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Alex reconnaît avoir été à deux doigts de passer à l’acte


Le Suédois de 23 ans a longuement été interrogé hier après-midi sur ses intentions et sa manière d’envisager l’avenir.

Oui, Alex a suivi une voie peu conventionnelle qui l’amène face à la justice. Il le reconnaît et dit avoir retrouvé un chemin plus droit et moralement acceptable. Il met cartes sur table.

Face aux preuves récoltées contre lui par la section antiterroriste de la police, Alex n’a pas d’autre choix que de reconnaître ce dont il est accusé. Oui, oui, oui, oui… Le procureur l’a interrogé point par point. La conception de TATP (un explosif) et de nitroglycérine ? De précurseurs ? Son affiliation aux groupes terroristes The Base et The Green Brigade en pleine connaissance de cause ? L’incitation, la propagande, le recrutement, l’entraînement à la planification d’actes terroristes… La réponse d’Alex est invariable. Il va même jusqu’à reconnaître que «les attentats étaient une probabilité réelle» s’il n’avait pas été arrêté par la police.

Le Suédois de 23 ans, qui comparaît depuis la semaine dernière face à la 12e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, a longuement été interrogé hier après-midi sur ses intentions et sa manière d’envisager l’avenir. Il explique s’être laissé entraîner par les frustrations qu’il a ressenties à l’adolescence. «À l’époque, tout le monde était un ennemi pour moi.» Seul derrière son écran d’ordinateur, il aurait finalement trouvé «des personnes qui partageaient ses intérêts» et qui lui apportaient respect et reconnaissance. «J’avais l’impression qu’ils me comprenaient.»

Toute son activité en ligne et hors ligne a été décortiquée par les enquêteurs de la section antiterroriste de la police judiciaire. Pour eux, le doute n’est pas permis quant à son appartenance à des groupes terroristes et à ses intentions mortifères. Entre vieilles rengaines néonazies recyclées par ce suprémaciste blanc et préparation de diverses attaques énumérées ces derniers jours, la personnalité du jeune homme inquiète, même s’il prétend avoir changé et s’être mis du plomb dans la cervelle depuis son arrestation en février 2020.

C’est la seule défense qu’il lui reste. Le prévenu affirme vouloir laisser le passé derrière lui pour faire «quelque chose de productif», comme finir ses études d’ingénieur chimiste et fonder une famille. «Vous dites que vous avez honte. Êtes-vous sincère ?», lui demande le procureur. «Oui», assure Alex. «Quelle garantie nous donnez-vous que vous n’êtes plus une menace pour la société ?», tente le juge, qui veut être certain que le prévenu a réellement changé. «J’ai trop à perdre.» Les homosexuels, les étrangers, les femmes et tous les autres qu’il conspuait ? «Je leur laisse le bénéfice du doute et je les considère d’égal à égal.»

Repenti crédible ou négociateur habile ?

Après avoir été «très extrême», Alex prétend avoir mis de l’eau dans son vin et avoir viré conservateur. «Je pensais, dans l’état d’esprit qui était le mien à l’époque, m’engager pour aider les autres. Ma vision du monde était déformée.» À la barre, Alex a tout balayé. Il n’est plus le gamin qui se déguisait en néonazi, reconstituait l’Holocauste avec des fourmis et se réjouissait du malheur des autres. Il n’est plus le faiseur d’explosifs et de colis piégés, le planificateur d’attaques terroristes contre des centrales électriques ou des dépôts de carburant qui a gravi les échelons de The Base et The Green Brigade à vitesse grand V alors qu’il était encore mineur.

Les enquêteurs ont pourtant découvert des éléments qui renversent cette hypothèse et vont compliquer encore un peu plus la tâche de son avocat, Me Says. Dès sa sortie de détention préventive fin 2020 et jusqu’à 2023 au moins, Alex aurait, selon leurs découvertes, repris ses anciennes habitudes. Les enquêteurs ont repéré deux pseudos en ligne derrière lesquels, ils en sont persuadés, se cachait le prévenu. «Un nouveau compte est apparu sur la page iFunny de son ami Zeke, qui est venu le soutenir ici», précise un enquêteur. Alex, sous le couvert de ces pseudos, resterait actif et n’aurait, semble-t-il, pas dévié de ses idéaux.

Ses fréquentations – partis politiques conservateurs de droite, interlocuteurs en ligne ou membres d’organisations d’extrême droite, comme son ami Zeke – ne semblent guère avoir changé, si l’on en juge par les traces retrouvées en ligne, selon les policiers qui n’ont pas trouvé d’éléments prouvant une éventuelle déradicalisation du prévenu ou d’informations sur une thérapie quelconque. «Il ne semble pas avoir appris grand-chose», commente l’enquêteur. «Ce que nous avons trouvé en ligne n’est que la pointe potentielle de l’iceberg.»

Repenti crédible ou négociateur habile ? Quel profil le parquet choisira-t-il de privilégier ? La réponse demain matin.