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Allemagne : un gouvernement à la peine et une extrême droite en embuscade


La coalition du chancelier Friedrich Merz n’a pas le vent en poupe. (photo AFP)

Désaccords publics, luttes intestines, piteux sondages : la coalition du chancelier Merz fait piètre figure après six mois de pouvoir, à l’aube d’une année électorale chargée où l’extrême droite est en embuscade.

«Jamais en Allemagne un gouvernement n’a fait autant de mécontents en si peu de temps», assène le directeur de l’institut de sondage Forsa, Manfred Güllner.

Vainqueurs des législatives de février avec 28,5 %, les conservateurs (CDU/CSU) de Friedrich Merz sont désormais au coude-à-coude, à 25-27 %, avec l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), formation nationaliste et antimigrants, arrivée deuxième avec 20,5 % et désormais premier parti d’opposition.

Quant aux sociaux-démocrates (SPD), partenaires de la coalition de Merz, leur popularité tourne autour à 13-15 %, après avoir déjà enregistré leur pire score de l’après-guerre (16,5 %) aux dernières élections.

«De nombreux citoyens sont déçus du travail du gouvernement qui semble divisé, se concentrant uniquement sur la migration plutôt que sur l’économie, l’éducation et la sécurité», constate le député Roderich Kiesewetter, membre du groupe Compass Mitte (NDLR : Boussole au centre) récemment fondé par des conservateurs hostiles au coup de barre à droite du chancelier qui tente ainsi de se refaire face à l’AfD.

«Désaccords publics, luttes intestines, piteux sondages : la coalition du chancelier Merz fait piètre figure après six mois de pouvoir», assène Roderich Kiesewetter.

Craindre le compromis

Car les couacs s’accumulent depuis l’échec de Merz à se faire élire comme chancelier au premier tour au Bundestag, début mai, une première dans l’Allemagne d’après guerre.

En juillet, ils n’ont pu s’entendre sur la nomination de trois juges à la Cour constitutionnelle. Ensuite, c’est la dispute sur la réforme des retraites, pourtant adoptée en conseil des ministres, un groupe de jeunes députés conservateurs refusant de donner son accord, estimant qu’elle «faisait peser des milliards sur la jeune génération».

Quant à la refonte du service militaire, qui devait marquer le coup d’envoi de l’armée allemande de demain, elle s’est muée en un interminable psychodrame, le ministre social-démocrate de la Défense rejetant en octobre l’accord conclu entre son parti et les conservateurs. Depuis, ce sont négociations et tergiversations.

«Conservateurs et sociaux-démocrates peinent à aller vers l’autre : dans les deux camps, ils craignent qu’en nouant des compromis, ils soient encore plus faibles auprès de leur électorat», analyse Aiko Wagner, politologue à l’université libre de Berlin.

La situation est particulièrement délicate pour les sociaux-démocrates, «en déclin depuis des années», souligne Manfred Güllner. En vingt ans, leur score électoral a plongé de quasiment vingt points.

Quant au chancelier, il peine à contrer l’essor de l’AfD, désigné comme le «principal adversaire» de son parti avant cinq scrutins régionaux prévus en 2026. La formation d’extrême droite peut espérer en remporter deux, et atteindre des scores records dans les trois autres.

Un autre ministre sur la sellette

S’il rejette toute alliance avec l’extrême droite, ses positions sont de plus en plus tranchées sur les étrangers, sujet au cœur de la popularité de l’AfD.

Ces sorties, comme celle en octobre où il a déclaré que l’immigration «était un problème dans le paysage urbain allemand», ont heurté plus d’un social-démocrate, comme Wiebke Esdar, vice-présidente du SPD au Bundestag, qui a bravé les consignes de son parti et manifesté contre Merz.

Désormais, c’est le ministre conservateur des Affaires étrangères qui est sur la sellette dans son propre camp, pour avoir émis des réserves quant à la possibilité de rapatrier en masse les Syriens vivant en Allemagne.

«Personne ne voit ce gouvernement rester quatre ans au pouvoir. Beaucoup pensent qu’à la fin de l’année prochaine, après les élections (NDLR : régionales de 2026) la situation deviendra très difficile pour le gouvernement à Berlin et qu’il éclatera», prédit Sebastian Münzenmaier, député de l’AfD.

Devant le Bundestag, les avis de badauds étaient partagés : «Ce serait une catastrophe s’il restait quatre ans au pouvoir», juge pour sa part Volker, 60 ans, originaire de Cottbus (Est), convaincu par l’extrême droite.

Mais pour Stephanie et Bernd Nebel, venus de Munich (sud), «ce serait mauvais pour l’Allemagne», si la coalition au pouvoir explosait.

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