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Affaire Caritas : «Je ne vais pas en rester là !», lâche Luc Frieden


Luc Frieden face à la presse, hier, pour le briefing de rentrée marqué par l’affaire Caritas. 

L’État va travailler dès le mois d’octobre avec les nouvelles structures qui vont remplacer Caritas. Le Premier ministre est encore bouleversé par cette énorme fraude.

Le Premier ministre est comme tout le monde, il avoue ne pas comprendre comment autant d’argent a pu frauduleusement être viré sur des comptes en Espagne en l’espace de six mois à peine. «Cette question nous préoccupe, le gouvernement comme le Parlement, et je ne vais pas en rester là, je vous le dis en toute honnêteté», lâche Luc Frieden, encore sonné par ce détournement de fonds. En revanche, il a compris que son gouvernement, même s’il répète que «Caritas n’est pas l’État», avait le devoir de trouver des solutions pour poursuivre les activités de l’ONG, prestataire de services pour l’État.

La fondation est sur la paille et l’ensemble de l’équipe de gouvernance a été dirigé vers la sortie et remplacé par un comité de crise avec à sa tête Christian Billon. À l’heure actuelle, Luc Frieden se veut néanmoins rassurant. La seule entité qui a été épargnée par ce détournement massif, Caritas Jeunes et Familles, pourra poursuivre ses activités d’accueil en foyers et maisons relais. Pour la rentrée prochaine, les parents sont assurés de trouver des structures d’accueil toujours gérées par l’ONG.

Pour le reste, le gouvernement «ne peut plus avoir confiance» en la direction actuelle, coupable de «graves manquements», raison pour laquelle les subventions avaient été stoppées net en juillet dernier. Le Premier ministre assure cependant que le contribuable n’a pas été lésé. «Le gouvernement n’a pas perdu d’argent», affirme Luc Frieden, ajoutant que l’État était encore redevable de 1,5 million envers la fondation.

Après une analyse des comptes, c’est ce qui ressort des calculs menés par les différents ministères impliqués, soit la Famille, la Coopération et la Santé. En revanche, 5 millions ont été versés pour des opérations internationales au titre de la Coopération et l’État «ne compte pas les payer deux fois et ils seront déduits du package total». Dans ce cas précis, l’ONG ne preste pas de services, mais l’État cofinance des projets. L’État versait chaque mois environ 4 millions à Caritas, ce qui a participé à constituer ses réserves entièrement détournées.

Sur les 61 millions évaporés, 30 millions de prêts avaient été accordés à la fondation par les banques. «Caritas nous dit que le conseil d’administration n’a jamais approuvé ces prêts», déclare Luc Frieden. Il n’empêche que la fondation devra trouver un moyen pour les rembourser. Il devenait urgent de créer de nouvelles structures pour poursuivre les activités nationales de Caritas, mais en ce qui concerne ses activités de coopération avec des pays tiers, rien n’est sûr. «Nous ne pouvions plus avancer d’argent à la fondation au risque de le voir absorbé par les banques», rappelle le Premier ministre.

Concernant les établissements financiers, la BCEE et BGL-BNP Paribas, le rapport de la Commission de surveillance du secteur financier (CSSF) est attendu avec impatience, «pour voir s’il y a eu des lacunes au niveau des banques». D’ailleurs, l’État est passé par l’intermédiaire d’une autre banque pour verser les subventions nécessaires aux prestations de services en direction des réfugiés et des familles modestes, et à la prise en charge des enfants en maisons relais.

Caritas condamnée à rembourser

L’État établira de nouvelles conventions «avec des mécanismes de contrôle renforcés», à l’exception du domaine international. Seule Caritas Jeunes et Familles survivra à ce désastre financier. La nouvelle organisation de Caritas n’est pas encore mise en place. «Les fonds doivent être constitués, c’est leur job, pas celui de l’État», souligne Luc Frieden. Mais l’argent public continue à être versé pour payer les PME qui ont fourni des biens et des services. Il reste encore des factures à hauteur de 2,5 millions à honorer. «Ces entreprises n’ont rien à voir avec Caritas et doivent continuer à livrer leurs prestations», explique le Premier ministre.

Les salaires des employés de Caritas sont assurés pour septembre et à partir d’octobre, les deux nouvelles structures prendront le relais. Quant à savoir si elles porteront toujours le nom de Caritas, Luc Frieden répond que la question doit être posée aux intéressés.

Le gouvernement entend aussi évaluer s’il est nécessaire de changer la gouvernance des ASBL, qui travaillent beaucoup avec des fonds publics. «Je prends connaissance de la proposition de loi du LSAP, mais je constate que cela ne change pas beaucoup de l’existant dans la mesure où les virements effectués en Espagne comportaient déjà deux signatures», avoue Luc Frieden.

À l’heure actuelle, les banques attendent le remboursement des prêts de l’ancienne Caritas. Les banques vont-elles demander des comptes aux nouvelles structures ? «En tant que juriste, je dirais que c’est une discussion entre les structures existantes et les banques, raison pour laquelle l’État a décidé de faire une coupure avec le passé», répond Luc Frieden. Il faudra attendre encore quelque temps avant de savoir qui reprendra les rênes de la fondation et sous quel nom. Ce qui est sûr, c’est que l’État ne remboursera pas les 30 millions empruntés auprès des banques.