mène au quartier du Kirchberg. Une balade de trente minutes qui nous aura donné une autre dimension de la ville de Luxembourg, bien loin de son effervescence habituelle.
Déjà 2 000 visiteurs
Depuis un mois, l’Aquatunnel a ouvert ses portes au public. Si certains Luxembourgeois connaissent ce lieu, qui a accueilli plusieurs fois une partie de la course DKV Urban Trail, pour beaucoup, c’est un endroit insolite. «Le public est très varié. Nous avons des locaux, mais aussi beaucoup de touristes et des personnes qui viennent profiter des installations de la LUGA», indique Luc Reis, le manager directeur de «sightseeing.lu». Et le succès est déjà au rendez-vous. Deux mille curieux ont déjà découvert l’Aquatunnel depuis le lancement de son ouverture au public.
Côté pratique, le tunnel est ouvert tous les jours, du lundi au dimanche de 10 h à 18 h. Pour y accéder, deux entrées sont possibles, l’une près de la vallée de la Pétrusse (départs à chaque heure pleine), l’autre par le Pfaffenthal (départs à chaque demi-heure). Le tarif est de 12 euros (sauf réductions). Le nombre de participants est limité à 30 personnes.


